Un discours culpabilisant à propos des démissionnaires du mouvement raelien

(commentaires de Jeff sur alt.religion.raelian, 14 avril 2005)

Mars 2005 : la secte raelienne connaît une vague de démissions notamment au Québec. Pour essayer d'enrayer l'hémorragie d'adeptes, Rael fustige la "faiblesse" des candidats au départ. Quant à Daniel Chabot, bras droit québécois de Rael, il diffuse un courrier intitulé "Nos démons intérieurs".

Résumé de ce courrier : les vraies raisons des départs sont "toujours intérieures" ; les démissionnaires sont des déserteurs qui abandonnent "en plein milieu du combat, laissant ses confrères et consoeurs seuls devant l’ennemi" et comparés à Judas ; ils ne résistent pas aux "épreuves intérieures provoquées par des éléments extérieurs" ; enfin "l’annonce non prouvée d’un bébé cloné" et l'éventualité d'un "canular pour promouvoir la vérité" seraient des "alibis intellectuels" pour justifier les "comportements consécutifs à ces faiblesses intérieures"...


 

Nos démons intérieurs

(par Daniel Chabot, 18 mars 2005)

Allons donc droit au but. Dans le Nouveau message des Élohim du 13 décembre 52, il est écrit ceci : «Que votre joie de voir notre Grand Retour approcher vous donne des ailes pour surmonter les dernières embûches du parcours. Nous sommes tellement proches de ce jour et de vous qu’en vous recueillant vous devez pouvoir sentir notre présence… Et cette sensation illuminera vos jours et vos nuits et rendra votre vie merveilleuse, quelles que soient les épreuves qu’il vous reste à
surmonter…»

Petite mise en condition préalable du lecteur Raélien via une empreinte émotionnelle très efficace : l'ambassade et le retour triomphal des créateurs maintenant si proches. Pourquoi partir si près du but ? La carotte, mais vient rapidement le bâton.

Mais quelles sont-elles ces embûches et ces épreuves? Est-ce que c’est tout ce battage médiatique négatif qui touche certains pays comme les pays francophones? Est-ce le fait de voir sa photo dans le journal et de se sentir jugé et critiqué par la suite par les membres de notre famille ou par nos collègues de travail? Est-ce le fait de perdre nos emplois ou nos contrats de travail ou la garde de nos enfants suite à ces articles diffamatoires? Est-ce l’appréhension que ce qui est arrivé à certains puisse aussi nous arriver ? À moins que ce ne soit suite à l’annonce non prouvé d’un bébé cloné par une Évêque? Ou encore par la possibilité d’utiliser un canular pour promouvoir la vérité ?

Nous y voilà : il est certainement troublant pour tout le monde d'utiliser le mensonge (léger glissement sémantique: "canular") pour promouvoir "la vérité".

Réfléchissons tous à cet enseignement de Bouddha : « nous sommes tous éprouvés là où nous en avons le plus besoin ».

Bingo : vont-ils réaliser qu'ils créent eux-même leur propre adversité, qu'ils récoltent ce qu'ils ont semé ?

Et croyez moi, j’ai compris ce que cela voulait dire et j’ai maintes fois témoigné devant vous jusqu’à quel point cela pouvait être nourrissant pour la conscience! Ce que j’ai compris et que je ne cesse d’intégrer au mieux de mes imperfections personnelles, c’est que les vrais épreuves ne sont pas celles qui viennent de l’extérieur, mais bien celles qui surgissent de l’intérieur.

Ben non, retour sur terre. Après le concept de "vraies" questions, celles qui élèvent, celle qui font grandir (à objecter aux '"anti" quand ils veulent discuter des détails), voici les "vraies" épreuves, ce sont uniquement celles qui "surgissent de l'intérieur". Pourquoi un élément extérieur à nous même serait d'office disqualifié comme source de transformation ? C'est une pétition de principe étonnante... Une femme qui réalise sous les coups de son mari qu'elle doit le quitter d'urgence, pour sa propre survie, ne vit pas une véritable épreuve ?

Les causes extérieures énumérées plus haut ne sont là que pour titiller, interpeller, alimenter nos faiblesses intérieures et du coup, nous servir d’excuses (ex-causa) et d’alibis intellectuels pour justifier nos comportements consécutifs à ces faiblesses intérieures.

Les causes extérieures peuvent pourraient tout aussi bien être interprétées comme une nécessité impérieuse de changement. Pourquoi nécessairement s'en saisir comme des "alibis intellectuels" : c'est à nouveau une étrange pétition de principe (ou procès d'intention). Pourquoi raéliens n'auraient pas la lucidité de les prendre pour ce qu'elles sont ? Une cause extérieure peut nous placer dans un état d'inconfort ou de souffrance psychique qui sera l'incitation à changer nos habitudes ou nos schémas de pensée inadaptés : pourquoi nier ce rôle aux causes extérieures ? Il me semble au contraire que les sources du changement, les véritables expériences, viennent rarement de "l'intérieur" qui a une tendance naturelle à préserver son équilibre, sa continuité, et à se protéger des perturbations. C'est une étrange idée qui côtoit celle qui veut
que si problème il y a, il est forcément dans la tête de celui qui le voit. C'est surtout un argument très pratique pour les guides raéliens qui recoivent des adeptes en plein doute voire carrément critiques: on leur plante un mirroir avec cet argument et basta, circulez.

Tous les Prophètes faut aussi penser aux disciples Pierre (qui eu droit aux chants du coq pour l’avertir) et Judas, dont la conscience n’a pu résister au choc de la trahison dont la faiblesse humaine qui le caractérisait, comme elle nous caractérise tous, a pu l’emporter dans l’aliénation momentanée.

Vient maintenant le couplet culpabilisant: "trahison" ! "Judas" !

Il y a des personnes qui quittent les structures et qui, lorsqu’on les écoute, ont des raisons personnelles qui peuvent sembler logiques, intègres et même conscientes.

Un peu de prophylaxie idéologique : ceux qui partent n'ont en réalité rien compris, ils ont glissés de la vérité au mensonge ou à l'erreur, de l'essentiel à l'accessoire (les détails), de la force à la faiblesse intérieure, du camps des chevaliers blancs à ceux des traitres, des déserteurs, du côté obscur, etc etc...

Mais tout chercheur de Vérité doit être franc et honnête avec lui-même. Tout amoureux de la Vérité doit se poser les vrais questions, questionner les vrais raisons, regarder en face les vrais démons qui l’habitent. Et les vrais raisons ne sont JAMAIS extérieures. Les vrais raisons sont toujours intérieures, à la limite de notre foi, là où se trouve notre capacité à distinguer la Vérité du mensonge, aux abords de la fine ligne qui sépare le vrai du faux, la fin du moyen, l’essentiel de l’accessoire, l’authentique du stratégique, le fondamental pour notre Mission et tout le reste qui ne sert qu’à faire ressortir la Vérité au présent ou dans l’avenir. En somme, les épreuves intérieures provoquées par des éléments extérieurs servent soit à dessiller nos yeux pour savoir que nous sommes nus ou à les embrouiller pour nous faire croire que nous sommes plus grands que la Vérité.

Tiens, les causes extérieures acquièrent une vertu nouvelle : provoquer une épreuve intérieure qui peut dessiller nos yeux, mais ceux qui partent sont bien entendu sont ceux "qui se croient plus grands que la
Vérité", pas ceux qui ont ouvert leurs yeux pour réaliser que cette "Vérité" est un leurre.

Les articles mensongers, les pertes de contrats ou de garde de ses enfants, les médisances et les insultes, les accusations et les libelles diffamatoires, les bébés clonés ou pas clonés ne sont en réalité que des excuses; d’extraordinaires occasions de nous mesurer à nous-mêmes. Ce qu’il faut regarder, au plus profond de soi, ce sont les véritables causes intérieures (qu’on pourrait appeler les «incuses» par opposition aux excuses) et qui sont en connexions directes avec nos faiblesses et lacunes les plus profondes.

Résumons pour les démissionnaires: les bébés clonés ou pas clonés ne sont en réalité qu'un "alibi intellectuel", une "excuse" bien pratique pour justifier votre faiblesse, votre lacheté ou votre échec devant
l'épreuve et vous croire plus grands que "la Vérité".

Parfois on me demande si je suis triste ou déçu de voir qu’un membre des structures vient de démissionner. La réponse est NON. Je ne suis jamais triste ou déçu par le départ d’une personne tout simplement parce que c’est son choix et sa liberté. Mais là où je peux dire que je suis dérangé, indépendamment de qui a pu quitter ou démissionner, c’est lorsque je vois des gens qui ont œuvré une dizaine ou même une vingtaine d’années comme Chevalier des Élohim et qui décident de jeter la serviette, abandonnant du coup leur équipe et leur Chef. L’image qui me vient est celle du soldat qui décide de déserter en plein milieu du combat, laissant ses confrères et consoeurs seuls devant l’ennemi. Je vois surtout notre Général qui est au front, et qui compte sur ceux et celles qui sont derrière lui pour l’appuyer et qui, lorsqu’il se retourne, constate que certains l’ont laissé tomber… Ma déception n’est donc pas pour ceux qui quittent, mais pour celui qui est quitté par ses Chevaliers qui lui avaient dit «tu peux compter sur moi jusqu’au bout», mais qui n’ont pas su combattre leurs démons intérieurs.

Une sensibilité toute féminine de ce couplet de l'enseignant raélien number one: les démissionnaires sont des traitres, des déserteurs qui abandonnent leur général au combat, des Judas ! Un ton martial pour
une autre couche de culpabilisation. Pourtant, il me semble bien que c'est le général qui abandonne ses soldats à leur sort en fuyant le Québec comme il a fuit la France (et incité ses adeptes à le faire).
Pourquoi ne rentre-t-il pas pour être à leurs côtés en ces moments difficiles ?

Il doit être en effet très dérangeant pour les dirigeants raéliens de voir des membres fidèles depuis la création du MR Canadien (depuis parfois près de 30 ans et parfois de haut niveau) le quitter aujourd'hui. Comme il doit être génant de voir le refus du mensonge gagner d'autres pays, non francophones. En plus, il faut colmater les brêches, "expliquer" à ceux qui restent, dissoudre leurs doutes ou leur réflexion...à défaut, les pousser vers la sortie.

Parfois on me demande si je suis triste ou déçu de voir qu’un membre des structures vient de démissionner. La réponse est NON. Je ne suis jamais triste ou déçu par le départ d’une personne tout simplement parce que c’est son choix et sa liberté. Mais là où je peux dire que je suis dérangé, indépendamment de qui a pu quitter ou démissionner, c’est lorsque je vois des gens qui ont œuvré une dizaine ou même une vingtaine d’années comme Chevalier des Élohim et qui décident de jeter la serviette, abandonnant du coup leur équipe et leur Chef. L’image qui me vient est celle du soldat qui décide de déserter en plein milieu du combat, laissant ses confrères et consoeurs seuls devant l’ennemi. Je vois surtout notre Général qui est au front, et qui compte sur ceux et celles qui sont derrière lui pour l’appuyer et qui, lorsqu’il se retourne, constate que certains l’ont laissé tomber… Ma déception n’est donc pas pour ceux qui quittent, mais pour celui qui est quitté par ses Chevaliers qui lui avaient dit «tu peux compter sur moi jusqu’au bout», mais qui n’ont pas su combattre leurs démons intérieurs.

S’il est de la plus grande liberté de chacun de quitter le mouvement vers l’Ambassade, il est aussi du devoir de chacun de le faire en s’avouant les vrais raisons qui l’ont motivé : l’échec à l’épreuve intérieure qui s’est présenté à eux sous le fallacieux déguisement d’un événement extérieur. Il est aussi du devoir de chacun d’assumer seul ses décisions, sans chercher à convaincre les autres que nous avons raisons, en essayant de trouver en eux des alliés à nos faiblesses.

On pourrait tout justifier avec cet argument fallacieux. Ce texte est un modèle qui à mon avis mériterait d'être soumis pour commentaire à un psychologue.

Jeff.



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