Sathia Saï Baba

Déchéance divine

 

(Source : London Telegraph 28 octobre 2000, traduit de l'anglais)

 


Chers ex-dévots et partisans de la Vérité et de la Bonté divine, nous espérons que cet article :

1. ouvrira les yeux qui étaient restés jusqu'à date fermés;
2. attirera l'attention du Premier Ministre Vajpayee pour qu'il fasse enquêter par le FBI, Interpol et autres instances, les allégations criminelles sérieuses qui s'accumulent contre l'Organisation Sathya Sai; attirera l'attention des élus en place au Canada pour qu'ils fassent enquêter par la GRC cette organisation afin que les enfants canadiens voyageant en Inde soient protégés;
3. attirera finalement l'attention de toutes les instances légales de renforcement de la loi et des gouvernements de partout dans le monde (Canada y compris) afin de contacter les victimes et d'enregistrer officiellement les données pour poser les actions appropriées consistant à faire stopper les abus sexuels commis par Sathya Sai Baba;
4. incitera les diplomates et les chefs d'État à exiger de leurs concitoyens de ne plus aller en Inde visiter l'ashram de Prashanti Nilayam à Puttaparthi (ashram de Sai Baba;
5. attirera l'attention des médias de par le monde afin qu'ils puissent dénoncer ces abus et ces dissimilations frauduleuses faites par les officiels de l'Organisation Sai;
6. fera démanteler et condamner l'entière Organisation Sai et qu'une compensation adéquate soit fournie à toutes les victimes sous forme d'aide psychologique ou autres;
7. donnera aux organismes tels l'UNESCO et les NATIONS-UNIES l'envol pour prendre les dispositions nécessaires afin d'éduquer à grande échelle l'humanité pour qu'elle ne soit plus écorchée, blessée, violentée et trompée par des leaders spirituels ou des soi-disant maîtres amenant leurs dévots à accepter de tels abus;
8. nous amènera tous à être plus vigilants afin de prévenir de tels crimes, qui ont lieu en ce moment même, en les rapportant aux autorités appropriées.

LA DÉCHÉANCE DIVINE

LE GURU SAI BABA EST SORTI DE L'INDE UNE FOIS SEULEMENT, CEPENDANT ON ESTIME LE NOMBRE DE SES DÉVOTS À TRAVERS LE MONDE À ENVIRON 50 MILLIONS. ILS LE VÉNÈRENT COMME UN DIEU VIVANT QUI, À TOUT LE MOINS, PEUT CHANGER LA VIE DES GENS ET PEUT POSSIBLEMENT MÊME FAIRE DES MIRACLES. MAIS AUJOURD'HUI SES ADEPTES SONT AMÈREMENT DIVISÉS PAR LES ALLÉGATIONS DISANT QUE LEUR GURU A, PENDANT DES ANNÉES, SYSTÉMATIQUEMENT ABUSÉ SEXUELLEMENT DE JEUNES GARÇONS FAISANT PARTIE DE SES DISCIPLES ET ÉTANT RASSEMBLÉS AUTOUR DE LUI.

par MICK BROWN

Conduisant à travers la ville en provenance d'un petit aéroport du Midwest où Carrie Young et son mari m'avaient rencontré en sortant de l'avion, elle sortit une grande photo qui se trouvait sur le siège arrière du station-wagon. Encadrée de dorure, la photographie montrait le couple et ses trois enfants en train de prendre la pose avec un vieil homme indien au visage grassouillet et arborant une coupe de cheveux Afro, habillé d'une robe rouge. Ce qui sautait aux yeux sur cette photo était que les Young semblaient tout à fait rayonnants de joie. "Et dire que", dit Carrie, "cet homme est celui que nous pensions être Dieu."

J'étais avec les Young depuis moins de 30 minutes, mais j'avais déjà décidé - comme il nous arrive de le faire quelquefois - que je les aimais, qu'ils étaient ce que les Américains appellent "straight arrows" (des bonnes personnes) : honnêtes, décentes et dignes de confiance. Un beau couple, bien mis, dans la quarantaine ; les deux travaillaient dans l'industrie de l'ordinateur. L'année que nous venons de vivre, dit Jeff, a été difficile ; mais avec tout ce qu'il leur est arrivé, ils commençaient à s'en tirer. Toute expérience offre un potentiel de croissance, a-t-il dit ; même une aussi traumatisante, aussi incroyable que celle-là. Les Young accordent beaucoup de valeur à la croissance.

Il y a de cela un an, leur fils Sam se confia à eux avec une affirmation choquante : Sathya Sai Baba, leur a-t-il dit, - l'homme que les Young ont vénéré comme étant Dieu pendant plus de 20 ans - était, en fait, un abuseur sexuel. Durant quatre années, à son ashram, pendant que les parents de Sam l'attendaient à quelques mètres de là - excités que leur fils soit à une proximité si rapprochée de la divinité, confiant dans leurs croyances que l'homme-dieu procurait le salut spirituel à leur fils - Sai Baba le soumettait à un abus sexuel soutenu et systématique. "Vous pourrez rencontrer Sam au restaurant", dit Carrie. "Il est préparé à parler de cela. Il pense aussi que c'est important."

Sam était un grand garçon aux yeux bleus et aux cheveux bouclés avec une apparence qui ne peut être que décrite comme étant angélique. Les Young commandèrent des hamburgers et de la bière - un geste, il semblait, presque de bravade ; pendant les 23 années ou la famille suivait Sai Baba, elle était végétarienne de façon stricte. Pendant les quatre heures qui suivirent, ils m'ont raconté l'histoire comment ils en sont venus à connaître Sai Baba ; de leurs aspirations spirituelles, les rêves, les visions, les miracles - et comment leurs vies s'étaient transformées en cauchemar. Et toujours, durant toute la conversation, la même question revenait : comment est-ce possible que cela en soit
venu là ?

Pendant plus de 50 ans, Sai Baba fut le saint homme de l'Inde le plus connu et le plus puissant - un faiseur de miracles, dit-on, un instrument du divin. Ses adeptes s'étendent non seulement aux quatre coins du sous-continent indien mais aussi en Europe, Amérique, Australie, Amérique du Sud et dans toute l'Asie. L'estimation du nombre total de dévots de Baba dans le monde varie entre 10 et 50 millions.

Avant même de commencer à apprécier l'envergure et l'intensité de sa suite, il est nécessaire d'avoir quelques informations sur ce que ses dévots croient qu'il est, et des pouvoirs qu'ils lui sont attribués. Beaucoup de ce qui suit existe dans un domaine qui va au delà de l'explication rationnelle. Sai Baba est considéré, parmi ses dévots, comme étant un avatar : littéralement, une incarnation du divin, un corps divin exceptionnel - comme cela de Krishna ou du Christ - qui, dit-on, prend forme humaine pour accélérer l'évolution spirituelle de l'Homme.

Selon la biographie en quatre volumes écrite par feu son secrétaire et disciple, le Professeur N. Kasturi, Sai Baba est né d'une "immaculée conception" dans un village du sud de l'Inde à Puttaparthi en 1926. En tant que jeune garçon, il démontrait des signes d'habilités miraculeuses, incluant la "matérialisation" de fleurs et de bonbons à partir de "nulle part". À 13 ans il s'auto-proclama comme étant la réincarnation d'un saint vénéré dans le sud de l'Inde, Shirdi Sai Baba, qui mourut en 1918. Mis au défi de prouver son identité, Kasturi écrit, il lança une poignée de fleurs de jasmin sur le sol, et celles-ci se formèrent de telle sorte qu'elles épelèrent le nom "Sai Baba" en telugu.

En 1950, il fit construire un petit ashram, Prashanti Nilayam (Demeure de Paix Suprême) dans son village natal. Ceci est maintenant de la dimension d'une petite ville, pouvant recevoir jusqu'à 10.000 personnes, avec des dizaines de milliers d'autres logés dans les nombreux hôtels et édifices d'appartements qui ont surgi partout autour. Le nombre de pèlerins est si grand, surtout depuis les dernières années, qu'une piste d'atterrissage a été construite près de la ville. Il y a une école primaire, une université, un collège et un hôpital dans l'ashram, ainsi que d'innombrables autres institutions partout en Inde et portant le nom de Sai Baba.

En Inde, on compte parmi ses dévots l'ancien Premier Ministre, PV Narasimha Rao [N.d.T. : il est à noter que "l'ancien premier ministre indien P.V. Narasimha Rao a été reconnu coupable hier (vendredi 29 septembre 2000) de corruption par un tribunal de New Delhi en liaison avec une affaire de pot-de-vin versés en 1993 à des parlementaires." dans le Journal La Presse, Montréal, édition du Samedi 30 septembre 2000], l'actuel Premier Ministre, Atal Bihari Vajpayee, et un assortiment de judiciaires senior, d'universitaires, d'hommes de science et d'éminents politiciens. À l'encontre d'autres gurus indiens qui ont voyagé en Occident, se ramassant une suite de chercheurs et de célébrités, Sai Baba est sorti de l'Inde seulement une fois, dans les années '70, afin de visiter l 'Ouganda. Sa réputation en occident s'est propagée surtout par le bouche-à-oreille. Ses dévots semblent provenir de la classe moyenne bien éduquée.

On dit qu'en tant qu'instrument du divin, Sai Baba est omniscient, capable de voir le passé, le présent et le futur de chacun; ses "miracles" incluent des matérialisations diverses pour ses dévots, incluant des montres, bagues et pendentifs, ainsi que de la vibhuti ou cendre sacrée. Comme le Christ, on dit de lui qu'il a créé de la nourriture pour nourrir les multitudes ; qu'il est "apparu" à des disciples en des moments de crise ou de besoin. Il y a d'innombrables récits de guérisons, dont au moins deux personnes ressuscitées.

À l'encontre de l'infâme guru Rajneesh qui conduisait des Rolls-Royce et qui prêchait une philosophie excessive de libertinage, ou de Maharishi de l'époque glorieuse des Beatles, qui a mis sur le marché des techniques traditionnelles de méditation comme outil pour une meilleure santé et efficacité, les enseignements de Sai Baba rassemblent une synthèse de toutes les croyances, avec une emphase particulière sur la charité chrétienne, enchâssée dans un aphorisme doué d'ubiquité, "Aimez tout le monde, Servez tout le monde" (Love All, Serve All). Son disciple le plus improbable est sans doute Don Mario Mazzoleni, un ancien prêtre du Vatican et auteur de "Un prêtre rencontre Sai Baba", livre dans lequel il exprime sa conviction que le Christ et Sai Baba sont la même manifestation de Dieu sur terre. Mazzoleni fut excommunié en 1992 à cause de ses croyances.

L'activité principale à Prashanthi Nilayam est le darshan, où Sai Baba émerge deux fois par jour de ses appartements adjacents au temple principal pour marcher parmi les milliers de dévots assis sur un dur plancher de marbre. Les mains s'avancent pour toucher ses pieds et pour lui donner des lettres de supplication. À l'occasion, il s'arrête, afin de donner sa bénédiction ou pour "matérialiser" de la vibhuti dans une main tendue. C'est durant le darshan que Sai Baba, à partir de critères inconnus, qu'il choisit des gens parmi la foule pour des entrevues privées. Lorsque j'ai visité l'ashram il y a de cela trois ans, j'y faisais des recherches pour un livre sur l'Inde, ma demande faite auprès du secrétaire pour avoir une entrevue avec Sai Baba fut refusée poliment ; une lettre formelle de demande auprès de Baba lui-même fut ignorée. Toute la semaine qui suivit je me suis assis sur le plancher de marbre du temple en attendant d'être choisi pour une entrevue. Je ne l'ai jamais été. Il y a des dévots qui doivent attendre pendant des années.

Il est difficile de décrire l'atmosphère de fervente dévotion qui remplit l'ashram. Les dévots disent qu'ils ont été "appelés" dans des rêves, des visions ou de curieux événements de syncrétisme, impossibles à expliquer et trop puissants pour les ignorer. Les gens manœuvrent pour avoir des faveurs et une position, transformant sans cesse les histoires de ses miracles et pouvoirs. C'est un catalyseur pour toute émotion imaginable - piété, espoir, désespoir, jalousie, et orgueil. Une personne décrit ceci comme étant "du métal que l'on fond - toutes les scories remontent sur le dessus".

Il est inévitable que pour une personne aussi puissante comme l'est Sai Baba qu'il y ait à son sujet de roulement d'allégations de tromperies, de fraudes et pire encore. Cela circule depuis des années mais il a prouvé de façon remarquable comment il restait immunisé face à ces controverses, les accusations ne faisant rien pour diminuer la croissance de ses disciples et l'estime qu'on lui porte. Mais tout ceci, apparemment, va bientôt changer.

Depuis quelques mois, un tempête extraordinaire d'allégations est apparue - stimulée par un document appelé "The Findings" (Les découvertes), compilé par un ex dévot Anglais nommé David Bailey - qui menace de bouleverser les fondations mêmes du saint empire de Sai Baba. Sai Baba peut bien représenter une ancienne tradition de croyances, mais l'instrument d'accusations contre lui est bel et bien moderne. "The Findings" furent à l'origine publiés sous forme de documents et ont rapidement trouvés leur chemin sur l'Internet, où ils sont devenus un catalyseur de débats intenses parmi les groupes de discussion à savoir si Sai Baba est véritablement divin ou, comme un dévot désenchanté le décrit, un "dangereux pédophile".

Ce qui était vraiment inattendu dans toute cette histoire c'est que les accusations portées contre Sai Baba soient venues d'un pianiste de concert jovial et rondelet de Llandudno.

David Bailey devint dévot de Sai Baba en 1994, à l'âge de 40 ans, attiré par un intérêt à la réputation du guru en tant que guérisseur spirituel.. "Je ne pouvais pas le voir en tant que Dieu", dit Bailey, "mais j 'ai pensé qu'il pouvait être un grand saint homme ayant certains dons."

Extraverti, Bailey devint rapidement une figure omniprésente et populaire parmi les dévots. Il a voyagé à travers le monde, parlant et performant dans des rencontres et visitait l'ashram en Inde trois ou quatre fois par an, jouant souvent durant les darshans et enseignant la musique aux élèves du Collège Sathya Sai Baba. Au cours de ces quatre années Bailey prétend avoir eu plus de 100 entrevues avec Baba. À l'instigation de Baba, Bailey s'est marié avec une disciple de Baba, et ensemble ils ont édité un magazine dont le but était de propager les enseignements de Sai Baba. Mais plus il se rapprochait de Sai Baba, m'a dit Bailey, plus ses doutes se multipliaient. Les "miracles", conclut-il, étaient en fait "des trucs de second ordre", les guérisons un mythe, et les pouvoirs de Baba qui consistaient à "voir dans les pensées et la vie des gens" n'étaient qu'une brillante façon d'utiliser les informations glanées auprès d'autres sources.

La foi déclinante de Bailey fut finalement détruite lorsque des étudiants du collège vinrent à lui prétendant avoir été abusés sexuellement par le guru. Ils ont dit, "S'il vous plaît, monsieur, pourriez-vous retourner en Angleterre et nous aider." Ils étaient incapables de dire cela à leurs parents parce qu'ils avaient peur qu'on ne les croit pas, et qu'ils craignaient pour leur sécurité personnelle.

En état de choc dû à ces allégations, Bailey examina sérieusement son association avec Sai Baba et commença à assembler un dossier de preuves venant d'anciens dévots de partout dans le monde. "The Findings" sont une chronique d'illusions brisées. Elle contient des allégations de falsifications, de trucages et d'irrégularités financières dans les fonds qui ont servi à l'hôpital ainsi que dans le projet de Sai Baba consistant à pourvoir en eau les villages autour de l'ashram, qui ne sont, pour la plupart du temps, qu'utilisés pour mousser sa munificence.

Quelques-unes de ces allégations ont été mises à jour déjà. Un ancien dévot, B. Premenand, s'est fait une quasi carrière seulement en débusquant Sai Baba à travers sa publication, "The Indian Skeptic". Mais les accusations contenues dans "The Findings" sont d'un tout ordre d'idées et d'une portée beaucoup plus grande. Ils incluent des témoignages mot pour mot d'abus d'ex dévots de Hollande, Australie, Allemagne et Inde. Conny Larsson, un acteur suédois bien connu, dit que non seulement Sai Baba a fait des avances homosexuelles envers lui mais qu'à lui aussi des jeunes disciples mâles lui ont dit que le guru avait fait des avances sur eux également.

En avril, Glen Meloy - un consultant en administration à la retraite et un éminent dévot californien actif pendant 26 ans - a reçu une lettre d'une femme américaine qui avait lu les "Findings" sur Internet. Son fils de 15 ans, dit-elle, avait aussi été abusé. Un témoignage de quatre pages provenant du garçons lui-même était inclus dans la lettre, corroborant les multiples abus sexuels.

Meloy a lancé sa propre campagne sur Internet afin de répandre ces allégations. Les résultats de ceci furent énormes.

Il y a eu une foule de démissions de différents groupes Sai Baba partout en Occident. En Suède, le groupe central a fermé, ainsi qu'une école basée sur le programme d'Éducation des Valeurs Humaines conçu par des éducateurs du collège à Puttaparthi.

Par contre, la réponse d'autres dévots en fut d'incrédulité et de dénigrement. "Sai Baba", dit Bailey, "n'est qu'un maniaque sexuel qui est en voyage d'ego pour avoir plus d'argent et plus de pouvoirs. Il est un pur escroc." "Non, disent les autres, Sai Baba est Dieu."

La famille Young ne figure pas parmi les "Findings", mais l'histoire racontant comment ils sont venus à Sai Baba n'est pas atypique. Au début des années '70, Jeff s'était intéressé à la "quête spirituelle", initialement à travers les drogues psychédéliques, ensuite par le yoga et la méditation. Il prit connaissance de l'existence de Sai Baba par un ami, et en 1974, à l'âge de 18 ans, visita l'Inde pour la première fois, guidé, dit-il, par "un intense et brûlant désir de sentir et d'expérimenter Dieu".

Les enseignements de Sai Baba, dit-il, l'ont heurté en plein cœur. "La première chose que j'ai lue par lui fut, il n'y a qu'une seul caste, la caste de l'humanité ; il n'y a qu'un seul langage, le langage du cœur ; il n'y a qu'une seule religion, la religion de l'amour ; il n'y a qu'un seul Dieu, et il est omniprésent. Ceci faisait beaucoup de sens pour moi. Il ne proclamait pas faire partie d'aucune religion. Ce n'était qu'à propos de l'amour."

Un mois avant de quitte l'Inde, Jeff eut un rêve dans lequel, dit-il, il était dans une file, attendant de voir Sai Baba. Baba passa près de lui, puis se tourna, regarda par-dessus son épaule, fit un clin d'œil et prononça le mot "parle". Lors de sa première journée en Inde, il s'assit dans la file au moment où Sai Baba passait tout près. "Ensuite il s'arrêta et regarda au-dessus de son épaule, me fit un clin d'œil et me dit "Parle" - exactement comme il l'avait fait dans mon rêve."

Trois semaines plus tard, Jeff eut une entrevue privée avec Sai Baba. "Et je me souviens avoir senti une paix que je n'avais jamais sentie auparavant ; je me suis senti aimé comme je ne m'étais jamais senti aimé auparavant."

Il retourna à Los Angeles où il vécu en communauté avec d'autres disciples de Baba. Il rencontra Carrie, dont l'enfance fut caractérisée par des abus parentaux, et son adolescence par l'abus de drogues. Elle devint également une dévote de Sai Baba, plaçant ainsi son passé trouble derrière elle. Ils se sont mariés, déménagèrent dans le Midwest et commencèrent à élever une famille. À travers les années, ils rendirent visite de temps en temps à Sai Baba. Ils fondèrent une communauté, firent l'école à leurs enfants à la maison selon ses enseignements, s'efforcèrent de mener une vie pure et auto-disciplinée basée sur les principes de "Love All, Serve All", (Aimez tout le monde, Servez tout le monde).

Ensuite, en 1995, les choses commencèrent à changer. Leur fils Sam, qui était alors âgé de 16 ans, visita l'ashram avec un ami de la famille et fut désigné afin d'avoir une entrevue privée avec Sai Baba. Dix-huit mois plus tard, les Young retournèrent à Puttaparthi ; encore une fois Sai Baba désigna Sam et l'appela ainsi que sa famille pour une entrevue. "Il fit grand état de notre groupe", dit Jeff. "Il matérialisa une bague pour mon fils. Il dit à tout le monde que Sam avait été un très grand dévot de Shirdi Sai lors d'une vie antérieure - ainsi déversa-t-il ses paroles."

Durant cette visite, les Young furent appelés sept fois en entrevue, pendant que Sam lui avait eu 20 rencontres privées. La famille se sentait privilégiée. Baba conseille Jeff sur ses affaires, signa les papiers légaux concernant leur communauté et leur a dit qu'un jour il viendrait chez eux. Il matérialisa des bagues, montres, bracelets, leur donna des robes et le lungi de soie qu'il portait sur la peau. "Les gens disaient, que ce passe-t-il avec ces gens ?", dit Jeff. "Un homme m'a réellement dit, lorsque je mourrai j'aimerais me réincarner et être vous. Et Baba nous disait de ne pas parler beaucoup, de rester silencieux, parce que cela causait de la jalousie chez les autres - ce qui est vrai."

L'année suivante, la famille retourna à Puttaparthi trois fois. À chaque occasion ils avaient la chance d'avoir deux ou trois entrevues. Sam en avait le double. "Nous n'avions aucune idée de ce qui se passait," dit Jeff. "Nous le demandions à Sam, et nous disait que Baba parlait de son avenir. Chaque jour il recevait une autre montre, une bague. Nous pensions que peut-être notre fils méritait tout cette attention parce qu'il avait tellement fait pour Shirdi Sai. Nous ne faisions que rationaliser les choses. Vous pouvez tout rationaliser."

En 1995, Sam vint vers son père. Lors d'une entrevue privée, dit-il, Sai Baba avait "matérialisé" une huile dans sa main, déboutonna les pantalons de Sam et frotta ses organes génitaux. Jeff dit à son fils qu'il avait eu une expérience similaire lorsqu'il rencontra Sai Baba pour la première fois à 18 ans. "J'ai dit à Sam, qu'as-tu pensé de tout cela ? Il dit qu'il n'avait pas senti qu'il y avait quoique ce soit de sexuel à propos de cela ; c'était comme si Sai Baba faisait ce qu'il devait faire. Et j'avais eu une semblable expérience. Un médecin examine un garçon. J'ai pris cela comme une forme de guérison." Dès lors, Sam arrêta de parler de ses expériences.

Ce qui s'est réellement passé fut ceci : de l'onction avec l'huile, me dit Sam, les avances de Sai Baba progressèrent et devinrent plus abusives et forcées. Sai Baba, a-t-il dit, l'a embrassé, l'a caressé et s'est essayé à le forcer à avoir des relations de sexe oral avec lui, expliquant que cela était pour la "purification". À presque toutes les occasions, Sai Baba lui avait donné des cadeaux de montres, bagues, babioles et argent comptant, au total environ 10,000$. Il lui avait dit de ne rien dire à ses parents.

Mais pourquoi donc Sam a-t-il continué d'aller en entrevue, et de ne rien en dire ? À partir de sa naissance, dit-il, il a été élevé de telle sorte qu'il croyait que Sai Baba était Dieu. "C'était mon but, toute ma vie, d'être reçu en entrevue et d'avoir une conversation avec Sai Baba pour parler de ma vie. Lorsque j'en avais une, ma mère était tellement heureuse perdue dans la foule, et ensuite je voyais ce qui m'attendait réellement à l'intérieur pour moi…je réfléchis et je pense, peut-être que ceci est pour l'amour, et qu'il veuillent en faire l'expérience avec moi, mais je ne veux pas de ceci."

Lorsque Sam demanda à Baba pourquoi il faisait cela, il lui répondit que c'était parce que Sam était " un dévot spécial - que c'était une grande bénédiction". Lorsque Sam essayait de lui résister, dit-il, Baba menaçait de ne plus appeler ses parents en entrevue. " Je sentais que j'étais obligé envers mes parents, nos amis, tous les milliers de gens qui étaient assis dehors et qui attendaient d'être dans la même position dans laquelle j'étais, ne sachant réellement ce qui s'y passait.

Et ensuite, toute l'affaire résidait dans le concept qu'il était Dieu, dès le début, alors lorsqu'il dit, ne le dis pas à personne…"


En fait, Sam l'a dit à quelqu'un. Il se confia sur ces choses à deux autres adolescents Américains qui étaient des étudiants au collège de Puttaparthi. Ils avaient également eu des expériences similaires. "Ils justifièrent cela en tant qu'expérience divine. Mais nous n'en parlions pas tellement à cause de l'idée qu'il était omniscient, qu'il savait ce dont nous parlions et ce qui se trouvait dans nos têtes.

"Si vous écoutez ce que Baba dit, il parle de prendre en charge votre vie, et je réfléchissais," Je suis avec toi, alors tout doit être très bien. "Mais il me faisait des choses que je ne voulais pas accepter, et je le laissais faire."

En 1998, selon Sam, Sai Baba a essayé de le violer. L'année suivante, la journée avant que la famille aille à Puttaparthi, il dit à son père qu'il ne voulait pas voir Sai Baba seul, sans spécifier pourquoi. Jeff sentit que quelque chose allait de travers : " Je lui ai dit, tu dois toujours être en accord avec ta conscience. La famille ne s'en fait pas même si elle ne devait jamais plus avoir d'entrevue."

À Puttaparthi, Sam fut appelé en entrevue privée encore une fois. Lorsque Sai Baba s'est essayé pour avoir des relations de sexe oral avec lui, Sam sortit de la pièce pour la dernière fois, même si cela lui a pris des mois avant de ramasser son courage et de l'avouer à ses parents. Jeff dit que cela a pris des semaines pour traiter l'information qu'ils avaient entendu. " Nous savions que Sam disait la vérité, mais je continuais à me demander intérieurement, qu'est-ce que cela pouvait bien vouloir dire ?

Les Young ont contacté une personne bien connue dans l'organisation américaine Sai Baba. "Il a dit que cela devait être une sorte d'épreuve", dit Jeff, "et, pour un instant, nous nous sommes sentis mieux."

Ensuite Dr Michael Goldstein, l'homme en charge de toute l'organisation Baba en Amérique, prit l'avion en provenance de la Californie afin de les rencontrer. "Il a dit, nous devons parler à Baba de cette affaire ; les mots ne sont pas suffisants ; la foi doit être restaurée." Goldstein s'envola immédiatement vers l'Inde. Il revint pour dire au Young que Sai Baba lui avait dit qu' "il était pur", et que Goldstein acceptait cela. Il demanda à Jeff si son fils hallucinait. Les Young ne parlent plus à Goldstein.

J'ai essayé de contacter Goldstein en Amérique, mais on m'a dit qu'il était parti à Puttaparthi. Cependant, un autre dévot senior, un administrateur pour la Société Sathya Sai Baba d'Amérique, a retourné mon appel. Jerry Hague m'a dit que lui et son épouse étaient des dévots depuis 25 ans. Il m'a dit qu'il était profondément choqué de ces allégations et ne pouvait même pas commencer à les comprendre.

"Tout ce que je sais dans le plus profond de mon cœur c'est que Swami est le plus pur parmi les purs, et que tout ce qu'il fait est pour le bien-être le plus élevé de chacun. Si d'autres personnes sentent autres choses, c'est ce qu'ils sentent. C'est un mystère pour moi, et c'est ainsi que je le laisse. Je sais tout simplement ce que j'ai trouvé dans mon cœur."

Ce refus - Sai Baba est Dieu, Dieu ne fait pas ces choses - fut un thème répété par d'innombrables autres dévots avec qui j'ai parlé en Amérique et en Grande-Bretagne. Une femme m'a dit que les allégations étaient "complètement inconsistantes" avec l'expérience qu'elle avait de Sai Baba depuis plus de 30 ans. D'autres disaient qu'ils étaient convaincus que cela résultait d'"hallucinations", ou "de projections" de jeunes garçons et d'hommes vivant une période difficile avec leur sexualité.

Explorant l'Internet, je suis parvenu à un site appelé "The Sai Critic", établi par quelques dévots afin de répondre aux "Findings" et "conseiller" ceux dont la foi avait pu être ébranlée face à ces allégations. Les auteurs anonymes de ce site incitent les dévots à croire seulement leurs propres expériences et citent un aphorisme de Sai Baba : "Lorsque le doute entre par la porte de devant, la foi sort par la porte de derrière. Gardez vos portes fermées."

Répondant aux allégations d'abus sexuels, les auteurs affirment que parce que "Sai Baba est une incarnation divine, on ne peut lui attribuer des motifs sexuels humains, ni faire son interprétation à la lumière d'une expérience sexuelle humaine." En d'autres mots, parce que Sai Baba est divin, peu importe ce qu'il fait est au delà de toute compréhension et de toute responsabilité.

Une des personnes citées dans les "Findings" est Dr D. Bhatia, anciennement à la tête de la banque de sang de l'Hôpital super spécialisé Sathya Sai, qui, dit-on, a eu de longues relations sexuelles avec Sai Baba. Bhatia a démissionné de son poste à l'hôpital en décembre 1999 et est maintenant administrateur à l'hôpital de New Delhi.

Rejoint par téléphone, Bhatia a dit qu'il est devenu un dévot de Sai Baba en 1971, à l'âge de 20 ans, et qu'il avait eu des relations sexuelles avec Sai Baba pour un total de 15 ou 16 ans. À cette époque, dit-il, il était aussi au courant que Sai Baba avait des relations avec "beaucoup beaucoup" d'étudiants du collège et de l'école, et avec des dévots d'outremer.

Bhatia dit qu'il n'avait jamais questionné Sai Baba sur sa conduite, ou sur l'explication de Baba que c'était une "activité divine". "La dévotion", dit Bhatia, "n'a pas besoin de justification. Dans ma philosophie de vie, tout ce qui est bon et tout ce qui est mauvais appartient à Dieu. Ceci est ma croyance, et c'est pourquoi peu importe ce qu'il fait, ne m'affecte pas en ce sens." Était-il en train de dire qu'il continuait à croire que Sai Baba est Dieu ? "Oui."

Comme à bien des gens à qui j'ai parlé, Isaac Tigrett se décrit lui-même comme étant un chercheur spirituel. Parmi les dévots, Tigrett est reconnu comme l'homme ayant construit l'hôpital de Sai Baba. Cofondateur de la chaîne de restaurants Hard Rock Cafe, Tigrett a vendu ses parts dans cette affaire au début des années '90 et a fait un don de $ 20 millions afin de construire le super hôpital hyper-spécialisé Sathya Sai. Il a ensuite fondé une autre chaîne de clubs/restaurants en Amérique, le "House of Blues", et vit présentement à Londres, où il met en place le "Spirit Channel", un site Internet dédié à l'exploration des enseignements spirituels.

Un homme au gabarit large dans sa cinquantaine, habillé d'un complet immaculé, Tigrett a l'apparence pleine d'ostentation au charme expansif d'un imprésario de théâtre. Nous nous sommes rencontrés à son club de Londres. Tigrett a bu de la bière et a fumé des cigarettes ; un homme, semble-t-il, bien ancré dans la réalité du monde.

Selon des standards normaux, l'histoire de Tigrett sur sa rencontre avec Sai Baba est extraordinaire ; d'après les standards sur les histoires que nous entendons sur Sai Baba, cela semble presque banal. Né en Amérique du Sud et élevé dans la religion baptiste, Tigrett a toujours eu une curiosité sur les choses spirituelles. En 1974, m'a-t-il dit, il voyageait en Inde à l'affût de gurus. Lorsqu'il prenait un matin son petit-déjeuner dans une salle à dîner d'un hôtel dans le nord de l'Inde, il entendit une voix qui disait clairement, "Tu es enfin venu ; je t'attendais." Se retournant, il a vu la photographie de Sai Baba sur le mur, dont il n'avait jamais entendu parler et dont il ne connaissait rien.

Il se rendit immédiatement à l'ashram de Sai Baba. C'était jour de festival, se rappelle-t-il ; 5,000 personnes étaient rassemblées pour le darshan. "Il est venu directement vers moi et m'a dit, "Tu es enfin venu ; je t'attendais." Sai Baba a ensuite "matérialisé " de la vibhuti dans la main de Tigrett. "Il a dit, attends ici ; nous allons faire beaucoup de choses ensemble."

Tigrett a dit qu'il était "très cynique et très soupçonneux. Je crois au guru intérieur - suivre votre cœur - non pas au guru extérieur. Il ne m'était jamais arrivé de penser que ce serait une sorte de maître extérieur qui m'amènerait à poursuivre le cheminement spirituel."

Durant les 15 années qui suivirent, cependant, il se trouva impliqué dans une panoplie d'"enseignements étonnants" qu'il attribua à Sai Baba. Le plus extrême est arrivé en 1976. C'était une époque où ses doutes concernant Sai Baba étaient à leur plus haut. Conduisant une Porsche Turbo à travers les collines d'Hollywood après une fête tardive, il sortit de la route à 80m/h et fonça dans une barricade dans un ravin de 200 pieds. "Je n'avais pas ma ceinture de sécurité. Sur le moment je savais que j'allais mourir et je pouvais sentir une pression sur mes épaules, j'ai regardé et, il m'a semblé que Sai Baba était assis à côté de moi avec ses bras autour de moi. L'automobile toucha terre et capota plus d'une douzaine de fois avant d'atterrir à l'endroit, totalement démolie. Et il n'y avait aucune égratignure sur moi. Je pensais, ceci ne peut pas être vrai. Était-ce lui ? Était-ce mon imagination ? L'avais-je appelé et, d'une façon ou d'une autre, avais-je créé cette croyance en mon esprit qu'il était bien là ?"

Le jour suivant, Tigrett s'envola vers l'Inde, "pour le remercier". Tigrett passa trois mois assis au darshan, "et il ne m'a même pas jeté une seule fois un regard". Cela prendra encore 13 autres années, dit-il, avant que Sai Baba le convoque finalement pour une entrevue.

"J'ai dit, pourquoi ai-je dû attendre si longtemps ? Il répondit, "Gros ego."

Ces choses étaient difficiles à expliquer, dit-il, impossible à expliquer. Il ne croit pas que Sai Baba soit Dieu. Il ne se décrira même pas lui-même comme étant un dévot. "Mais pour moi, c'est aussi simple que cela : quoique j'ai pu expérimenter a changé ma vie ; quoiqu'il ait pu faire m'a maintenu sur le chemin spirituel, ce pourquoi je lui suis à jamais reconnaissant. Et je ne serai jamais capable de renier cette expérience ; rien de ce qu'il puisse faire ne pourrait changer cela."

Comment donc Tigrett pouvait-il ranger ses expériences de Sai Baba avec les allégations d'abus sexuels ? "Je ne peux pas. Il y a deux camps ici. Êtes-vous contre Sai Baba ou êtes-vous pour lui ? Je crois que si vous dites que vous êtes pour lui, vous êtes seulement en déni, disant que ces choses ne sont pas arrivées, que ce sont des histoires inventées. Je ne crois pas cela. Je crois que les allégations sont vraies. Et si vous êtes contre, vous êtes supposé prendre votre épée et le tuer. Je ne suis dans aucun de ces camps. Pour moi, la seule relation qui ait de la valeur avec lui est personnelle, et chacun doit prendre une décision personnelle basée sur cela."

Pour ce qui est d'essayer de comprendre Sai Baba, Tigrett dit qu'il a abdiqué il y a de cela plusieurs années. "Je sais qu'il matérialise des objets, parce que je l'ai vu le faire. Et je sais qu'il truque des matérialisations, parce que je l'ai également vu faire cela. Je ne sais pas pourquoi. Peut-être est-ce seulement un jeu."

Tigrett dit qu'il croit que tout ce que Baba fait est "un enseignement". Peut-être, dit-il, le scandale qui prend de l'ampleur est-il également un enseignement, une façon de forcer les dévots à arrêter de vénérer la forme de Sai Baba, et, à la place, de vénérer la divinité à l'intérieur d'eux-mêmes. "Je me souviens qu'il m'a dit il y a de cela trois ou quatre ans que les gens le quitteraient en masses. Il a dit, "Je ne suis pas une nouvelle religion ; je ne suis pas une personnalité culte. Les gens viennent ici pour voir des miracles, pour prendre des vacances, et ils ne se soucient aucunement des enseignements. " Il a dit ceci plusieurs fois, tout est dans le fait de suivre son guru intérieur, non pas Sai Baba."

Tigrett est revenu à l'ashram plusieurs fois depuis, dit-il, mais il n'a jamais plus été appelé en entrevue. Il prit une gorgée de sa bière. Pour ceux qui vénèrent Sai Baba en tant que Dieu, dit-il, les allégations "doivent être totalement dévastatrices. Parce qu'ils ont perdu leur dieu, leur maître. Mais je ne l'ai jamais regardé en tant que Dieu." Comment donc décrirait-il Sai Baba ? Tigrett bougea la tête : "Comme une totale et entière énigme."

Parmi les plus remarquables aspects de cette controverse il y eut le rôle d'Internet. Il y a de cela dix ans déjà, il est très douteux que les allégations contre Sai Baba auraient cheminer si loin et si vite. Dans un discours donné en octobre 1999, Sai Baba divulgue à ses dévots que "Swami n'a rien à voir avec Internet [sic]. Non seulement maintenant, mais dans le futur également [sic]. Vous ne devriez pas vous complaire dans ce genre d'activités." Mais dans la réalité de cyberespace, les accusations, les justifications et les dénigrements continuent à se multiplier. Côtoyant les histoires sensationnelles d'abus, il y a des récits de miracles, de guérison et d'appels de la foi.

Conny Larsson a établi un groupe de support pour ceux revendiquant des abus par Sai Baba, et dit qu'il reçoit quelques 20-30 courriels quotidiennement en provenance de victimes "appelant à l'aide. Vous ne pouvez pas laisser ces gens dans le désert."

En Amérique, la campagne organisée par Glen Meloy a bombardé de lettres sur les allégations les sénateurs, la Maison Blanche, le FBI et les journaux indiens. Le succès le plus visible de la campagne est venu en septembre lorsque l'UNESCO s'est retiré du co-parrainage et de sa participation à une conférence sur l'éducation à Puttaparthi, exprimant "ses profonds regrets" concernant les allégations d'abus sexuels.

Meloy essaie également d'amener en justice les leaders des groupes Sai en Amérique qui, dit-il, ont "conspiré afin de camoufler cette affaire".

Dans ce pays, des démarches similaires ont été faites à la "Charity Commissioners" (il y a une branche britannique de cette organisation enregistrée dans ce pays) et au "Home Office", leur demandant d'émettre un avis au public afin que les visiteurs allant en Inde soient au courant des allégations, et démontrant que la négligence pour prévenir les gens constituerait une brèche aux obligations gouvernementales internationales selon les droits de la personne des Nations-Unies.

Sai Baba n'a jamais été accusé d'aucun crime, sexuel ou autre durant toutes ces années où toutes ces allégations faisaient rage. Et sa position portée aux nues en Inde l'a gardé isolé sans crainte de quelque enquête publique que ce soit.

En juin 1993 il fut l'objet d'une apparente tentative de meurtre lorsque cinq jeunes hommes s'infiltrèrent dans sa résidence privée. Deux de ses assistants personnels furent poignardés à mort et quatre des assaillants furent tués à coup de fusil par la police "en légitime défense". Sai Baba est présumé avoir pris la fuite en sortant à toute vitesse de sa chambre dont le système d'alarme avait été activé. Dans un discours qui a suivi ces événements, il a dit que l'attaque avait été causée par la "jalousie". Dr Bhatia m'a dit qu'il croyait que l'attaque était reliée aux activités sexuelles de Baba. Le guru ne fut jamais interrogé par la police au sujet de cette attaque. La presse indienne souleva des questions évidentes : si Sai Baba est omniscient, pourquoi n'avait-il pas venu voir l'affaire ?

Parmi les anciens dévots il y a un effet de choc, de trahison, de colère - une soif, sinon une revanche, pour qui est responsable." Nous savons que beaucoup de victimes ont été physiquement molestées, m'a dit Glen Meloy, mais en réalité, tous les anciens dévots ont été spirituellement violés parce que nous avons décidé de croire que cet homme était le plus grand. Je le considérais certainement comme étant le Dieu des dieux, le créateur de toute la création, mon ami, mon tout. L'intense désir que j'ai maintenant pour le dénoncer est directement proportionnel à la somme de dévotion que je lui ai donnée."

Meloy a dit qu'il a déchiré toutes les photographies qu'il avait de Sai Baba dans sa maison au moment même où il entendit parler de ces allégations. Il était au courant que d'anciens dévots vendaient leurs maisons, déterminés à épurer la moindre association qu'ils avaient pu avoir avec Sai Baba dans leur vie.

"Nous avions complètement donné notre pouvoir. Et maintenant nous pouvions regarder en arrière et voir ce que nous avions fait. Vous pleurez et vous vous demandez comment diable cela a-t-il pu bien arriver?"

Comment cela arrive-t-il ? Dans un monde imparfait, nous avons faim pour au moins un peu de perfection, un symbole de bonté inéluctable. Le guru devient l'expression du rêve.

Assis au restaurant dans une petite ville habitée du Midwest, Jeff Young se luttait pour comprendre ce qui l'avait bien pu amener à croire qu'un guru indien pouvait être Dieu. Se rapportant à sa première entrevue - "Je me souviens avoir senti une paix comme je ne l'avais jamais sentie auparavant" - il en vient à penser qu'il était tout simplement bercé d'illusions. "Il y avait tellement de gens qui désiraient avoir une entrevue, je me suis convaincu moi-même qu'il était tellement extraordinaire et spécial d'en avoir une, que je devais être béni entre tous car j'avais été choisi."

Maintenant, dit-il, il pouvait voir comment il avait ignoré toutes les contradictions, fabriqué des explications pour toute ce qui ne marchait pas. "Je savais que les matérialisations étaient des trucages. Je m'assoyais là et le regardait sortir des objets de sous un coussin. C'était d'une évidence totale. Et il voyait qu'on le voyait et il en riait en quelque sorte. Mais je pensais, il me mets tout simplement à l'épreuve pour voir si je suis concentré sur l'amour et non les choses extérieures. Parce que Baba dit, l'amour est mon incertitude. Vous ne serez jamais capable de comprendre l'avatar."

Regardant en arrière, dit-il, lorsque Sam lui a finalement parlé des abus sexuels, il ne trouva pas cela difficile d'y croire. "J'ai réalisé que j'étais vraiment au courant de tout cela depuis un bon bout de temps mais je ne le savais pas." Jeff bougea la tête. "Cela est tellement profond dans mon esprit. Vous vous demandez, comment des millions de personnes peuvent-elles être dans l'erreur ?"

Lorsque Sam a dit à Jeff et Carrie la vérité à propos de ses rencontres avec Sai Baba, Jeff a dit, que tous les deux ont entouré de leurs bras leur fils. "Nous avons dit, c'en est fait ; nous ne nous en faisons pas si nous ne voyons jamais plus Sai Baba. Il nous a dit que c'était le jour le plus heureux de sa vie."

Depuis qu'ils ont quitté Sai Baba, dit-il, la famille a essayé de trouver une base pour leur foi au plus profond de leurs cœurs. Il croit qu'avoir suivi les enseignements de Sai Baba pendant 23 ans a fait de lui une personne plus humble, honnête et un être humain bon. "Ma femme le déteste pour ce qu'il a fait à notre fils. Je me sens trahi. Je crois que c'est méprisable. Mais en regardant ma vie je dois dire que, honnêtement, je ne regrette rien de quoi que ce soit qu'il soit arrivé et que j'ai grandi malgré tout cela." Trouver Sai Baba et ensuite le mettre de côté "je suis plus heureux maintenant que je ne l'ai été dans toute ma vie."

Sam dit que cette expérience l'a amené à voir sa vie dans une "toute autre perspective". Cela m'a fait prendre conscience que toute ma vie je l'ai passé à suivre un autre être humain, essayant de faire ce qu'il disait. "Libéré de la prison des fausses croyances, dit-il, j'essaie tout simplement de vivre à la hauteur de mes aspirations."

Qu'il soit divin ou une "force démoniaque démente", comme Glen Meloy le décrit présentement, ou simplement le fakir le plus accompli et l'escroc le plus confiant, Sai Baba n'a rien dit publiquement à propos des allégations contre lui. Lorsque le Telegraph Magazine est entré en contact avec K. Chakravarthi, le secrétaire de l'ashram de Puttaparthi, il a dit, "Nous n'avons pas de temps pour ces choses. Je n'ai rien à dire" et raccrocha.

Le traducteur anglophone principal de Sai Baba, Anil Kumar, fut plus avenant. "Tout grand enseignant religieux, dit-il, a fait face aux critiques durant sa vie. De telles allégations ont été attribuées à Sai Baba depuis son enfance, "mais avec chaque critique il devient de plus en plus triomphant". Kumar a dit qu'il voyait cette controverse comme faisant partie du plan divin [de Sai Baba]. "C'est une rizière avec beaucoup de pelures autour du riz. Éventuellement, toutes les parties non désirées partiront afin de laisser la vraie substance à l'intérieur."

Jerry Hague, l'administrateur américain, semble partager cette opinion. Sai Baba, m'a-t-il dit, ne dira jamais quoique ce soit à propos de tout cela. "Pourquoi le ferait-il ? C'est la manière humaine. Ce n'est pas sa manière.

"Vous pouvez essayer et écrire à propos de ceci", m'a-t-il prévenu, "mais vous ne serez pas capable de faire du sens intellectuellement parlant avec ça. Personne le peut."

"Des personnes ", dit Jeff Young,"lorsque nous leur racontons notre histoire, laissent tomber Sai Baba comme une roche. Quelques-uns ne veulent tout simplement pas en entendre parler. Et d'autres écoutent tout et disent, eh bien, il est Dieu ! C'est un examen. Je ris lorsque j'entends cela. Parce que pour moi, faire l'examen est avoir le courage de me tenir debout sur mes deux pieds et de dire que ce n'est pas acceptable. "

C'est une chose curieuse, dit Young, mais lorsqu'il apprit la nouvelle de son départ à ses amis et ses camarades dévots en rapport avec Sai Baba, il avait la sensation - "et je me sens encore ainsi" - que Baba se "tenait près de son épaule, disant, "Bon garçon, tu fais du beau travail."

Quelques noms ont été changé.

Recherche additionnelle faite par Chloe Veltman.

 




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