Lutte contre la drogue, réinsertion des détenus, gestion
des entreprises: les adeptes de Ron Hubbard sont multicartes
Malgré les résultats de la commission parlementaire d'enquête
sur les sectes et le battage médiatique réalisé par
la Communauté française, le répertoire communal d'Ixelles,
version 1999, comporte parmi ses publicités de larges placards en
faveur de l'église de scientologie. Au moins était-ce un
choix clair de la part de l'éditeur responsable, la scientologie
ayant ainsi la possibilité de se présenter ouvertement au
public sous son nom générique.
Mais les divers départements de la secte sont parfois moins aisés
à identifier. Non pas que la scientologie se dissimule: elle affiche
souvent clairement, au bas de ses dépliants, un copyright ou une
marque déposée qui la trahit, revers d'une volonté
acharnée de commercialiser la moindre de ses «technologies
religieuses appliquées»: Scientology, Dianetics, Golden Era
Productions, LRH Library, Bridge Publications, RTC, St Hill, Key to life,
Advance!, Purification, Purification Rundown, ne sont que quelques-unes
des dizaines de marques et appellations que la scientologie a fait protéger.
ABLE.
Créée en 1988, ABLE (Association for better living and education)
chapeaute la majorité des activités «sociales»
de la secte: Narconon, Criminon, Applied Scholastics, The way to happiness.
ABLE est donc le bras armé de la volonté des scientologues
de réformer le monde pour qu'il soit meilleur.
Narconon.
Narconon est, sous la tutelle d'ABLE, le programme scientologique de lutte
contre la drogue, et son existence remonterait à 1966. Il commence
très classiquement par un programme de désintoxication, puis
des cours thérapeutiques qui débouchent sur d'autres cours,
classiques au sein de la secte, de communication. Le discours est éminemment
simple - simpliste - sur le registre du Just say no! (Juste dire non!)
autrefois cher à Nancy Reagan. Officiellement, Narconon a existé
en Belgique, à Bruxelles, de 1982 à 1988. Mais les campagnes
belges contre la drogue sont désormais dans les mains d'un adepte,
Ludo Vermeulen, ex-musicien professionnel qui a lui-même expérimenté
les drogues et tenu des conférences scientologues dans les écoles
belges.
Criminon.
Lancé en Nouvelle-Zélande en 1970, l'association Criminon
est orientée vers le milieu carcéral, et dépend de
Narconon. Résolument anti-psychiatrique, cette association prétend
qu'au Etats-Unis, jusqu'à 80 % des personnes libérées
de prison commettent, dans l'année qui suit, 10 à 20 crimes
avant d'être arrêtées de nouveau et renvoyées
en prison. Outre des arguments de ce tonneau, Ron Hubbard croyait à
l'existence d'un «esprit criminel»: la secte a donc une vision
très personnelle du phénomène et de la réhabilitation.
Inconnu en Belgique.
Applied
Scholastics.
L'association Applied Scholastics vise à réformer l'enseignement
et oppose à la prétendue «médiocrité
de l'enseignement moderne» les visions pédagogiques de Ron
Hubbard. La Belgique a connu plusieurs écoles se revendiquant de
cette technologie Hubbard: Education Harmonieuse à Uccle (1979-1984),
La Brussels Ability School et, seul à être encore en vigueur
à notre connaissance, Creatif Onder-wijs, qui existe à Anvers
depuis 1995.
The
way to happiness.
Peu médiatisé, le programme «Le chemin du bonheur»
ou «Way to happiness» est diffusé en Belgique au moins
sous la forme de petits livrets qui présentent l'essentiel de ce
programme. Objectif: lutter contre le déclin de la moralité,
contre le règne du matérialisme. Il s'agit du premier code
moral entièrement fondé sur le bon sens et de nature non
religieuse, affirme la secte. La diffusion du livret semble être
la principale réalisation de ce département.
CCHR.
La Commission des citoyens pour les droits de l'homme ou «Citizens
commission on human rights» (CCHR) existe chez nous depuis 1993,
bien que sa fondation au niveau mondial remonte à 1969. Il s'agit,
pour la scientologie, d'une arme à double usage: elle permet de
mener campagne pour la défense des intérêts de la secte
sous couvert de «violation des droits de l'homme» et, d'autre
part, de mener campagne contre les psychiatres - lesquels, depuis les tout
débuts de «La Dianétique» de Ron Hubbard, ont
compris les dangers de la conception scientologue de la psychologie humaine.
Le CCHR-Belgium, implanté à Xhendelesse, était l'une
des cibles, jeudi dernier, du juge Van Espen.
WISE.
L'Institut mondial des entreprises de scientologie (WISE, World institute
of scientology enterprises) est un gros morceau, qui n'a plus aucun lien
avec le social: il réunit tous les responsables d'entreprises qui
ont opté pour les méthodes scientologiques à l'intérieur
de leur société, convaincus que les lignes directrices qui
permettent l'expansion de la secte dans le monde doivent également
permettre l'extension de leur entreprise. Les entreprises scientologues
belges connaissent pourtant pas mal de faillites ou de dissolutions.
C'est au sein de WISE qu'il faut situer les «Hubbard college of
administration»: Bruxelles en a hébergé un de manière
éphémère entre 1995 et 1997, à la tête
duquel se trouvaient trois des cibles des perquisitions de jeudi, à
savoir Marleen Grosemans (d'Impact Consulting, Louvain), Roger Van Loocke
(de PR Consult, Malines) et Guido Van Hootegem (d'Advance Consulting, Bruxelles).
Roger Van Loocke était également, en 1997, le représentant
de WISE en Belgique.