Les spiritualités orientales ont toujours exercé sur l'Occident
une sorte de fascination. Souvent, il ne s'agit que de l'attrait justifié
que beaucoup éprouvent pour une culture complémentaire de
la nôtre, une sagesse ancestrale, des méthodes de concentration
e et de maîtrise de soi.
Parfois hélas, des organisations sectaires s'appuient sur les séductions
de l'Orient pour attirer à elles des proies fragiles qu'elles exploitent
et qu'elles détruisent. C'est l'Orient dévoyé,
au sens double de ce mot : détourné de sa voie mais aussi
corrompu et perverti. Des gourous, vrais ou faux, se prêtent à
des errements et s'offrent à la vénération d'adeptes
abusés.
Le but ici n'est pas de porter un jugement sur les spiritualités
orientales ou leurs accommodements occidentalisés ni sur les innombrables
organisations qui s'en réclament. Certaines sectes, cependant, nous
paraissent devoir être dénoncées.
De " fieffés idiots ", c'est ainsi que le maître Zen
Hakuin, spirituel japonais du XVIIIème siècle, qualifiait
déjà les faux maîtres. La critique des mauvais guides,
ne date en effet, pas d'aujourd'hui et l'Occident n'en détient pas
l'exclusivité.. Ces " vieux coquins aveugles émergent
en permanence " pour perturber et asservir, remarquait pour sa part Lin-Tsi
(maître Tch'an chinois. Le Tch'an est devenu le Zen
japonais. Cité dans la revue hermès, vol 3 - Le Maître
spirituel - P 286). Au XIXème siècle un courant indien
alla même jusqu'à refuser le bien fondé de la fonction
de gourou(Le bramo-Samaj de Ram Mohan Roy).
Certains groupes ont connu la contestation dès leur origine et
dans leur propre milieu. Il en fut ainsi, plus près de nous, de
la Nichiren Shoshu - Soka Gakkai, comme l'a très
bien dit Edward Conze (Edward Conze - Le bouddhisme - Petite
bibliothèque - Paris - P 238) : " Nichiren, le
fondateur, pêchait par un excès d'assurance et par un mauvais
caractère ; il manifestait un degré d'égoïsme
personnel et tribal qui le disqualifiait en tant que maître bouddhiste.
Il ne se bornait pas à penser qu'il était mentionné
en personne dans 'Le Lotus de la Bonne Loi' mais encore que les japonais
étaient la race élue qui régénérerait
le monde. Les adeptes de la secte Nichiren , comme le dit Suzuki (Suzuki
a beaucoup travaillé à répandre la connaissance du
Zen dans les pays occidentaux),sont maintenant encore
plus ou moins militaristes et ne se mêlent pas bien avec les autres
bouddhistes.
On peut parler d'une mission - légitime d'ailleurs - de l'Orient
vers l'Occident. Mais l'expansionnisme et le prosélytisme ardent
de la Nichiren Shoshu en font un bouddhisme surprenant qui refuse tout
contact avec les autres formes de bouddhisme. A quoi bon puisqu'elle
incarne le seul et unique " vrai bouddhisme fondamental " puisqu'elle
est la seule et unique vraie voie vers la " troisième civilisation
" ? L'auteur déjà cité, estime, quant à
lui, que ce groupe est à " ranger parmi les rejetons du shintoïsme
nationaliste " plutôt que parmi les bouddhistes. C'est d'ailleurs
plus du nichirénisme que du bouddhisme au sens habituel du terme.
Ces
gens là sont comme des chauves-souris
La détection du charlatan passe depuis longtemps
pour une entreprise délicate : " Ces gens-là sont
comme des chauves-souris : on ne peut pas dire que ce soient des oiseaux
on ne peut pas dire non plus que ce soient des rats " dit Hakuin. (Cité
dans Hermès, n° 3, p. 258)
Comme tout un chacun, le maître possède effectivement plusieurs
facettes, si bien que le disciple risque de sélectionner celles
qui lui plaisent, tout en fermant les yeux sur les autres. Il peut
aussi voir de la lumière là où, selon toute vraisemblance,
il n'y a qu'obscurité. Et il justifiera systématiquement
toutes les attitudes du leader sous prétexte que celui-ci vit à
un niveau supérieur.
Tel fut le cas de Nandan, une adepte de Rajneesh
:
" Lorsqu'un garde lui apprit que Rajneesh avait battu à coups
de poings et de pieds Ma Yoga Vivek, sa gouvernante et amie, Nandan fut
horrifiée.
Des années plus tard, elle se rappela, non sans embarras
qu'elle avait refoulé ce sentiment instinctif de répulsion
à la nouvelle de cette brutalité et, très vite, rationalisé
cet événement comme une technique du maître pour l'instruction
de son disciple. 'De même les lamas tibétains soumettent-ils
parfois leurs élèves les plus chers à d'horribles
épreuves', se dit-elle ". (James Gordon
- Après Bhagwan)
Par ailleurs, comme dans toute secte qui se respecte, l'adepte ne connaît
pas l'ensemble de la vie du maître. C'est ainsi que la même
Nandan estimait que Rajneesh prenait des médicaments
en excès et, en somme, se droguait à l'insu de la majorité
de ses adeptes :
" Elle avait entendu dire qu'il prenait de fortes doses de valium
(pour sa dorsalgie, selon lui) et de trinitrine ; et elle observa, avec
consternation, qu'il avait l'allure d'un drogué quand il passaitdevant ses disciples au volant de sa Rolls Royce. Qu'est-ce qu'un
directeur spirituel qui avait besoin de drogue comme soutien journalier
? "
Il est bien connu que le "petit nouveau" ou l'hôte de passage ignorent
tout de l'essentiel d'une secte. La même situation se vérifie
à propos de la vie du maître. Comment l'apprécier à
sa juste valeur lorsque des éléments-clés d'appréciation
font défaut ? Ces lacunes sont une véritable bénédiction
pour ces rois de l'égarement qui ne souhaitent qu'une chose : fourvoyer
tout le monde. C'est ainsi qu'un adepte de l'Association
Internationale pour la conscience de Krishna (AICK) ignorait totalement
l'existence d'un appartement luxueux, réservé au gourou,
dans le château d'Oublaisse... où il logeait lui-même
en permanence !
Le
vrai gourou est un homme de poids
Qu'en est-il du gourou , du vrai gourou ? Ce mot sanskrit, passé
dans la langue française, signifie tout simplement " lourd ".
Le gourou est donc un homme de poids. Première approche étymologique
un peu vague, certes, mais qui évoque cependant bien une personne
compétente en qui l'on peut placer sa confiance pour un soutien
efficace. Le maître s'adresse à l'intériorité
du disciple ; il s'efforce de l'épanouir dans ses profondeurs jusqu'à
son point de jonction avec le Suprême. Autrement dit, si le gourou
enseigne, il n'est pas professeur; si le gourou soulage, il n'est pas thérapeute
; si le gourou guérit, il n'est pas médecin.
Voici, à titre d'illustration, un fait récent et authentique.
Il s'agit d'une jeune fille indienne atteinte d'eczéma au bras avec
les souffrances... et l'atteinte à son charme que cela supposait.
Difficile donc, dans cette triste situation, de trouver un mari. Elle avait
entendu parler d'une sainte femme des environs qui avait délivré
un lépreux de ses pustules. Elle se présenta donc à
elle puis revint la voir fréquemment tout au long d'une année.
En vain. Le mal persistait. Mais voici qu'un beau jour, au cours d'une
de ses visites habituelles, elle tomba brusquement en larmes dans les bras
de la "mère" en lui déclarant que l'important désormais,
pour elle, n'était plus de guérir mais de vivre la vie que
le Divin voulait pour elle. Le but du véritable "maître" avait
été atteint.
Par ailleurs, le gourou n'est pas seulement un sage religieux ou un
homme de bon conseil. Il ne lui suffit même pas d'être saint
ou mystique. Il lui faut aussi l'aptitude à transmettre - souvent
dans le silence - ce qu'il a lui-même reçu et il doit s'astreindre
à suivre pas à pas l'évolution de chacun de ceux qui
sont venus à lui et qu'il aura accepté de prendre en charge.
On sait combien de gens s'autoproclament maîtres "parfaits" ou "ascendés"
- en n'étant que pédagogues, intellectuels, hypnotiseurs...
ou charlatans ! A cause d'eux, le titre de gourou s'est progressivement
dévalué et l'on n'hésite pas à parler des analystes
financiers américains comme des "gourous de Wall Street" !
Les
trois sortes de gourous
Il existe traditionnellement trois sortes de gourous:
le gourou supérieur. C'est le Divin.
le gourou intérieur. Il habite le coeur de chacun, sa conscience
profonde. Pour certaines écoles il est l'étincelle divine
en l'homme
le gourou extérieur, dont il est ici question ? C'est le moins important
mais, ajoutons immédiatement, qu'il doit être habité
par le gourou intérieur dont il pourra alors susciter l'éveil
chez son disciple.
Et justement, son disciple, lui, aura une tendance quasi irrépressible
à s'attacher au gourou extérieur, à s'accrocher à
des qualités superficielles : intelligence, dons artistiques, beauté
physique, charme de la voix... etc. Situation inévitable, surtout
dans les débuts. Quoi de plus normal qu'une certaine connivence
humaine qui facilite l'adhésion confiante ? Mais cela est à
dépasser. Le taoïsme, en Chine, s'est plu à souligner
combien le sage ne présente souvent qu'une apparence terne et bien
peu avantageuse ; son visage est pareil à la " cendre éteinte
". L'Orient compare l'attachement au gourou extérieur, à
un homme qui confondrait le doigt indiquant la lune à la lune elle-même.
La relation guide-disciple tend vers un coeur à coeur intime,
par delà les idées fluctuantes et les sentiments passagers
- par delà aussi toute imitation servile. Le maître n'est
pas un modèle. Dans la rude tradition Zen, on raconte qu'un maître
avait coutume de lever solennellement le doigt au moment où il communiquait
son enseignement. L'un de ses disciples ayant servilement imité
son geste, il n'hésita pas à lui trancher le doigt... ce
qui mena immédiatement le disciple à l'illumination. Symbole
de dépendance et dépendance elle-même avaient disparu.
Ce n'est pas en se donnant l'apparence supposée de Jésus
ou en se coupant la barbe à la manière de Sri Aurobindo que
l'on est sur la voie de devenir l'un ou l'autre. Le problème consiste-t-il,
d'ailleurs, à devenir l'un ou l'autre ? Le vrai disciple pose sur
son maître un regard de croyant, en essayant de rejoindre en lui
l'Essentiel. Quant au maître, c'est à cette attitude fondamentale
qu'il éduque son disciple.
Danger
de la vénération
Il est malheureusement trop évident que beaucoup se complaisent
dans un tout autre jeu et se trouvent flattés de voir tant d'admirateurs
béatement assemblés autour de leur petite personne.
En Inde la " Voie des Maîtres " (" Sant Mat
" ou " Rhadasoami ". L'origine est Sikh. Kirpal Singh en a été
un représentant célèbre dans le monde entier)
conformément à sa dénomination, accorde une énorme
importance au maître vivant, c'est-à-dire au gourou extérieur
dont il vient d'être question.
Il peut même se retrouver promu au rang de sauveur. A New Delhi,
dans un ashram (lieu de rassemblement stable des disciples
autour d'un maître. Mais un maître ne fonde pas forcément
un ashram) de cette école, on peut voir les disciples méditer
en direction de la cellule du maître ; Guru Maharaj Ji, le fondateur
de l'Élan Vital - ex - Mission de la Lumière
Divine (MLD) - se situe dans ce courant. Sri Chinmoy
a reçu son éducation à l'ashram de Sri Aurobindo
de Pondichéry où l'on vénère les photos du
fondateur et de sa collaboratrice, Mira Alfassa, dite "la Mère".
Il conseille la même attitude mais devant sa propre photographie.
Pas n'importe laquelle cependant : celle qui a été prise
au cours d'un de ses états de contemplation particulièrement
élevé. Mataji, " intégration
de tous les gourous " transmet, elle aussi, son énergie,
sans avoir besoin d'être physiquement présente : " Ma photo,
qui émet, tout comme moi, des vibrations, peut suffire à
une réalisation... on peut guérir de toutes les maladies
grâce à ma photographie " (Interview au
journal suisse "24 heures" le 24 août 1981. La fondatrice d'un nouveau
groupe oriental mal connu prétendrait que la prière devant
sa photographie préserve de toute contamination par le virus
du Sida). Il n'est pas rare, à la Nichiren
Shoshu de voir la photographie de Monsieur Ikeda près du Gohozon
- parchemin consacré devant lequel on pratique. " J'ai demandé
pourquoi il y avait un portrait du président Ikeda à coté
de l'autel, puisqu'il n'y a pas de glorification d'un dieu ou d'une personne
dans le bouddhisme Nichiren "- " C'est parce qu'elle (la propriétaire
des lieux), a le béguin pour lui ". (Santa
Monica News. 17 juin 1988) Autrement dit, pas de vraies réponses
!
Les
chemins du fanatisme
Faut-il préciser qu'une telle mise en valeur du maître vivant,
mal guidée ou savamment manipulée, conduit tout droit au
fanatisme, qu'il soit doux et souriant ou violent et agressif. L'adepte
ne supporte plus, alors, aucune remise en cause de son maître unique
et parfait. Il pourrait même se laisser convaincre que les contestataires
personnifient le mal et doivent être détruits. Il ne craindra
aucun obstacle et sera prêt à donner sa vie. Qu'on se rappelle
le fameux suicide collectif de Jonestown
au Guyana, ou les actes de violence d'Ananda Manga lorsque leur maître
fur emprisonné en Inde. Et des centaines de femmes se sont laissées
convaincre par Rajneesh de se faire stériliser.
Le gourou possède fréquemment, dans la mentalité
de son disciple, un exclusivité si marquée qu'elle relève
du sectarisme. " Mon gourou est une pure merveille. Les autres ne valent
pas grand-chose. Hors mon gourou, point de salut ". Scène vécue
: un français qui se faisait aider par un maître indien avait
eu l'occasion de rencontrer deux adeptes de Guru Maharaj
Ji. Évidemment, ils l'abreuvèrent des qualités
uniques de leur guide et de leur groupe. Mais lorsqu'il essaya de dire
quelque chose de son propre maître, il n'y avait plus d'oreilles
pour l'écouter. Le gourou d'en face n'intéressait pas. Ainsi,
l'adoration inconditionnelle du gourou extérieur mène-t-elle
à l'aveuglement absolu.
Ce fut le cas des adeptes de Rajneesh et
de sa redoutable secrétaire, Sheela. Ils n'avaient rien vu et pourtant
" En septembre 1985, sous l'accusation, portée par Rajneesh
d'avoir soustrait des millions de dollars, Sheela s'enfuit du ranch. (aux
USA) pour l'Europe. Rajneesh, lui-même, fut appréhendé
en essayant de quitter le pays. En quelques semaines des milliers de "
sannyasins " qui avaient abandonné leurs maisons, leurs carrières
et leurs économies désertèrent leur paradis de l'Oregon.
Sheela plaida coupable pour toute une série d'accusations parmi
lesquelles des tentatives de meurtre, des écoutes électroniques
clandestines et l'organisation d'une épidémie d'intoxication
alimentaire. Elle fut condamnée à 69 ans de prison ".
(Après Bhagwan , par J.S Gordon- Washington
post 18.10.1987)
Comment ne pas tomber dans la déception la plus noire, lorsqu'on
réalise jusqu'à quel point on a été berné
.
" Anna Forbes m'avait fait part de la désillusion que lui
avait causé la soif de pouvoir et de richesse de Rajneesh, et du
fait qu'elle avait dû consentir comme des centaines d'autres femmes
à une intervention pour stérilisation.
Elle avait cru que Bhagwan - c'est à dire celui qui a été
béni - était un maître comparable à Jésus
ou à Bouddha et se sentait véritablement trahie.
Mais, a-t-elle poursuivi avec plus de tristesse que de colère,
il lui a manqué la force de Jésus ou d'autres grands inspirés
: il avait soif de pouvoir, et c'est ainsi que de 'Maître' il devint
'Maître escroc' ". (Après Bhagwan , par
J.S Gordon- Washington post 18.10.1987)
La
rage de dominer
L'homme malade d'hégémonie use de plusieurs stratagèmes
pour parvenir à ses fins. La conception traditionnelle du gourou
l'avait déjà sérieusement épaulé. Il
va s'y ajouter quatre sources de puissance : les pouvoirs supranormaux,
l'abondance financière, la dilatation de soi, la domination occulte.
1
- Les pouvoirs supranormaux
Les capacités - ou soi-disant capacités - miraculeuses du
gourou décuplent un ascendant déjà exorbitant. Voici,
par exemple, la liste non exhaustive des hauts faits de Sri
Chinmoy :
il a écrit 843 poèmes en 24 heures le 1er novembre 1975.
il a peint 100.000 tableaux (The soundless Sound - Vol 2, n°
11 - 1er novembre 1975).
il a rédigé 750 livres.
il a écrit 17.000 poèmes.
il a composé 6 000 chansons.
il a peint 16.031 tableaux en 24 heures.
il a soulevé 7.063 livres d'un seul bras (revue "Sources" n°
14, déc-janv 1988).
il affirme avoir fait léviter des éléphants (The
Daily Telegraph - 29 novembre 1988).
Autant de hauts faits qui font dire au Wall Street Journal (13/01/89)
que Sri Chinmoy ambitionne le titre " d'acrobate suprême ".
Malheureusement d'autres exploits soulèvent, si l'on ose dire, moins
d'admiration :
il a organisé une visite au Japon avec une centaine de personnes
se présentant, sans mandat, comme envoyées des Nations Unies.
il a tenté d'abuser de la confiance des parlementaires britanniques
aux Communes, toujours en se prétendant délégué
des nations Unies (Daily Telegraph, 29 nov 88 )...
Sathya Saï Baba, lui, est un maître indien dont l'influence
s'étend actuellement [en 1990] en France. Il posséderait
des dons fabuleux de magicien - à ne pas confondre, s'il vous plaît,
avec les habiletés d'un simple prestidigitateur. La revue " Le
Monde Inconnu" (n° 40 - 1983) a pu parler de cet "Avatar du Nouvel
Âge", controversé dans son pays natal.
" Au tout début de sa mission, des centaines de fidèles
affluèrent à Puttaparthi et Saï Baba tenait à
les nourrir tous ; lorsqu'il n'avait plus rien, il multipliait la nourriture
à l'égal de Jésus. Pour cela il prenait deux noix
de coco (fruit important dans le rituel hindou), il les brisait l'une contre
l'autre et répandait le lait sur le reste de nourriture ; à
son signal, les fidèles venaient manger, et cela jusqu'à
la nuit tombante, et cela sans jamais amoindrir les réserves.
Pendant le grand cycle des miracles, Sai Baba avait l'habitude de
matérialiser des statues. C'est ainsi qu'un jour où il se
promenait avec ses fidèles, il se baissa et gratta le sable jusqu'à
mettre à jour le haut d'une tête ; alors la statue se mit
à sortir du sol, poussée par une invisible force : d'abord
émergea une statue de Shiva, puis une autre de Parvati, enfin un
lingam (schématisation du phallus, vénérée
dans les Temples de Shiva). Lorsqu'elles furent suffisamment sorties, SaÏ
Baba les tira et les jeta sur le sable pour qu'elles refroidissent car
ces objets étaient brûlants. "
Impressionnant, c'est sûr ! Mais les dons
extraordinaires garantissent-ils une spiritualité extraordinaire
? Et quand on culbute dans l'extravagance... Pourtant, lorsqu'on est délivré
d'une maladie, comment ne pas vouer une confiance aveugle à son
thaumaturge ? Mieux encore : si l'on fait - ou croit faire - soi-même
des miracles, comment ne pas se donner intégralement à ceux
qui nous ont rendu aptes à de telles prouesses ?
" L'Art de purification, explique un tract de la secte Mahikari,
est le don le plus merveilleux que Dieu ait jamais fait aux hommes dans
son immense amour pour eux. Cet art leur permet d'établir un contact
avec Dieu Créateur, ainsi qu'avec le monde divin. Kotama Okaya -
et actuellement Kaiju Okada - constituent un intermédiaire spirituel
entre Dieu et les hommes, qui peuvent ainsi recevoir la lumière
divine, malgré leur impureté spirituelle.
Dieu Créateur qui est lumière, descend jusqu'aux
hommes et s'offre à eux avec un don total de Lui-même, ce
qui leur permet de recevoir Sa lumière - ou énergie purificatrice
- et de la transmettre autour d'eux.
Les initiés, reliés à Dieu par l'intermédiaire
de Kotama Okada, vont pouvoir transmettre la Lumière purificatrice
en levant simplement la main. Ils deviennent alors des canaux d'énergie
spirituelle, des instruments de Dieu utilisés pour la purification
spirituelle des êtres ".
Quelle magnifique promotion !
Même capable des plus pures merveilles, le maître
véridique demeure discret et situe ses interventions d'exception
dans un ensemble. Il utilise ses pouvoirs pour améliorer les bénéficiaires
au niveau spirituel et non pour les distraire de leur véritable
profondeur. Un autre Saï Baba, (connu sous l'appellation de Saï
Baba de Shirdi, le lieu où il habitait et que visitent encore des
foules d'indiens)décédé il y a 70 ans, fut
un guide généreux en miracles en même temps que digne
de foi. Mais il précisait : " Je donne aux gens ce qu'ils désirent
pour qu'ils désirent un jour ce que je veux leur donner ". C'est
qu'un bénéfice immédiat et spectaculaire produit un
choc à la suite de quoi le coeur peut s'ouvrir et entrer dans un
processus de transformation. A la suite de quoi, aussi, le généreux
guérisseur peut élargir son admiration de lui-même
et choir dans le style bateleur de foire.
S'il s'agit d'un groupe, il dévie de ses opinions proprement
religieuses.
" Le principe du bouddhisme, remarque le docteur Shohun Kubota, vice-président
de l'université Rosho à Tokyo, est de restreindre les désirs
de l'homme, tels le sexe, la faim, la richesse, la gloire ; mais la Soka
Gakkai promet la satisfaction de tous ces désirs " (
Woodrow - le monde - 7 octobre 1984)
Et Akasa Levy, porte parole de l'association bouddhiste américaine
- ordinary Dharma - de renchérir :
" La Nichiren Shoshu n'est pas le bouddhisme. La Nichiren Shoshu
est complètement à l'opposé de ce que le Bouddha a
indiqué comme un chemin. Ils dressent les gens à recruter
pour une organisation qui enseigne la dépendance au lieu de l'autonomie
personnelle. Le Bouddha a absolument interdit de convertir les gens. Le
bouddhisme de Nichiren enseigne qu'il faut d'abord avoir le confort matériel.
Le Bouddha croyait qu'il fallait avoir de la nourriture dans le ventre
et être libéré d'un certain degré de crainte,
mais c'est tout. Nous psalmodions pour nous rappeler les enseignements
du Dharma, non pour nous enrichir ". (in Santa Monica News)
Toujours dans le domaine du merveilleux, le gourou, même sérieux,
peut susciter chez quelqu'un des sensations sans pareilles. Ainsi ce qu'a
écrit Swami Muktananda, fondateur du Siddha Yoga, à propos
de son maître :
" En me plongeant plus profondément en méditation
sur le gourou Nityananda, des doigts de pieds jusqu'à la racine
des cheveux, le prana (la force de la vie) devint dans mon coeur
très calme et régulier. Puis je sentis une douleur aiguë
dans le muladhan(centre de consciencesitué en-dessous
du sacrum, dans le corps subtil) comme si j'avais été
touché par un éclair divin. Alors le prana s'écoula
avec force dans mon corps et tous mes nerfs vibrèrent. Je sombrai
totalement dans une méditation profonde. (Cité par Hunmmel
- Les gourous - p. 53 - Cerf)
Actuellement, Swami Niranjan, à Bombay, anime les liturgies où
les gens accourent pour recevoir des conseils. C'est que, pendant ces célébrations,
une déesse parlerait par sa bouche à partir de la perception
intuitive de la destinée de chacun.
Il est courant de voir des gens en transe autour de Sri Shiva Bala Yogi
à Bangalore. Par contre, il ne se passe rien d'extraordinaire autour
de l'ancien Chankaracharya de Kanchipuram. Sa renommée de sainteté
est pourtant telle qu'on vend ses photos et ses statues depuis plusieurs
années.
Certes, chacun possède légitimement sa propre façon
de faire. Cependant, les remarques à propos des miracles demeurent
ici valables. Où tout cela mène-t-il ? Encouragement ? Attestation
d'une réelle progression ? Passage à un niveau supérieur
de conscience ? Hallucination ? Chute dans des paradis contestables ? Selon
un vieux maître du pays tamoul, tout cela peut n'être "
qu'envoûtement ", stratagème séduisant en vue d'une
soumission librement consentie (La Recherche - n° 202 - Sept.1988).Le guide n'est alors qu'un astucieux manipulateur d'énergies
occultes.
Certains disciples vont même jusqu'à attribuer l'omniscience
à leur gourou. Avec un indien élevé dans une école
d'ashram, concédons que ces gens-là peuvent savoir beaucoup
de choses... en ajoutant tout de suite qu'ils ne savent pas tout ! Comme
chacun, ils demeurent conditionnés par leur environnement, leur
culture d'origine et leur éducation. Ils peuvent alors déclarer
qu' " avions et bébés éprouvettes existent dans
les Écritures indiennes ", que " le christianisme est un
dérivé de l'hindouisme " (réflexions entendues
de la bouche de deux maîtres de l'Inde). Habituellement le disciple
n'ose pas porter une critique contre son maître, même sur des
sujets secondaires qui ne lui ôteraient pas sa vraie valeur d'éducateur
spirituel. On frôle ici l'idolâtrie. Des êtres fragiles
peuvent abandonner leur identité au profit de celle de leur leader.
Toucher à celui-ci c'est toucher à eux-mêmes. Il est
devenu leur idole.
2 - L'abondance financière
ou l'argent à gogo
Le bon maître vit simplement mais il ne vit pas de l'air du temps
! S'il n'a guère de ressources, ses disciples contribuent à
juste titre à sa subsistance. Il est, par contre, tout à
fait scandaleux que des leaders avides pompent allègrement les finances
de leurs adorateurs. Du véritable vampirisme.
" C'est inutile de rester ici sans argent, assurait à Virginia,
une secrétaire de Rajneesh. Alors gagnes-en, légalement ou
non, c'est ton affaire. Et reviens ".
Génial Rajneesh, il avait convaincu les
autres de payer pour être exploités !
" J'ai l'impression disait la mère d'un adepte de l'AICK,
quand je vois mon fils, que ce n'est plus lui qui parle... Un détail,
lui qui attachait beaucoup d'importance à son crâne rasé,
il a accepté sans sourciller le retour à la chevelure normale
et au costume de ville. Explication : ' il faut ressembler à tout
le monde pour gagner de l'argent '. Il est vrai qu'avant, déjà,
il avait une perruque dans sa valise pour aller mendier " (Le
Midi Libre - 26.4.82 - "les Zombies de Krishna").
Et on ne mendie pas pour les pays pauvres mais pour la toute puissance
du mouvement ! On connaît les 91 Rolls Royces de Rajneesh
et la mégalomanie qui l'a poussé à construire une
cité à sa propre gloire, Rajneeshpuram, la " ville de
Rajneesh ". Envoyé à Paris en mars 1984 par " le dieu
vivant autoproclamé ", Sheela a parlé aux disciples des
résultats obtenus à l'époque sur les 6.300 hectares
achetés à Antelope, en Orégon, 250 maisons d'habitations,
48 ateliers, une ferme avec de nombreuses vaches, un aéroport avec
plusieurs avions biplaces et un avion de 30 places, des lacs artificiels...
Tout cela n'étant que le début d'un empire puisqu'elle apportait
le message suivant de Rajneesh : il faut construire dans le monde de plus
en plus de communes semblables, ainsi se bâtira une société
alternative.
Eh oui ! le gourou n'est-il pas un roi ? Un messie des temps nouveaux
? Pourquoi donc ne dépenserait-il pas sans compter ? " Quoi de
plus normal que Guru Maharaj Ji roule dans la plus bellevoiture
du monde, proclamait hardiment un de ses disciples, puisqu'il est
le roi du monde ? ".
L'argent rentre grâce à des quêtes pour Krishna
(AICK) à des dons " spontanés " à l'occasion
de cérémonie religieuses (Guru Maharaj
Ji Mataji) à des tarifications de la formation et même
de l'initiation (Méditation transcendantale).
Or le gourou digne de ce nom n'est pas un rapace insatiable. Il ne se nourrit
pas de profit mais de service.
3 - La dilatation
de soi
Il existe toujours des grenouilles qui veulent se faire aussi grosses que
le boeuf. Rajneeshpuram a été l'éclatement de Rajneesh.
Et que ne disait-on pas de Guru Maharaj Ji lors
de ses débuts en Europe :
" L'événement le plus important dans l'histoire de
l'humanité (sic) aura lieu les 8, 9 et 10 novembre 1973 à
l'Astrodrome de Houston, aux États-Unis. Le monde entier apprendra
que comme bouddha, Krishna, Mahomet, Moïse et le christ l'étaient
en leur temps, Guru maharaj Ji est le maître parfait de notre
époque et qu'il est venu établir le millenium, les Mille
ans de Paix sur terre, prophétisés par toutes les Écritures.
C'est maintenant l'Aube de l'Âge d'Or..." (Tract
" Millenium 73 " - Comme on le sait bien d'autres l'ont dit : Moon,
Hubbard...)
Plusieurs leaders envisagent de se distendre à l'échelle
de la planète en se prolongeant par des disciples portant le même
vêtement - couleur du soleil levant chez Rajneesh
- la même effigie - une photo du maître dans un médaillons
- parlant sans cesse de lui et besognant sans relâche pour lui. Il
leur faut donc recruter un maximum de mercenaires. Or le maître digne
de ce nom ne " racole " pas. Peut-être même aurait-il
une tendance déplaisante à mettre à l'épreuve
qui se présente à lui. Ainsi n'est-ce qu'au bout de trois
voyages enInde qu'un gourou accepta clairement de prendre en charge
un jeune Français. Le poète mystique Milarepa eut à
subir les pires tribulations avant d'être accepté par son
Lama.
Sri Aurobindo, le sage de Pondichéry, déclara à
Philippe Barbier Saint-Hilaire qui sollicitait son appui :
" Une nouvelle conscience cherche à s'exprimer en vous.
Il y a dans l'Inde des personnes, des yogis, qui peuvent vous aider en
cela et vous donner la nouvelle naissance. Il y a quelques difficultés
dans leur recherche car vous ne parlez pas leur langue et ils sont souvent
d'un abord rébarbatif. C'est cependant une des solutions devant
vous. " (Conversation avec Pavitra - Sri Aurobindo Ashram
Pondichery : 1972 - p 21)"Je ne suis pas votre gourou, disent même certains. Adressez-vous,
donc plutôt à untel ".On sait, par contre, à
quel point la secte affectionne le recrutement-éclair. Moins
longtemps le pigeon piétine à l'entrée de la cage,
mieux ça vaut !
" Après la réunion (à la Nichiren
Shoshu) on m'a pressé d'adhérer immédiatement
et d'aller le lendemain soir au temple pour recevoir le Gobonzon lors d'une
cérémonie. Le Gobonzon est gratuit ; toutefois il faut payer
un " droit de transport " de 12 dollars parce qu'il faut l'apporter du
Japon. Des membres de la Nichiren Shoshu m'accompagneraient ensuite chez
moi pour m'aider à l'accrocher. J'ai résisté et deux
ou trois membres se sont mis après moi avec les techniques des vendeurs
de voitures d'occasion, style : ' il faut que vous emmeniez la voiture
ce soir '. J'ai promis de contacter le leader de second rang qui m'était
assigné et je suis parti en vitesse " (Santa Monica
News 17/7/88)
4 - La domination
occulte
Il existe un va et vient secret entre maître et disciple via un cordon
invisible dit " énergétique" ou " vibratoire ".
Ainsi se maintient un contact intime qui ignore la distance. Le gourou
peut donc influencer le disciple dans le silence (ce que
faisait Mme Guyon, par exemple, en France, au XVIIème siècle)
et lui communiquer intuitivement quelque chose de lui-même : paix,
amour, connaissance... etc.
" Je veux vous faire partager cet amour infini que Dieu a mis en
moi, dit Bhagwan. Laissez-le s'écouler en vous, acceptez mon cadeau
".(Rajneesh n°
10 - p. 2)
" Quand un disciple, avec une foi totale, s'incline au pied de son
maître, quelque chose se passe au niveau du transfert d'énergie,
qui est invisible aux yeux du profane. Une énergie fantastique tombe
du maître et fond sur le disciple ". (Rajneesh
1979 - Le rôle des thérapies de groupe dans l'Ashram).
Une ancienne adepte de Guru Maharaj Ji parlait de
" Séduction à l'état pur, sans arguments ".
Les disciples de Sai Baba disent recevoir de lui des messages. Problème
pour certains : s'agit-il vraiment de messages envoyés par Sai Baba
ou de tout autre chose ?
Cet impact inhabituel déroute les Occidentaux (Dont
pourtant certains estiment bénéfique de prier devant une
hostie consacrée) et il est bon de s'en méfier dans
la mesure où il peut devenir manipulable. Le lien lie au lieu de
relier; il attache au lieu de délivrer. Ce peut être un cordon
ombilical qui maintient dans l'infantilisme.
" Aucun être humain, dit Mataji, ne peut me dissimuler quoi
que ce soit - je vous connais de part en part " (Lotus
Heart. L'avènement - p. 313)
On comprend que de tels hommes fascinent d'autres hommes et puissent avoir
la haute main sur des gens sincères, mais insatisfaits, qu'ils endoctrinent,
dirigent et persuadent à leur guise
" Nandan dit qu'elle ressentit pour Rajneesh
un amour plus riche et plus varié que tout ce quelle aurait pu éprouver
auparavant.
La présence de Rajneesh, tantôt hypnotisante, tantôt
provocante, lui paraissait un catalyseur pour le développement de
sa personnalité, un aiguillon pour sa vigilance et une source de
force et de confiance ". (Après Bhagwan par James
Gordon - Washington post - 18.10.87)
On peut dire sans exagération que de tels séducteurs sont
véritablement maléfiques. Ils n'éblouissent que pour
mieux aveugler. L'Inde ne mâche pas ses mots et les appelle sans
ambages des asurasc'est-à-dire des démons.
Ils savent se déguiseren anges de lumière, en
ascètes, en spécialistes des Écritures. Ils peuvent
être géniaux. Mais ce sont des loups rapaces. On estime, en
Orient, qu'ils subissent l'influence de forces négatives qui les
dépassent. Ils seraient capables de mener autrui à la folie
ou au suicide.
Les
séductions du syncrétisme
En se faisant gourou, l'homme épouse une position idéale
d'exploiteur. Il choisit une fonction traditionnelle qui lui attribue un
poids considérable, comme le prouve ce texte classique d'initiation
du brahmane :
" Que ton coeur batte dans le mien : que mon esprit se substitue
au tien ; puisses-tu trouver en moi les pensées, tu me dois vénération,
quand je parle, garde le silence ".
Matériellement parlant aussi, la place est bonne puisqu' il s'agit
de vendre un "produit" qui n'a rien coûté : le Divin.
Aucun souci pour l'achat de la matière première ! Tout est
bénéfice ! L'imposteur religieux trouve aussi son profit
dans un besoin infantile de sécurité soigneusement entretenu
chez les disciples qui doivent refuserde s'assumer et rechercher
sa protection perpétuelle. Il ne pousse pasles autres à
s'engager dans une vie adulte ; il se nourrit de la régression de
gens qui hélas ne demandent peut-être que cela. Sous prétexte
de libération - la fameuse " mukti " sanskrite - il assujettit
et il asservit.
" Françoise, mariée (avec un membre de l'AICK,
comme elle) est une femme soumise. Quand son mari parle, elle ne dit pas
un mot et, sous des apparences aimables, nous nous sommes trouvés
en présence de fanatiques.
Nous avons découvert que, le premier soir, Françoise
avait dormi sur la descente de lit, à côté du lit de
son mari. Ils ne nous avaient pas dit qu'ils ne couchaient pas ensemble.
La deuxième nuit, elle a dormi, avec plaisir, sur le canapé
du salon. (Vie de couple ou
enfer quotidien. Témoignage d'une mère)
Certains gourous, pour se donner de l'importance, se
prétendent détenteurs de méthodes de méditation
ultra-secrètes, éventuellement créées par eux-mêmes.
La plupart du temps, elles sont bien connues dans leur milieu d'origine.
Elles donnent, bien sûr, des résultats fabuleux ! Autre excellent
moyen de s'imposer aux autres : on prétend n'enseigner qu'une technique
sans du tout exiger l'abandon de la religion personnelle.
" Vous êtes juif, disait une charmante instructrice indienne
du Guru Maharaj Ji, restez juif. Vous êtes
chrétien, restez chrétien. Vous êtes musulman, restez
musulman. "
" Au cours de cette initiation nous 'révèle' un tract
de Mahikari, vous allez recevoir des enseignements
sur les principes de l'univers qui sont complètement différents
de ce que vous avez appris jusqu'alors. Vous vous sentirez éveillé
à la spiritualité. N'importe qui, homme ou femme, quels que
soient, sa religion, son âge, peut se faire initier ".
Conclusion: on passe d'une religion à une autre, puisqu'il est clairement
déclaré qu'il s'agit de "recevoir des enseignements... complètement
différents de ce qu'on vous avait appris jusqu'alors " !
Effectivement, Mahikari demande de croire au dieu SU, à ses deux
assesseurs, à 48 divinités inférieures et à
des millions d'esprits qui peuvent devenir " possesseurs ".
La question posée ici n'est pas celle d'un changement de croyance
: cela relève de la conscience de chacun.La question est
le manque de données pour un choix libre ; onest passé
du Christianisme au " Mahikarisme ",par exemple, sans s'en
rendre compte. On se croit même encore bon chrétien, parfois
! Même chose à la Méditation Transcendantale.
De disciple de Jésus, on devient disciple de Maharishi. Et toujours
sans s'en rendre compte.
Là se cache l'escroquerie. Il existe actuellement un syncrétisme
discutable qui " fait bien " en contentant tout le monde... et en
ratissant vaste ! Chez Mataji vous retrouverez les divinités indiennes,
Mahomet et Jésus (dans le troisième oeil, entre les sourcils).
Rajneesh présente une synthèse
de l'occident et de l'orient extrêmement séduisante. Elle
se résume dans son expression : Zorba le Bouddha. Les Chevaliers
du Lotus d'Or comme leur nom l'indique ont le même objectif et
l'on trouve chez eux statues et rites de multiples courants religieux.
Mahikari, lui, se situe au-delà de toutes
les religions. Reprenant l'ancien et le nouveau, on appelle Saï Baba,
" l'Avatar du Nouvel Âge".
Au fond, pensent beaucoup, " tout estpareil " : Jésus,
Bouddha, Krishna, Mahomet, quelle différence ? Seuls des attardés
s'accrochent à des barrières dépassées. Ici
encore, tout choix est aboli, puisqu'en étant juif, on est hindou
! A la question : " Autour de qui votre vie est-elle axée : Jésus
ou Maharishi ? ",deux membres de la Méditation
Transcendantale répondaient naïvement : " C' est la
même chose ! ". Déconcertant ! Où situer ici un
dialogue ? L'autre a disparu.
Deux éléments pourraient contrebalancer une mainmise aussi
écrasante : le droit et les textes " canoniques ". Dans trop
de communautés orientales, hélas, le droit brille par son
absence - le droit, c'est-à-dire la défense du faible et
le contrôledu fort. Le responsable lui-même n'est pas
au-dessus du droit. Même dans le cas d'un gourou authentique, sa
mort risque de livrer pieds et poings liés les membres de son ashram
à des successeurs véreux. Il manque ici ce que les congrégations
occidentales connaissent sous le nom de " Règle " ou de
" Constitutions ".
Quant aux textes de référence, sans compter qu'il est
parfois difficile d'en avoir connaissance et a fortiori de se les procurer
dans les groupes sectaires, ils sontla plupart du temps ceux que
le maître contestable a lui-même écrit ou les commentaires
des textes sacrés qu'il a lui-même rédigés.
(Ainsi du livre de Sri Chinmoy
: " Male disciples, female disciples, Take care, be careful " , " Disciples
masculins, disciples féminins, attention, faites bien attention
")
Une remarquable exception cependant : l'AICK
qui se base sur la " Bhagavad Gita ", livre extrêmement vénéré
et médité en Inde même. On l'a appelée l'évangile
de l'Inde. Peut-être est-ce en partie grâce a la valeur des
textes traditionnels commentés par Prabhupada que plusieurs de ses
disciples ne se sont pas laissésprendre à l'organisation
qui lui a succédé. La valeur de ses écritures estun espoir pour une meilleure évolution de ce groupe. Ceux qui
en sortent doivent aussi se sentir moins démunis que des transfuges
d'autres mouvements puisqu'il leur reste des éléments de
référence.
Conformistes
et rebelles
Aux extrêmes de la palette des gourous, on trouve le conformiste
et le rebelle. Prabhupada, le fondateur de la Conscience
de Krishna, relève du premier type. Il s'insère clans
une tradition séculaire. Il a reçu des textes, il les transmet
etil les commente dans le sens de l'école à laquelle
il appartient. Il propose des pratiques éprouvées de longue
date. Il apporte même avec lui - comme les anciens missionnaires
chrétiens - les coutumes de son pays d'origine : castes, nourriture,
vêtements, coiffures, etc. Il n'innove guère. Il répète.
Le rebelle, lui, va jusqu'à contester les Écritures sacrées
au nom d'un monde qui a changé et en vertu de sa (soi-disant) mission
personnelle. Il peut se référer au passé mais en n'y
puisant que ce qui le justifie. De toute manière, il se sent très
libre dans son interprétation des Écritures. Il intègre
dans ses méthodes de formation des techniques nouvelles et il s'essaye
à une synthèse de l'Orient et de l'Occident. Ainsi Rajneesh
:
" Sa conception de l'homme nouveau, aussi méditatif que
Bouddha et aussi joyeux que Zorba le Grec - Zorba le Bouddha- comme I'
appelait Rajneesh - leur apparaissait idéale. Son ashram de Poona
avec son mélange de psychothérapie et de méditation,
d'autorité mystique, alliant amour libre anarchique et durs travaux,
leur semblait l'ultime étape, et au delà du communisme des
années 60, la nouvelle Utopie ".
De l'un à l'autre type se déploie, bien sûr, un éventail
de tendances diverses. Certains se targuent de leur insertion traditionnelle.
Plus nombreux sont ceux qui insistent sur leur nouveauté allant
jusqu'à se présenter comme les seuls et uniques messies d'aujourd'hui.
Ainsi le Sahaja Yoga est-il " la plénitude
de toutes les religions orientales et occidentales, un art de vivre et
une nouvelle culture ".
Le gourou conformiste est plus rassurant, le rebelle plus séduisant
parce que plus en phase avec son temps. On peut penser que l'escroquerie
reste plus difficile dans le premier cas que dans le second. Cependant,
la succession du maître défunt y crée des perturbations,
comme ailleurs :
" Quand Pradhupada mourut, en 77, il
laissa un groupe de jeunes dirigeants se disputant l'autorité. Il
avait omis de désigner un successeur mais avait, par contre nommé
11 maîtres spirituels provisoires, tous des américains de
moins de 40 ans, et un conseil gouvernant de 24 membres. La dissension
s'accentua, tout comme les bavures ". (The Philadelphia
Inquirer - 7 septembre 1983)Mahikari, lui, de tendance nouvelle tout en
demeurant très animiste, a connu les mêmes difficultés.
Pourtant, avant sa mort, le fondateur - Okada - avait nommément
désigné son successeur. Cette passation de pouvoir déplut
à sa fille qui s'est prétendue successeur légal de
son père. Il y eut procès et la justice japonaise ratifia,
bien sûr, le choix du fondateur. Sa fille n'en continua cependant
pas moins son activité si bien que Mahikari se divise actuellement
en deux branches - les pays de langue française relevant de la branche
illégitime.
Certains maîtres enfin surgissent d'on ne sait où et nul
ne saurait dire quelle formation ils ont bien pu recevoir. Il en est qui
se forment " en solitaires ", se contentant, par exemple, des récits
populaires du prédicateur de passage.
Pour
conclure : qu'est-ce qu'un vrai gourou ?
" Le vrai gourou est plus rare que l'or " , dit un adage. On le
comprend sans difficultés au terme de ces lignes. La relation au
guide inclut un apprentissage, donc une certaine dépendance et une
obéissance confiante - à ne pas confondre avec la soumission
aveugle ; se mettre à l'école de quelqu'un n'est pas en devenir
l'esclave. Mais où se trouve l'exacte frontière entre la
docilité et l'assujettissement ? Bien malin celui qui pourrait le
dire. Voici cependant quelques repères possibles:
Le maître vit simplement (cadre de vie, argent...).
Il s'occupe de ses disciples avec une affection égale pour tous,
même si la formation donnée s'adapte à chacun.
Il se réfère à une tradition où il a été
formé ou dont il connaît les textes, même s'il la renouvelle.
Il ne demande pas d'argent, même s'il en accepte; l'initiation n'est
pas tarifée.
Il ne recrute pas de façon accélérée.
Il ne présente pas une voie facile et rapide.
La renommée peut aussi être éclairante. Il est d'ailleurs
toujours possible de prendre conseil auprès de gens sérieux
même si ce ne sont pas des mystiques de haut vol !
Le bon gourou ne " fabrique " pas les autres artificiellement,
il les aide à porter du fruit. Comme un bon jardinier, il prend
soin de tous et s'adapte à chacun. Il n'étouffe pas la réalité
profonde des uns et des autres. A chacun son propre fruit !