Le Docteur Dominique Dehaudt, vice-président
du Conseil de l'Ordre des
Médecins de la Vendée, était l'invité de
l'UNADFI lors de sa rencontre nationale à Nantes le 21 novembre
dernier. Il est à l'origine de l'établissement au sein du
Conseil d'une commission sur l'exercice illégal de la médecine
et sur les sectes. Son action s'est étendue aux départements
limitrophes. Actuellement, dix départements français sont
pourvus d'une telle commission, dans les Pays de Loire et dans la région
Rhône-Alpes.
C'est suite à ses initiatives, qu'en novembre 1996 une Circulaire
du Conseil National a été composée et signée
de son vice-président, le Dr. Olivier Dubois, onze pages très
utiles, mais dont le retentissement dans la profession est demeuré
confidentiel. Elle n'a même pas été mentionnée
dans le Bulletin national.
Pourtant les sectes, ayant maintenant trouvé expédient de
laisser leur folklore, ont investi principalement dans le domaine de la
santé et dans celui de la formation
continue, 2 secteurs où il y a de l'argent à ramasser.
Leurs inévitables échecs les intéressent encore plus,
car un sentiment bien compréhensible de frustration apparaît
chez des malades lorsque l'insuccès demeure après le déploiement
de technologies, dont on attendait beaucoup, et qui ont été
sèchement ou trop peu expliquées. Les sectes se présentent
alors comme un recours avec leur cortège de charlatans, parmi lesquels
hélas quelques médecins en mauvaise passe.
La plupart sont autorisés à exercer. D'autres ont déjà
fait l'objet d'injonctions ou même de sanctions, telles que blâmes,
suspensions ou radiations. Les sectes sont à l'affût de tous
comme de possibles complices à ne pas négliger, car elles
pourront exploiter le titre de médecin. Certains même vont
être promus " professeurs " ! Il faut bien distinguer plusieurs
catégories : celle des médecins simplement " touchés
" et qui commencent à glisser, puis la catégorie des
coupables qui se sont mis à exercer systématiquement en rapport
avec une structure et selon une doctrine de secte, le cas extrême
étant le médecin devenu gourou.
À signaler que des médecins isolés sont des médecins
exposés, et que le danger devient particulièrement sérieux
lorsqu'ils ont devant eux un malade grave. Exemple : un homme de 20 ans
porteur d'un cancer des testicules (séminome) qui, fourvoyé,
n'a été traité qu'après deux ans et demi de
prière ; il en est mort.
Actuellement on estime grosso modo que les " coupables " représentent
2% des 86.000 médecins français en exercice. Compte tenu
de ceux qui n'exercent pas la médecine de soins on parvient au chiffre
de 3.000, ce qui n'est pas négligeable. Le rôle de la Commission
ad hoc est d'abord de les convoquer pour avoir une franche conversation.
Dans les cas des médecins seulement " touchés ", l'expérience
du Dr. Dehaudt est que cela a suffi dans 18 cas sur 20.
L'Ordre des médecins, institution disciplinaire
Le rôle de la Commission devient l'instruction, lorsque la conversation
" appuyée " a échoué. Il recueille les plaintes,
examine si elles sont accompagnées de preuves et de témoignages
sans lesquels la justice aurait toute chance de classer sans suite, et
les transmet à l'Ordre Régional, qui saisira ou non le Parquet,
car c'est au pénal seul que revient le rôle répressif.
Cependant les décisions prises par l'Ordre sont publiques bien que
mal publiées.
Une discussion animée a suivi l'exposé, ainsi :
L'ordre agit vis à vis des médecins, mais non pas des kinésithérapeutes
souvent en cause. Réponse : exact, mais ceux-ci peuvent être
convoqués au motif de possible exercice illégal de la médecine.
Le contrôle technique de la Sécurité Sociale peut être
amené à vérifier la licéité de certaines
prescriptions, et se montrer vigilant.
Et l'expérimentation ? car il ne faudrait pas l'interdire au prétexte
que, suivant le Code de Déontologie, le médecin " ne doit
prescrire que des thérapeutiques éprouvées ".
Réponse : la recherche doit s'exercer dans le cadre de la loi Hurié
qui en définit les conditions et les limites.
Les poursuites pour abus de faiblesse ? Des cas prouvent que cela fonctionne.
Et les psychothérapeutes, pour lesquels on est dépourvu de
toute définition ? Réponse : méfiance systématique.
Avis personnel du Dr. Dehaudt : recommandation
de s'adresser à un médecin ou à un psychologue diplômé.
Vu la longueur des formations, a fortiori pour un psychanalyste, chercher
plutôt quelqu'un d'au moins 35 ans. Dans la tranche des 20 ans, on
ne peut guère attendre qu'une expérience assez faible.
Et le Reiki (1) ? Réponse : le Reiki mêlé
à la médecine a déjà donné lieu à
des sanctions ordinales comme thérapeutique non-éprouvée.
On connaît un maître reiki vendeur d'objets prétendument
sacrés.
Il serait très utile d'informer sur Internet en ce qui concerne
la jurisprudence actuelle relative à l'exercice illégal de
la médecine.
Que chacun joue son rôle :
Ceux qui s'estiment victimes, en déposant des plaintes bien étayées.
À cet égard, il peut être recommandé de les
déposer en même temps devant le Président de l'Ordre
et devant le Procureur de la République.
Que les Ordres régionaux transmettent aux Parquets des plaintes
sans lesquelles ceux-ci ne peuvent rien faire, sauf en matière de
mineurs où, rappelons-le, ils peuvent s'auto-saisir.
Enfin, vu l'incidence croissante de pratiques des sectes, dont beaucoup
empêchent les malades de se soigner à temps, il apparaît
hautement souhaitable que l'Ordre National institue à son tour une
commission ad hoc permanente, et qui soit à même de coopérer
avec des magistrats spécialement avertis. La demande est forte
de la part de ceux-ci, et l'UNADFI a déjà répondu
à des demandes de l'École Supérieure de la Magistrature.