Scott a compris, a-t-il déclaré, que la Scientologie
s'était servie de lui pour détruire CAN. Les deux parties
cherchent une transaction à l'amiable permettant à CAN de
garder ses dossiers et de reprendre son activité. Seul le nom, le
logo et la ligne téléphonique ont déjà été
achetés par la scientologie (International Herald Tribune,
24-25 décembre 1996). (Bulles, 1er trimestre 1997).
Le 29 septembre 1995, un tribunal de Seattle (Washington) a condamné CAN à verser à Jason Scott 1.087.500 $ (plus de 5 millions de francs). Le plaignant et son avocat prétendaient encaisser aussitôt la somme. CAN a déposé son bilan et demandé un sursis à exécution en attendant un jugement en appel. Ceci lui a été refusé sur l'insistance de l'avocat, et CAN est donc déclaré en faillite et fermé depuis la mi-juin 1996. Tous les actifs de l'association peuvent être saisis ainsi que toute la documentation, y compris les correspondances personnelles des adhérents et des personnes ayant demandé conseil et informations, ou en ayant apporté. C'est du moins ce qu'a réclamé l'avocat; il a déclaré avoir déjà des acheteurs pour ces dossiers...
On voit ici clairement la tactique utilisée par la Scientologie : n'ayant pu gagner aucun des nombreux procès intentés à CAN depuis des années, pour des motifs futiles, et manifestement destinés non à être gagnés, mais à intimider, puis à ruiner sa bête noire, elle s'est emparée d'une affaire qui ne la concernait nullement, et s'est introduite dans le procès en la personne d'un de ses membres éminents, l'avocat Moxon. La plaidoirie de celui-ci n'a été qu'un violent réquisitoire contre CAN. Théoriquement, sa qualité de scientologue n'était pas un élément à prendre en considération par le tribunal.
On comprend que les patrons de la Scientologie se soient pourléchés à l'idée de pouvoir acquérir, lors d'une vente aux enchères, la documentation de CAN et surtout les noms et adresses des personnes ayant eu rapport avec cette association, et sans même avoir à les voler. C'est ce qu'ils avaient fait lorsque, de 1974 à 1976, plusieurs scientologues, sur les ordres de leurs supérieurs, s'introduisirent dans plusieurs ministères américains - Finances, Justice... - pour s'emparer de documents pouvant incriminer l'organisation et son chef Ron Hubbard, et les photocopier avant de les remettre en place. Pris en flagrant délit, 11 furent condamnés en 1979, y compris la propre femme de Hubbard. Lui-même, n'ayant pas participé en personne aux cambriolages, et n'ayant pas donné d'ordres écrits, ne fut pas inquiété, qualifié de "co-conspirateur non inculpé" (!), de même d'ailleurs que Hendrick Moxon, alors jeune stagiaire qui partageait le bureau des coupables. Il ne savait rien, bien sûr.
Pour le moment, CAN a obtenu une décision de justice excluant
tous ses documents confidentiels (en fait sans valeur marchande, autre
que pour le chantage) des actifs pouvant être vendus. Le procès
n'est d'ailleurs toujours pas jugé en appel.
Alerte Ainsi tout ce qui pourrait parvenir depuis le 23 octobre sous
ce titre ou ce logo ne vient plus de nos collègues américains.
|
La conférence annuelle de CAN (Cult Awareness Network)
qui réunissait du 5 au 8 novembre à Los Angeles deux cent
participants venus de tous les Etats-Unis a été particulièrement
intéressante. D'abord par la qualité des conférences
qui ont été prononcées par des spécialistes
- psychologues, psychiatres, juristes, et aussi par des événements
plus insolites... Plusieurs semaines auparavant, les membres de CAN avaient
reçu une lettre leur disant que CAN était une association
criminelle, donnant pour preuve un récit hautement fantaisiste du
meurtre de Jean Miguères, prophète des OVNI (en France, à
Lyon, en juillet 1992). Selon l'auteur de la lettre, la vraie et seule
coupable était... l'ADFI ! Comme l'ADFI est en relation avec CAN
(et avec les autres associations dans le monde ayant les mêmes buts),
il en résulte que CAN est également un groupe d'incitation
à la discrimination, à la haine, au meurtre... La lettre
demandait aux destinataires de faire pression sur l'hôtel où
devait se tenir la conférence pour qu'il annule celle-ci et, bien
sûr, de boycotter la réunion. De son côté, la
Scientologie avait exercé directement des pressions sur l'hôtel
et organisé des manifestations, avec des pancartes telles que :
"Stoppez les groupes de haine", "CAN = Ku Klux Klan", etc. En vain.
L'hôtel posta ensuite deux gardes solides à l'entrée. De nombreux scientologues continuèrent à défiler devant l'hôtel avec leurs pancartes, à patrouiller dans le hall, abordant les gens, distribuant leurs tracts habituels, des contrefaçons du bulletin de CAN et tentant de dissuader les participants d'entrer.
Avant son intervention intitulée "les guerres de la Scientologie", le docteur Louis Jolyon West, professeur à l'université de Californie à Los Angeles, fut pris à partie devant la réception par plusieurs scientologues devenus menaçants. Le professeur parvint à les tenir à distance puis on appela la police qui emmena tout le monde au post. "Jolly" West n'y resta pas longtemps et revint à temps pour sa conférence.
Les discussions en petits groupes (professionnels, familles, ex-adeptes) regroupés dans l'association "FOCUS" ont été d'un haut niveau. Lors d'un "atelier" avec les avocats de CAN, ceux-ci ont écrit les tactiques des sectes qui essayent de détourner le processus judiciaire pour détruire ceux qu'elles perçoivent comme des "ennemis". Une conclusion à méditer: "Ne vous laissez pas intimider. Ceux qui détruiront ces organisations, ce sont leurs dirigeants eux-mêmes". Le tout est de tenir le coup financièrement, car les procès, même gagnés en fin de compte, commencent par coûter cher. Des organisations multinationales visent la puissance, et pour cela l'argent, détournent de leur but les institutions judiciaires qui doivent garantir la liberté des citoyens. Les juges ne peuvent pas s'en rendre compte.
Ce n'est pas tout à fait fini. Des scientologues paraissent s'être procuré (sans doute auprès de l'hôtel) les noms et adresses des participants. En effet, depuis lors, ils reçoivent des lettres leur détaillant les divers "crimes" de CAN. C'est signé: NN "membre réformiste de CAN" ! (source : Bulles n° 37, 1er trimestre 1993).
Heber Jentzsch, Président de l'Église de Scientologie
Internationale, a déclaré que la Scientologie informe depuis
longtemps sur les "abus de pouvoir de l'Administration des Finances" ;
celle-ci a voulu se venger en s'attaquant à l'Eglise de Scientologie.
(Notons qu'un groupe créé par la Scientologie a, par voie de tracts et de publicité, demandé aux personnes ayant à se plaindre de fonctionnaires du fisc de dénoncer ces derniers. Dans le passé, la Scientologie a recouru à des méthodes encore moins glorieuses en cambriolant plusieurs Administrations pour s'emparer de tous les documents pouvant l'incriminer, ainsi que de toutes les pièces concernant les poursuites engagées contre elle. Cette affaire avait abouti à l'inculpation et la condamnation de plusieurs dirigeants, dont la femme de Ron Hubbard, Mary Sue. Mais la secte fait aussi grand usage de la "Loi sur la liberté de l'information" qui permet à tout citoyen américain d'exiger de l'Administration toute sorte de documents le concernant).
L'un des fonctionnaires attaqués dans ce nouveau procès est William Connett, ancien directeur des Impôts à Los Angeles, actuellement représentant de l'IRS (Internal Revenue Service) à Paris.
La Scientologie, elle aussi, se présente comme le champion de la liberté de toutes les Églises, menacées, selon elle, par les "intolérables intrusions" du gouvernement américain dans leurs affaires religieuses.
Nos lecteurs se seront certainement rendu compte que la stratégie des organisations sectaires ("cults", disent les Américains) est toujours la même : quand elles sont poursuivies pour diverses infractions - et il s'agit souvent d'escroquerie et de profits illicites - elles se posent en victimes, puis en martyrs, et portent plainte, avec les vastes moyens financiers dont elles disposent, contre leurs accusateurs, qu'il s'agisse de leurs victimes ou des représentants de la Loi. Bien des procès, ont constaté les juges eux-mêmes, visaient moins à gagner qu'à intimider, lasser, dégoûter, ruiner. Plus encore : concurrentes sur le terrain, les "sectes" se retrouvent dans une "Sainte Alliance" pour défendre leurs intérêts communs, et ne sont pas regardantes sur le choix des moyens : insinuations, diffamation, espionnage, menaces, même contre des juges, des avocats, des jurés - et bien sûr leurs anciens adeptes désillusionnés.
D'après BULLES, 1er trimestre 1994 :
Bien que les termes exacts de l'accord ne soient pas connus, il semble que les deux parties aient décidé d'arrêter les frais et d'effacer le contentieux. La Scientologie abandonne ses plaintes, et l'administration accepte de considérer comme "charitables et religieux" plus de 150 groupes affiliés à la Scientologie, au vu des déclarations fournies par eux sur leurs buts, leur fonctionnement, leurs structures, leur financement.
On sait tout de même que les documents fournis par la Scientologie indiquent que celle-ci possède des actifs se montant à 400 millions de $, et encaisse près de 300 millions de $ par an en paiements pour ses "conseils", la vente de livres, en revenus d'investissements, et autres. On y apprend aussi qu'elle dépense de grosses sommes en frais judiciaires, en publicité et en commission de 10% pour certains collecteurs de fonds ("fundraisers"), dénommés "membres du personnel de terrain" (field staff members) ou "disséminateurs" plutôt qu'"employés de l'Eglise".
L'un de ces collecteurs, Ken Pirack, a gagné 407.052 $ en 1991, selon les documents, et un autre, Grant, travaillant dans la région Clearwater (Floride) où la Scientologie a un centre important, 339.978 $.
Certaines dépenses apparaissent quelque peu inhabituelles pour une église: par exemple 7 millions de $ pour des portes blindées à l'épreuve des bombes pour l'un des trois caveaux dans lesquels doivent être conservés les écrits du fondateur Lafayette Ron Hubbard, ou encore 114 millions de $ pour présenter les écrits et les enregistrements de Hubbard, 6 autres millions de $ ont été dépensés pour une campagne de publicité dans le quotidien USA Today, destinée à discréditer Time Magazine, son fondateur et des dirigeants. Time avait publié, le 6 mai 1991, un article: "The Thriving Cult of Greed and Power", par Richard Behar. Cette campagne attaquait violemment aussi (entre autres) l'entreprise pharmaceutique Eli Lilly (fabricant d'un antidépresseur qui a connu un grand succès) et faisait le panégyrique de L. Ron Hubbard, avec des témoignages dithyrambiques d'adeptes célèbres. (D'après: The New York Times, 14 et 22/10/1993).
D'après le bulletin de liaison du CCMM, Juin 1994 :
Les démêlés judiciaires de la Scientologie |
Home Page Sectes = danger ! |