Amendement Accoyer

Légiférer sur les psychothérapies ? Pas de psys au rabais !!!

(Source : Association Française des Psychologues Clinicien)



Mis en ligne le 15 janvier 2004
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Depuis quelques temps, des amendements et des contre amendements qui amendent le dernier amendement ne cessent de voir le jour. Cela pourrait prêter à sourire si le sujet en question n'était pas si important : la pratique de la psychothérapie. Ces amendements d'amendements sont bien le signe que la pratique de la psychothérapie suscite bien des questions, et qu'elle n'est pas assez simple pour être légiférée sans une réelle concertation des professionnels concernés.

A ce jour, en France, les seules professions concernées par la psychothérapie dont le titre est protégé sont les psychiatres et les psychologues. En effet, si le titre de psychologue ainsi que le titre de psychiatre sont protégés, n'importe qui peut par contre se présenter comme psychothérapeute, comme psychanalyste, voir psychopathologue, psychosociologue, etc…

C'est cette brèche qui a été saisie pour tenter à nouveau de légiférer sur la pratique de la psychothérapie en France. L'argument présenté par Mr ACCOYER pour proposer son amendement était de lutter contre les sectes. On sait cependant que s'il est vrai que beaucoup de ces psychothérapeutes autoproclamés sont issus de formations fantaisistes, et parfois liées aux sectes, un titre protégé ne protège pas contre l'embrigadement sectaire. Pour preuve le rapport numéro 1687 datant de 1999 sur les sectes nous informait que : " Selon l'Ordre national des médecins, environ 3 000 praticiens auraient aujourd'hui en France des relations avec un mouvement sectaire, mais ce chiffre doit être interprété avec prudence. Les liens entretenus sont en effet extrêmement divers, allant du sympathisant occasionnel à l'adepte fortement impliqué."

A ce jour, la seule formation initiale des psychiatres et des psychologues n'est pas totalement satisfaisante pour la pratique de la psychothérapie. Ces professionnels sont d'ailleurs suffisamment compétents pour savoir le reconnaître. Ces formations sont cependant les seules formations universitaires à enseigner les bases, les fondamentaux nécessaires à la compréhension de la psyché humaine. Il serait souhaitable de pouvoir compléter de façon plus formelle ces formations initiales (la majorité des psychiatres et des psychologues font des formations complémentaires qui ne sont pas prises en compte actuellement).

Si nous mettons à part la psychanalyse, il nous apparaît que seules les formations du psychiatre et du psychologue clinicien (articulant pratique clinique et théorie) permettent une garantie au public sur la qualité de la formation reçue. Il faut tendre vers le haut, non vers le bas, et ce pour le bien de l'usager. Si vraiment on veut le bien de l'usager, comme on le prétend, pourquoi proposer de former des pseudo "psychothérapeutes" , au rabais, à bac +3 ?

Il faut tendre vers une amélioration des formations universitaires, pourquoi pas un doctorat en psychothérapie qui articulerait théorie et pratique ? Cette formation pourrait être mise en place par des universitaires psychiatres et des universitaires psychologues, et s'articuler autour d'un clinicat et d'une supervision.

Peut être doit-on également se questionner sur la prise en (dé)charge de la souffrance psychique demain…

Le rapport clery melin qui a été présenté le 15/09/03, pose comme principe s'il était retenu, qu'un patient ne pourrait plus avoir accès librement et directement à un psychologue, un psychiatre ou un psychanalyste.

En effet, le patient devrait passer devant un psychiatre coordinateur qui poserait un diagnostic et, suivant un arbre décisionnel préétabli, imposerait telle prise en charge (imposant les modalités de la thérapie et le thérapeute). C'est la une tentative de médicaliser et de codifier ce qui n'a pas à l'être. C'est également une atteinte inacceptable aux libertés individuelles. De plus, doit on considérer le mal être comme une pathologie mentale ?

Mettre les gens dans des cases, codifier les psychothérapies, tout un programme qui semble œuvrer bien plus a une tentative de maîtrise (de quoi ?) qu'à un réel désir du bien être de l'usager.

C'est pourquoi l'Association Française des Psychologues Cliniciens s'est opposée depuis le début à cet amendement Accoyer, car cet amendement est sous tendu par autre chose que par cette protection des dérives sectaires. Il n'est que la partie visible et plutôt bien présentée d'un tout qui s'est discrètement pour ne pas dire secrètement constitué.

L'heure est peut être venue maintenant de se mettre au travail, en mettant en place une commission composée de psychiatres, de psychologues, de psychanalystes et de psychothérapeutes pour œuvrer à une réflexion sur ce que sera demain la pratique de la psychothérapie. Cette commission se devra d'être composée à la fois de praticiens et d'universitaires, ces derniers étant directement concernés par la formation des psychothérapeutes de demain.

Il est plus sage de faire les choses sereinement que de vouloir légiférer à la va vite sur un sujet aussi sérieux et complexe. Rappelons-nous la fable du lièvre et de la tortue…

Pour l'Association Française des Psychologues Cliniciens - www-Psychologues-Cliniciens.org

Le Président,

Sébastien NICOLAS



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