J'arrive à l'instant de l'hôtel Delta, le samedi 23 mars 1996, où se tenait une soirée d'information du mouvement raélien. J'hésite à l'emploi de tel ou tel mot qui pourrait être trop négatif, au sens à donner à mon propos... Avant d'enchaîner, je veux préciser mes sentiments. Ainsi, j'espère que mes critiques seront perçues non pas comme venant d'un inquisiteur en puissance, mais simplement de quelqu'un qui ne partage pas ces croyances et qui ose formuler ses craintes.
Je suis encore imprégné de la merveilleuse interprétation que les raéliens ont faites de la chanson Espérance de Pierre Bertrand. Les différents refrains, chantés dans plusieurs langues et par des personnes de cultures différentes, donnaient la mesure aux valeurs de tolérance propagées. Aussi, je ris encore de la prestation humoristique de ce disciple raélien qui caricaturait l'image qu'il peut donner et qui savait passer son message avec des jeux de mots intelligents. Je pense à ce spermatozoïde qui commit tout un génocide en gagnant la bataille de l'ovule et qui fut mis en CELLULE pour son crime... Encore, il me reste un profond respect des différents témoignages de disciples convaincus et rayonnants qui ont ponctué la soirée. De plus, comme intervenant auprès des jeunes, j'ai été touché par l'implication d'une dizaine de jeunes lors d'un « rap » dynamique. Finalement, le « guide national », Monsieur Chabot, a conclu la soirée en exposant trois points fondamentaux de la croyance raélienne : la création de la vie par les extra-terrestres, les valeurs présentes dans leurs croyances et l'espérance qui les anime. Voilà un peu ce que j'ai ressenti et ce que j'ai retenu de cette rencontre.
Le début de mon propos est tout à fait honnête. D'ailleurs, je sens le besoin de justifier mes intentions de paix, car on semble mal prendre les critiques. Comme croyant, je fais face moi aussi à des gens qui ne partagent pas mes croyances sans pour autant comparer ma situation à la persécution des premiers chrétiens. Que je sache, aucun disciple de Raël n'a été tué ni torturé pour sa foi dans les extra-terrestres. Si je me trompe, sortez-moi de mon ignorance ! Je dis ceci, car deux responsables sont revenus sur ce sujet : les persécutions des premiers chrétiens, des juifs lors de la deuxième guerre mondiale et de ceux qui propagent des idées contraires à celles admises par leur époque. Bref, les raéliens semblent se plaire dans le rôle de victime. C'est peut-être cette peur de la critique qui a conduit le guide national à museler un participant de la salle qui voulait simplement répondre à une question posée par ce conférencier. Ce dernier a poursuivis son discours en disant de ne pas répondre trop vite et de bien réfléchir. Voilà pour une première remarque.
Je suis aussi indisposé par le traitement qu'ils font à la foi chrétienne. Ne pas être chrétien est une chose, réduire le christianisme à la notion du péché originel qui susciterait des blocages affectifs pour mieux exalter les plaisirs libérateurs de la sexualité en est une autre. Le problème, c'est que les exemples cités sont toujours vrais... Les erreurs commises par les différentes dénominations chrétiennes au sujet du plaisir sexuel - entre autres erreurs - sont tout à fait réelles et historiquement vérifiables. Je peux même renchérir en citant Saint-Bernard qui a dit au IVème siècle : «... nous qui avons quitté les rangs du peuple, nous qui avons renoncé aux richesses et à l'éclat du monde pour l'amour du Christ et qui, pour posséder le Christ, avons foulé aux pieds comme du fumier tout ce qui charme les yeux, tout ce qui flatte les oreilles, toutes les jouissances de l'odorat, du goût, du toucher...» Mais après avoir relevé ce dérapage, il faudrait peut-être parler de Jean-Luc Hétu, de Françoise Dolto, de Jean Monbourquette, de Paul Tournier, etc. qui nous disent que Jésus entraîne au désir de l'être, qu'une foi épanouie répond à un besoin d'expansion de l'individu, que le deuil peut être un passage à la vie, que foi et psychologie font une merveilleuse famille reconstituée...
J'abonde encore dans leur sens lorsqu'ils encouragent à une sexualité responsable en préconisant l'emploi du condom. Mais on ne peut pas réduire le christianisme à l'interdiction que l'Église catholique fait du condom et à l'éventuelle culpabilité que ce discours pourrait susciter. Comme moi-même et un grand nombre de croyants ne se sentent pas coupables chaque fois qu'ils utilisent un condom et comme nous aimerions que toutes les écoles secondaires aient des distributrices de ce moyen de responsabilisation de la pratique sexuelle ; il serait peut-être prudent que les raéliens nuancent leurs propos. Ceci dit, j'avais l'impression d'écouter Madonna revendiquer son « I love myself » et glorifier l'identité individuelle. Encore ici, l'importance de structurer la personnalité, l'importance du noyau du moi est reconnue par la majorité. Un christianisme équilibré sait reconnaître la personnalité, l'individualisation comme le sommet d'un Créateur plein d'imagination. Ceci dit, l'Évangile nous encourage à mettre notre personnalité épanouie au service des autres. Dans ce sens, je m'interroge sur la place des enfants dans leur spiritualité. Non pas dans l'encouragement à les laisser vivre leur identité ou à l'espace médiatique qui leur est consacré, mais lorsque c'est le temps de les accompagner chez le dentiste et lorsque l'adulte doit mettre entre parenthèses certains de ses plaisirs pour prendre soin de l'enfant. En d'autres mots, je crois qu'ils ont une spiritualité idéale pour les célibataires. Sans idéaliser le mariage comme seul lieu possible d'épanouissement des enfants, un certain engagement de coeur et de temps de la part des deux parents me semble fondamental pour eux. Pour contre-balancer encore avec le beau côté de leurs croyances, j'envie leur liberté de tendresse. Je n'ai pas senti lors d'accolades ou de caresses dans le dos, qu'ils réduisaient la rencontre des autres à la rencontre des sexes. Je dis cela à l'encontre de certains de leurs détracteurs qui voudraient faire des raéliens des bouc-émissaires des péchés de l'univers.
Finalement, Raël fut présent lors de quelques séances vidéo. Voici ma dernière remarque et celle qui est la plus difficile à défendre de ma part : l'omniprésence du Prophète dans le mouvement, l'égal de Jésus, selon eux. Argument pour argument, on me dira que Raël est persécuté comme Jésus et on pourrait me faire valoir d'autres ressemblances. Qui a raison ? La réponse me semble émerger du temps. Jésus a donné sa vie pour nous enseigner un chemin de vie et une multitude de croyants lui ont survécu à travers l'histoire par l'assistance de l'Esprit-Saint. Les raéliens survivront-ils à Raël? Survivront-ils au rendez-vous manqué avec les extra-terrestres en l'an 2025 ou 2031 ? Quoi qu'il en soit, Raël aura le temps de bien finir sa vie, car il aura au moins 75 ans à ce point de l'agenda raélien...
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