Ce sont eux qui nous ont poussés à nous entre-déchirer
et à nous séparer
Interview de Vincent Bonnier, ex-époux d'un témoin de Jéhovah.
Sources :
Demain l'Apocalypse, par Marcel Trillat, Eric Delagneau,
Matthias Second et Isabelle Tartakovsky. Transcrit du reportage d'Envoyé
Spécial, diffusé sur France
2 le jeudi 2 avril 1998.
Faut-il avoir peur de témoins de Jéhovah ? Sélection
du Reader's Digest, décembre 1996.
En 1990-1991, à une époque où sa profession l'obligeait
à s'absenter souvent de la maison, son épouse Véronique
rencontre les Témoins de Jéhovah. D'abord secrètement
puis ouvertement, elle adopte leurs croyance et leurs pratiques, et elle
tente de faire partager avec son mari sa foi toute neuve, sans aucun succès.
En moins de deux ans, Vincent Bonnier va voir cette femme, rieuse et enjouée
qu'il aimait, devenir peu à peu quelqu'un d'autre :
" Un témoin de Jéhovah se lève le matin, et
commence par consulter son petit livre qui lui indique ses activités
qu'il a à réaliser pour toute la journée et les lectures
qu'il doit faire et les textes qu'il faut apprendre. C'est une activité
de tous les instants. Bien sûr, il y a aussi des changements au niveau
vestimentaire, au niveau des relations qu'on peut avoir. On fréquente
de moins en moins la famille, on fréquente de moins en moins les
amis, et on voit arriver de plus en plus souvent des Témoins de
Jéhovah, des visites impromptues ou plus moins organisées,
mais de plus en plus régulières. Et puis on ne s'habille
plus pour séduire, on ne se maquille plus ou le moins possible.
On devient plus renfermé, on participe moins à la vie de
famille, on a du mal à communiquer, à échanger. "
Malgré les promesses de ne pas affecter la vie de toute la famille,
elle multiplie les pressions pour que lui et leurs deux filles, âgées
de deux et cinq ans, se rendent à la Salle du Royaume. Elle a toujours
souhaité impliquer ses enfants dans ses activités. Les pressions
se font de plus en plus fortes pour que les enfants soient instruits à
la maison, pour qu'on leur fasse des lectures, pour discuter avec elles
de ce qui est interdit ou autorisé chez les témoins de Jéhovah,
pour discuter de leurs principes. Puis elle refuse de fêter Noël,
Pâques, et anniversaires, jugés impies ; et fuit les fêtes
de familles et les amis, à ses yeux sous l'emprise de Satan.
Vincent fait d'autres découvertes qui le mettent hors de lui
: endoctrinement de sa fille aînée, transferts d'argent de
leur compte commun. C'en est trop ! Il menace alors d'engager le divorce.
En mars 1992, sa femme disparaît avec leurs deux enfants. Le lendemain,
il apprend à sa stupéfaction qu'elle avait porté plainte
pour coups et blessures, qu'elle demandait la séparation de corps,
qu'elle l'accusait de gestes obscènes et d'attouchement sexuels
sur sa fille aînée. Comment pouvait-elle se livrer à
de pareils mensonges ?
Le 3 avril, le tribunal d'Avignon confie la garde des enfants à
la mère, et ordonne une enquête sociale. Encouragé
par son avocat, Vincent décide de se battre. A l'ADFI,
il rencontre Michel Marjollet dont l'histoire est étrangement similaire
à la sienne, mais où le juge, qui n'avait pas été
dupe, lui avait accordé la garde de son fils.
Au cours de l'enquête sociale, Vincent explique, documents à
l'appui, pourquoi sa femme ne peut être sincère quand elle
promet de ne pas endoctriner ses filles :
" Toute leur doctrine repose sur l'annonce imminente de la fin du
monde, où seuls les adeptes seront sauvés. Quelle mère
pourrait se résigner à condamner à mort ses enfants
? ".
A l'issue de cette enquête, et après 6 mois de cauchemar,
la situation tourne en faveur de Vincent. Le 25 mai 1992, le tribunal d'Avignon
lui donne la garde de ses filles, et le jugement est confirmé par
la cour d'appel de Nîmes. Le divorce est prononcé en 1996,
madame Bonnier ayant légalement la possibilité de reprendre
ses filles pendant les vacances. Mais elle n'a jamais renoncé à
leur inculquer ses croyances. Déborah, la plus grande, avait accepté
de dire pourquoi elle refusait dorénavant de voir sa mère.
Madame Bonnier l'ayant appris, elle invoque son autorité parentale
pour interdire la diffusion de son témoignage. Cette enfant de 14
ans qu'elle juge depuis des années apte à choisir une religion,
elle lui dénie le droit de dire ce qu'elle en pense.
Tout ceci ressemble à un terrible gâchis. Pour Vincent
Bonnier, c'est clair que ce qui est arrivé à leur famille
est de la responsabilité de cette secte. Ce sont les Témoins
de Jéhovah qui les ont poussés à s'entre-déchirrer
et à se séparer.