Mis en ligne le 18 décembre 2003
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- Assemblée nationale -
COMPTE RENDU ANALYTIQUE OFFICIEL
1ère SÉANCE DU MARDI 16 DÉCEMBRE 2003
QUESTIONS ORALES SANS DÉBAT (extrait)
CONSÉQUENCES MÉDICALES DES DOCTRINES DES TÉMOINS DE JÉHOVAH
M. Jean-Pierre Brard - Ma question eût pu être posée
par le président de notre assemblée, tant il est vrai que la vigilance
contre les dérives sectaires doit échapper à tout clivage
partisan.
Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'Etat aux
personnes handicapées - Chacun sait que vous n'êtes pas sectaire
! (Sourires)
M. Jean-Pierre Brard - En effet, nous sommes Républicains !
M. Mattei a rappelé le 7 décembre dernier à la radio qu'en
cas d'urgence médicale, il était procédé aux interventions
nécessaires, quelles que soient les réticences du patient. Mais
lorsqu'il n'y a pas d'urgence manifeste, c'est la liberté de choix du
praticien qui prévaut. Cela dit, à force de considérer
comme non urgent le traitement d'une pathologie, celle-ci, de bénigne,
devient aiguë...
Par ailleurs, la commission Stasi sur la laïcité républicaine
préconise la délibération d'une loi tendant à affirmer
le principe de la continuité des soins en toutes circonstances.
Dès lors, il est impératif de dénoncer l'attitude des
Témoins de Jéhovah prônant le refus de la transfusion sanguine
et de dénoncer le mensonge éhonté qu'ils se plaisent à
diffuser, selon lequel il existerait des produits de substitution générale
au sang et à ses dérivés. En contraignant leurs adeptes
à refuser la transfusion, les Témoins sont directement responsables
de la mort de nombreuses personnes.
Le ministère de la santé prend une part active aux travaux de
la mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives
sectaires. Quelles orientations entend-il prendre pour lutter efficacement contre
l'infiltration des sectes dans le milieu de la santé et contre la négation
de la dangerosité du refus de la transfusion sanguine ?
A l'unanimité de ses membres - moins une abstention -, l'académie
nationale de médecine a réaffirmé son attachement au principe
selon lequel le praticien doit garder en toutes circonstances la pleine liberté
de ses décisions et assumer ses responsabilités en dehors de toute
pression, menace ou violence.
Madame la ministre, soyez sûre que nous sommes nombreux à attendre
votre réponse.
M. François Rochebloine - Excellente question !
/
Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'Etat aux personnes
handicapées - Le ministre de la santé contribue à la
lutte contre les dérives sectaires, lesquelles sont - ou peuvent être
- préjudiciables pour la santé et comportent souvent des infractions
au droit commun, à travers le dispositif de vigilance et d'action défini
dans la circulaire du 3 octobre 2000.
La circulaire du 7 février 2003 de la direction de l'hospitalisation
et de l'organisation des soins a rappelé aux DRASS et aux DDASS la nécessité
de signaler au ministère toute information relative à des faits
répréhensibles en matière de santé publique commis
par des groupes à caractère sectaire. Lorsque le bureau de l'exercice
médical de la DHOS est informé d'agissements contraires à
la législation en matière de santé publique ou au code
de déontologie, une plainte est portée auprès du procureur
de la République ou au conseil de l'ordre concerné, par exemple
en cas de signature de certificats de contre-indication vaccinale inspirés
par des idéologies sectaires.
Pour prévenir les risques de dérive sectaire dans le champ des
psychothérapies, la direction générale de la santé
a engagé en 2001 des travaux sur la typologie et l'évaluation
des pratiques, en lien avec l'INSERM et l'ANAES. Elle a demandé en 2003
à la Fédération française de psychiatrie de réaliser
une conférence de consensus sur la prise en charge médico-psychologique
de victimes de mouvements sectaires. Cette conférence aura lieu à
Paris les 6 et 7 novembre 2004.
Sur le refus de la transfusion sanguine par les Témoins de Jéhovah,
des décisions de justice ont indiqué comment devait être
concilié le respect du consentement du malade et le devoir de sauver
la vie. La jurisprudence considère que le praticien qui réalise
une transfusion sanguine, malgré le refus explicite du malade, ne commet
pas de faute lorsque la transfusion sanguine apparaît comme le seul traitement
susceptible de sauver la vie du malade.
Enfin, dans un fascicule qui vient d'être publié par le ministère
sous le titre Accidents collectifs, attentats, catastrophes naturelles : conduite
à tenir pour les professionnels de santé, figure un appel à
la vigilance sur la présence croissante de mouvements sectaires auprès
des victimes sur les lieux de catastrophes.
M. Jean-Pierre Brard - Votre réponse est tout à fait claire
et je vous remercie. Mais il faut donner suite avec précision à
la décision de l'Académie nationale de médecine, qui "
considère qu'on ne peut admettre qu'une minorité radicale, quelle
que soit son appartenance religieuse, cherche à imposer ses vues à
l'ensemble du personnel de santé et aux patients. " Ce sont parfois
des praticiens qui sont à l'origine de telles dérives.
L'organisation d'une conférence de sensibilisation est une excellente
initiative. Les Témoins de Jéhovah avancent masqués. Il
a fallu toute la vigilance du président du Sénat pour empêcher
que se tienne, dans l'enceinte du Palais du Luxembourg, un colloque organisé
par une des nombreuses associations qui servent de faux-nez aux Témoins
de Jéhovah. Savez-vous qui figurait parmi les intervenants ? Outre l'avocat
de cette organisation, on trouve M. Patrick Pelloux, qui participe régulièrement
à de telles manifestations. Commet peut-on intervenir comme il l'a fait
sur les soins prodigués pendant la canicule et participer à de
semblables réunions ?
Dès lors qu'il s'agit de sauver des vies, aucun compromis n'est possible. Tous les ministères doivent être sur la même longueur d'ondes et je souhaite que celui de l'intérieur adresse une lettre au préfet du Puy-de-Dôme, qui s'appuie sur une jurisprudence contestable du Conseil d'Etat relative aux refus de transfusions sanguines.
Le seul moyen de s'en sortir, c'est de corriger par la loi les dérives de la jurisprudence, afin de protéger les libertés individuelles et collectives contre des organisations criminelles.