Eglise du Christ Internationale

Transcription du reportage fait par France 2, le 15 janvier 1998 au journal télévisé de 20 h

Daniel Bilalian (présentateur du Journal Télévisé de 20 heures) :

Les autorités françaises sont de plus en plus inquiètes de la prolifération des sectes. Sujet que l'on évoque régulièrement à l'occasion malheureusement de tragédies le plus souvent. Plutôt que d'évoquer le problème d'une manière générale, nous allons tenter de montrer dans l'enquête de ce soir comment finalement on peut se retrouver, assez facilement, embrigadé sans toujours s'en rendre compte, au début du moins. Dans ce reportage, il est question de l'Eglise Internationale du Christ, fondée aux États Unis. Une Eglise cataloguée par les parlementaires français comme une véritable secte. Enquête de Guillaume Fautrat, Elisabeth de Sousa et Hervé Brusini.


Images

Voix off :

Le spectacle n'a rien d'un concert, la salle Gaveau a été louée pour autre chose ce jour là. Tous font partie de l'Eglise Internationale du Christ. Une secte à tendance apocalyptique selon les termes d'un rapport parlementaire. Autrement dit pour échapper à la fin toute proche du monde, on peut gagner son salut en faisant de la Bible une doctrine quotidienne et absolue.

Un pasteur qui prêche (visage caché) :
 
(...) en tous cas une chose est certaine : c'est qu'en mettant en pratique la parole de Dieu, en mettant en pratique les enseignements de Jésus, il y aura de l'opposition (des "amen" dans la salle) que ça vienne de votre famille, de vos amis, de vos copains au travail. Il y aura de l'opposition et Jésus l'a expérimenté pendant sa vie.

Voix off :

Le ton est donné. Adhérer c'est se mettre à l'écart, en opposition avec le reste de la société. Une société où l'on recrute pourtant comme ça, simplement au coin de la rue.

Un adepte de la secte qui s'arrête et accoste le journaliste dans la rue :

On aimerait vous inviter à une réunion chrétienne. Prochainement ou même ce matin, ça vous intéresserait d'y participer ?

Voix off :

Avec votre guide, le parcours initiatique commence. Toujours dans un lieu public. Sous l'oeil de notre caméra discrète voici la première étape de l'enseignement. On vous fait découvrir le message de cette nouvelle Eglise née à Boston aux Etats-Unis.

L'adepte 2 (dans un café) :

Le Christianisme tel que l'enseigne Jésus est quelque chose d'assez exigeant, quelque chose de profond, qui ne demande pas un engagement un peu superficiel, ni religieux. Au moment où tu deviens Chrétien, tu te dis implicitement : " à partir de maintenant c'est Jésus qui va diriger ma vie, et la Bible ". Avant de faire quelque chose, la décision que je prends, ce n'est pas de demander : " qu'est-ce que j'ai envie de faire ? ", mais " qu'est-ce que Jésus ferait à ma place ? ".

Voix off :

Sophie Courbet a longuement étudié cette Eglise. Pour elle la référence constante à Jésus c'est le début d'un rapport de soumission à celui qui initie : le formateur.

Sophie Courbet (Ethnologue) :

Pour n'importe quel acte, ou décision dans sa vie quotidienne, il doit demander l'avis de son formateur. Puisque pour les Bostoniens se soumettre à son formateur c'est se soumettre à Dieu, puisque Dieu s'exprime à travers les hommes et en l'occurrence les formateurs.

Voix off :

Le formateur. Nous avions rendez-vous avec lui.

(dans un immeuble quelque part dans Paris.) La rencontre se déroule dans son appartement.

(on sonne à une porte, un homme ouvre.)

Le formateur : Salut, ça va ?

Le journaliste : ça va et toi ?

Le formateur : très bien.

(autour d'une table, deux personnes à l'écart, des Bibles ouvertes sur la table.)

Le formateur : on peut finir par une petite prière...

Voix off :

Le cérémonial y est parfaitement réglé. Un abord sympathique où l'on prend note de toutes vos réactions. L'objectif, c'est de recruter.

Le formateur : Seigneur on te remercie beaucoup pour ce moment...

Voix off :

C'est l'une des tâches assignées aux formateurs. Souvent des parents d'adeptes appellent au secours ce bénévole de la lutte anti-secte. Selon lui dans l'Eglise, chacun surveille l'autre. Chaque formateur possède à son tour un autre formateur.

Mathieu Cossu (bénévole à l'ADFI) :

(...) et le formateur a le droit d'intervenir en disant " ceci tu ne l'as pas bien fait ", " combien as-tu évangélisé de personnes aujourd'hui ? ", " combien as-tu donné à la collecte ? ". Autrement dit il a le droit d'intervenir sur tous les domaines de la vie de l'adepte et donc c'est une prison quelque part.

Voix off :

Cette prison, Eric en est sorti il y a huit mois. Meurtri. Son formateur lui laisse un souvenir de père-fouettard.

Eric (ex-adepte) :

Il a une emprise sur moi comme si c'était mon père et donc si je fais des choses qui ne sont pas justes, c'est lui qui va... je dirais me corriger. Il ne va pas me taper dessus mais il va me corriger en me faisant peur avec des passages de la Bible, en me disant : " si tu ne fais pas ça, c'est ce qui va t'arriver ". Donc c'est une manipulation un peu parce que c'est vrai qu'il travaille intellectuellement, je dirais... il travaille dans la tête. Donc des blessures... ça fait encore plus peur que lorsqu'on va recevoir une claque.

Voix off :

Fin de parcours. C'est jour de baptême à la salle Gaveau.

Une adepte (s'apprêtant à baptiser une jeune fille) :

J'ai deux questions à te poser. Est-ce que tu crois que Jésus est fils de Dieu et que Dieu l'a ressuscité d'entre les morts ?

La jeune fille : Oui je le crois.

L'adepte : quelle est ta bonne confession ?

La jeune fille : Jésus est Seigneur de ma vie.

(des "Amen" dans la salle)

L'adepte : grâce à cette bonne confession, je vais maintenant te baptiser au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit pour le pardon de tes péchés.

Voix off :

Après 14 jours d'études, on est officiellement chrétien du royaume de Dieu. Une nouvelle vie commence. L'adepte est fortement encouragé à quitter sa famille. D'autres réunions vont suivre où l'on parle d'argent.

Eric (ex-adepte) :

C'est la réunion où on donne la collecte hebdomadaire qui est basée sur le salaire ou les revenus qu'on a. Bon. En général pour une personne comme moi, qui avais un salaire, c'était sur minimum 10%, c'est-à-dire pour moi ça faisait environ 270 FF par semaine.

Voix off :

Chaque membre reçoit ce formulaire ("Nos finances : une question de coeur" montré à l'écran.) Il faut entretenir son coeur mais surtout donner avec foi. A coups de citations bibliques on y indique comment gérer au mieux son patrimoine. Le questionnaire est très précis : " est-on prêt à vendre ou à sacrifier pour la collecte? ", " je suis prêt à vendre tous mes biens personnels " a répondu ce membre de l'Eglise. Pour 1997 les arrondissements du nord de la capitale ont récolté plus de deux millions de francs de la part des adeptes.

Mathieu Cossu :

Ce sont des victimes, ce qu'ils font, ils sont persuadés de le faire pour le bien, parce que ce qui est en jeu selon l'Eglise du Christ, c'est le salut. Or lorsqu'on est convaincu que la vie éternelle est importante et qu'elle existe, en tous cas il vaut mieux avoir le salut qu'être damné. Et donc au nom de ce salut hypothétique on leur fait faire absolument n'importe quoi.

Voix off :

Tous se marient au sein-même de l'Eglise. Les principaux centres sont à Paris, Lyon et Marseille. En France pour l'heure cette Eglise compte 1500 membres.


 
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