(Source : fr.soc.sectes, avril 2002)
Raël (alias Claude Vorilhon) invite à voter Le Pen…
Encore une fois, Vorilhon tente de récupérer un événement marquant de l'actualité pour se donner, et donner à ses adeptes, l'illusion d'être un personnage important sur la scène médiatique. Mais évidemment, ses déclarations ne sont que de peu d'importance et d'influence, hormis pour les raëliens qui voient là le nec plus ultra du " discours révolutionnaire capable de sauver l'Humanité ".
Révolutionnaire, ce qualificatif conviendrait mieux aux résultats du premier tour des élections présidentielles. Pour nombre d'observateurs, c'est une sévère sanction contre le système politique essoufflé qui verrouille la démocratie. Le poids excessif des technocrates à droite comme à gauche, le médiocre renouvellement de la représentation politique, les multiples " affaires " pudiquement enterrées, les avalanches de textes guère appliqués sur le terrain, etc, peuvent donner aux citoyens le sentiment d'être dépossédés de leur souveraineté. Ce séisme politique mobilise beaucoup d'esprits en vue d'une modernisation radicale de la république, d'un renforcement réel de la démocratie. Vorilhon use de la confusion perverse dont il est coutumier pour retourner totalement ces valeurs : selon lui, bien plus que le parti à tendance fasciste, le principal danger viendrait de la démocratie. Donc il faut voter et souhaiter l'élection de Le Pen, même si on s'affirme hostile à ses idées, pour instaurer in fine la " révolution de la géniocratie ".
Le fantasme raëlien de géniocratie n'est pas de la " démocratie
civilisée " comme le laisse sous-entendre Vorilhon lorsqu'il
qualifie de
" sauvage " la démocratie actuelle. C'est une régression
vers un système totalitaire dans lequel le principe fondamental d'égalité
démocratique (une personne = une voix) est balayé par cette vieille
lune : " mettons au pouvoir les gens les plus intelligents ".
Ironie de l'histoire, la France est essentiellement gouvernée par des
énarques (dont le Q.I. est réputé plus élevé
que la moyenne !). Pourtant, leur gestion de la vie politique a été
majoritairement boudée par les électeurs lors du premier tour…
La démocratie n'est pas un état naturel des sociétés. Il faut la faire vivre au quotidien, être vigilant, se battre pour la conserver ou la faire évoluer. La montée en puissance d'un parti extrémiste est un signal d'alarme sérieux en face duquel il faut se mobiliser pour en déraciner les causes profondes. Vorilhon préfère un système qui casse le thermomètre social : la géniocratie empêcherait l'expression du malaise… Tout comme le malaise est nié au sein de sa secte où, évidemment, ne règne que " l'harmonie ", où les informations internes sont strictement filtrées, où toute contestation du leader est impossible sous peine d'être expulsé.
Dans les discours contradictoires et provocateurs de Vorilhon, les mêmes motifs inavoués sont souvent à l'œuvre : son fantasme de toute puissance, sa jouissance perverse à provoquer le trouble, sa haine obsessionnelle contre la France, pays natal qui l'a officiellement considéré gourou de secte dangereuse. Au soir du premier tour, il a cru tenir l'occasion de se venger de ses " persécuteurs ", d'où sa jubilation et son appel fielleux sans efficacité aucune sur la politique française. Son extrémisme radical contraint ses adeptes, qui lui vouent un véritable culte, à franchir une nouvelle étape de transgression personnelle et sociale. Les raëliens français notamment sont sommés de voter pour un parti dont ils désapprouvent les orientations. Les quelques proches non-raëliens qui ont encore des liens - amis et membres de la famille - seront au minimum consternés en apprenant la nouvelle. A l'inverse, chez la plupart des adeptes, se développe un sentiment de honte refoulée ou (et) une revendication provocatrice encore plus cassante. Ainsi la haine de Vorilhon est habile et corrosive : masquée sous de pseudos arguments d'amour, exploitant la peur et l'idolâtrie, elle divise, isole et corrompt tout.
On a dit du vote extrême qu'il est un vote de l'inculture. Qu'il se place
dans un rapport d'indifférence ou d'hostilité à l'autre.
Pour des raisons certes différentes de celles des lepénistes convaincus,
le " choix " de vote de nombreux raëliens aura montré
combien ce constat est terriblement juste.
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