QUE SAIT-ON DE .... ? MAHIKARI (Source BULLES n°63 - 3ème trimestre 1999) * Introduction * Ce que nous en savons o Premier cercle * Premier jour * Deuxième jour * Troisième jour o Deuxième cercle o Troisième cercle * La face cachée de Sukyo Mahikari * Ce que nous en pensons Introduction A l’automne 1998, on apprend que l’unité antifraude de la Commission européenne enquête sur une affaire de détournement de fonds destinés à l’aide humanitaire. La société belge mise en cause est étroitement liée avec celle du comte d’Ansembourg. Celui-ci est un des dirigeants européens de la secte japonaise Sukyo Mahikari, qui a son centre européen au château d’Ansembourg (Grand Duché de Luxembourg) anciennement propriété du comte. Plusieurs centaines de milliers de Francs français auraient transité des caisses de la Commission vers celles de Mahikari. On apprend au passage que la dite CE a versé, en 1993, 360 000 FF pour l’entretien des jardins du château d’Ansembourg, travail effectué bénévo-lement par des adeptes de la secte. (Voir BULLES n° 61 p. 24) Ce sont des gouttes d’eau dans les comptes parfois fantastiques de la CE. Mais cela a attiré l’attention sur une secte restée assez discrète en France, depuis sa déclaration comme association en 1973 ; elle dit y avoir 20 000 adeptes (le rap-port Gest-Guyard dit : moins de 500). La section financière de la police judiciaire mènerait depuis juillet 1998 une enquête préliminaire sur le financement du patrimoine immobilier de Mahikari en France (Paris, Toulouse, Nice)1 . Ce que nous en savons Répertoriée par le rapport Gest-Guyard comme « secte guérisseuse » (p. 64) c’est bien ainsi qu’elle se présente au premier abord. Mais comme la plupart des sectes, elle comporte plusieurs cercles concentriques : Premier cercle : On rencontre Mahikari (Vérité et lumière) dans les foires Nouvel Age, médecines douces ..., par des tracts et surtout le bouche à oreille. Mahikari s’adresse à tous, vise à unir les familles, les nations, les religions, guérit sans médicaments ni chirurgie. Il suffit de s’inscrire à un séminaire de trois jours ; le prix n’est pas excessif. Pourquoi pas ? Premier jour : considérations générales, origine commune de tous les humains (réincarnation, karma ...) Il faut éviter la pollution, les engrais et produits chimiques, les médicaments de la médecine « officielle », car ils sont toxiques. Mieux : il faut en débarrasser son corps. Résultat garanti : santé, bonheur, harmonie ... Deuxième jour : on vous parle du monde des esprits. Il y en a partout et la plupart des gens sont troublés, ou même possédés, par toute une bande d’esprits mauvais. Il y a les esprits des ancêtres, les esprits animaux, ceux de la terre et surtout les démons possesseurs. Nous attirons les mauvais esprits par nos impuretés spirituelles. Troisième jour : ceux qui n’ont pas été rebutés par les révélations du deuxième ont droit à un aperçu de l’histoire officielle du mouvement et surtout de son fondateur, le grand sauveur : Yoshikazu Okada, d’abord brillant officier japonais, réformé en 1941 pour une quantité de maladies incurables. Il décide de passer les 3 années qu’on lui donne à vivre à servir Dieu et l’humanité. Mira-culeusement il guérit et, le 27 février 1959, il commence à recevoir une foule de révélations divines, y compris son nouveau nom, Kotama (boule de feu) ; comment capter les vibrations divines par les paumes des mains levées, et ainsi purifier les gens, les guérir et préparer le plus grand nombre possible à la pro-chaine civilisation, sainte. Il lui est ordonné de transmettre ce pouvoir aux au-tres, qui à leur tour ... Pour répandre ses continuelles révélations, il fonde Mahi-kari. Dix jours avant sa mort (1974) il lui est révélé que sa fille adoptive Keiju doit lui succéder à la tête de sa divine entreprise. C’est d’elle désormais que viennent les révélations. C’est du moins la version que reçoivent les adeptes français. Les candidats sont avertis qu’en raison de l’importance de leur mission, les mauvais esprits s’acharneront sur eux. Aux courageux qui acceptent quand même, il est remis un talisman, un pendentif doré, qu’ils devront porter constamment et traiter avec une dévotion méticuleuse. Les nouveaux adeptes vont désormais se bénir mutuellement, tous les jours si possible, se faire recruteurs et bénir ceux qui acceptent. Certains présentent lors du rite des phénomènes étranges : ils perdent conscience, sont secoués de tremblements et de mouvements désordonnés, émettent des sons bizarres (glossolalie). Ceci est plus ou moins fréquent selon les personnes et leur culture d’origine. Pour ceux qui en restent là, il y a quelques risques : tomber gravement malades ou mourir par refus de se soigner par la médecine officielle, se dépouiller de sommes importantes. La peur des esprits, renforcée à chaque réunion, finit par engendrer une sorte de paranoïa. Mais enfin beaucoup continuent une vie normale en apparence. Deuxième cercle : Celui qui a recruté au moins cinq adeptes, participe activement à la vie du centre (dojo), s’investit de plus en plus, va être initié à un degré supérieur. Il se nipponise : apprend des prières et des expressions japonaises, ne fréquente plus que les autres adeptes - les non-convertis sont à éviter à cause de leurs mauvais esprits. Il sait maintenant que le japonais est l’ancienne langue des dieux, que ses vibrations ont un effet salvateur. Au dojo, où il passe de plus en plus de temps, il adopte les coutumes japonaises : ôter ses chaussures à l’entrée, faire au bon moment les révérences prescrites, applaudir, acclamer, venir cérémonieusement déposer son offrande devant l’autel ... Il est chargé de fonctions au dojo, même s’il lui faut changer de travail. Il est recommandé d’apporter de plus en plus d’argent : Keiju en a tant besoin pour faire avancer l’œuvre de salut. Rites spéciaux : donner uniquement des billets neufs par exemple. Donner est la meilleure manière de communiquer directement avec Dieu. Plus c’est difficile, plus il faut donner - pour éloigner les mauvais esprits. Le grand sauveur Okada a dit : « Dieu a une calculette divine et connaît la situation de notre compte spirituel ». Tout accident, même bénin, (ou toute maladie) est attribué aux esprits - mais en fin de compte à la victime qui, par ses péchés (notamment sexuels : adultère, homosexualité, contraception ...), leur a permis de s’emparer d’elle. Les supé-rieurs vous confessent en détail ; chacun se met à épier son voisin. Les esprits et l’argent : ce sont des obsessions, d’ailleurs liées. Troisième cercle : On n’y pénètre que par un stage de plusieurs mois au Japon2. Il n’est proposé qu’aux adeptes qui ont fait leurs preuves et sont destinés, leur dit-on, à constituer les unités de choc de Dieu, « durs comme l’acier d’un sabre de samouraï », « unis corps et âmes avec le grand sauveur Okada et avec Keiju ». Cela ressemble fort à un camp d’entraînement intensif, physique et idéologique : uniformes, crânes rasés à l’arrivée, réveil à cinq heures, rangement des chambrées en trois minutes, rassemblement en rangées impeccables, lever des couleurs (japonaises), hymne nippon en l’honneur de l’Empereur. Toute la journée se déroule entre de dures corvées et l’étude, endoctrinement sans discussions, repas frugaux parfois supprimés ou réduits. Réprimandes pour la moindre maladresse. On vous rappelle qu’on est là volontairement, et libre de partir - mais il faudrait rendre des comptes à Dieu, bien plus sévère que les chefs ; et on deviendrait la proie des démons ! Et il y a la pression du groupe. L’enseignement inculque la prééminence de tout ce qui est japonais. Le dra-peau à la sphère rouge représente la déesse soleil, ancêtre de l’empereur ; le chrysanthème à seize pétales indique les directions vers lesquelles les anciens empereurs ont envoyé leurs enfants. Pays d’origine de l’humanité, le Japon est investi de la mission de sauver le monde. Au début Dieu y régnait directement, il a eu des descendants, dieux eux-mêmes. L’empereur en est un. Jésus, Moïse, Bouddha sont venus au Japon. Jésus n’a pas été crucifié, son frère a pris sa pla-ce sur la croix. Au Japon, Jésus s’est marié, a eu des enfants. Il est mort à 106 ans et est enterré dans le nord de l’île de Honshu. (D’autres japonais que les adeptes de Mahikari viennent en pèlerinage sur sa tombe). Après tous ses échecs, Dieu a conclu une nouvelle alliance, définitive cette fois, avec le grand sauveur Okada. Le couronnement de l’initiation est un résumé des « Protocoles des Sages de Sion » donnés comme authentiques3. Dieu s’est servi du nazisme (allié du Japon lors de la seconde guerre mondiale) pour détruire les Juifs qui, depuis Salomon, n’ont cessé de trahir Dieu pour s’emparer de la domination sur le monde4 . Menaces d’apocalypse : Si les adeptes sont poussés à se sacrifier pour aider Keiju à sauver le monde (air connu), ils sont en même temps menacés d’une catastrophe s’ils n’en font pas assez. La colère de Dieu peut frapper n’importe où, n’importe quand. Cela peut être une guerre nucléaire, des épidémies, des séismes, des inondations, des révolutions ... Il a donc fallu chercher un site de survie, pour Keiju et le petit reste de justes qui sera préservé. L’Australie étant considérée comme le plus stable des continents, six adeptes australiens ont été chargés de chercher l’endroit idéal. On l’a trouvé en Nouvelle Galle du Sud. Environ 500 ha ont été achetés, en grand secret, au nom de Keiju et de ses plus proches lieutenants5. La face cachée de Sukyo Mahikari Même si les révélations du 3° cercle sont réservées à quelques-uns, ils n’apprennent pas tout. Qui était vraiment Yoshikazu Okada ? Officier japonais, convaincu de la mission divine du Japon, il se porte volontaire pour la guerre de conquête de la Chine, puis de l’Asie du Sud-Est. Son unité participe en particulier en 1937 à la prise de Nankin (5 novembre 1937), tristement célèbre comme le « viol de Nankin ».(Des dizaines de milliers de soldats et civils chinois ont été torturés et massacrés ; au cours des semaines suivantes quelque 20 000 femmes ont été systématiquement violées). Les sources ne précisent pas la part qu’il y a prise personnellement. Il continue sa carrière en Indochine (envahie dès 1940). Réformé, de retour au Japon, en fait de service de Dieu (biographie officielle) il investit dans des usines, d’aviation de guerre principalement. Selon lui, elles ont mystérieusement prospéré. Mais juste avant la capitulation japonaise (été 1945), elles sont entièrement détruites par un bombardement. Ruiné, il refait rapidement surface grâce à un ami, M. Fukuda (futur Premier Ministre). Bien que cela ne soit jamais mentionné dans les textes officiels de Sukyo Mahikari, Yoshikazu Okada a été, de 1947 à 1959, un adepte enthousiaste d’une secte, le Sekai Kyusei Kyo (SKK) fondé en 1934 par Mokichi Okada (aucun lien de parenté avec Yoshikazu), lui-même dissident d’une secte shintoïste (Omotokyo). Celui-ci prône la culture naturelle (sans engrais, même naturels). Il garde la croyance aux divers esprits et déités, mais ne les fréquente pas. Des membres âgés du SKK, qui y ont connu Yoshikazu, confirment qu’il en fut un membre très actif, devenu même pasteur. Il aurait été démis de ses fonctions pour « mauvaise conduite » et pour son commerce intense avec les esprits, considéré comme dangereux. En 1959, Yoshikazu Okada quitte SKK et fonde sa propre secte, le Sekai Mahi-kari Bunmei Kyodan, où il donne libre cours à sa passion spirite, tout en conservant l’essentiel des enseignements du SKK. Lutte de succession : Avant sa mort en 1974, il avait désigné comme suc-cesseur Sakae Sekiguchi . Mais ce titre (et les biens de la secte) ont été revendiqués par Keiju, sa fille adoptive (et sa maîtresse, selon certains), qui avait réuni autour d’elle une coterie active. Un procès s’engagea et, en 1978, Sekiguchi l’emporta en dernière instance, récupérant donc le nom et les biens de Mahikari Bunmei Kyodan. Cette secte a édifié un temple imposant, que Keiju a l’ambition de surpasser encore. Keiju a dû modifier quelque peu le nom, en Sukyo Mahikari, ce dont les adeptes français n’ont pas pris conscience. À notre connaissance, tous les dojos français appartiennent à la faction Sukyo et ne semblent pas avoir entendu parler de la querelle de succession. Il existe pourtant, de par le monde, des dojos de Mahikari Bunmei Kyodan, et aussi de SKK, chacune des branches s’efforçant d’ignorer les autres. Ce que nous en pensons Sukyo Mahikari, secte guérisseuse, politique ou apocalyptique ? « Guérisseuse » sans doute, comme d’autres, pour les malades sinon imaginaires du moins peu graves, mais avec, pour les vrais malades, les dangers que comporte le recours exclusif à la méthode de la secte. De plus, l’obsession de la purification aboutit à une culpabilisation et une angoisse massives : si les mauvais esprits vous envahissent et vous rendent malades, c’est à cause de vos impuretés. L’angoisse reste, aggravée par l’annonce d’une apocalypse toujours menaçante, si on n’en a pas fait assez. Peut-être plus grave encore, parce que bien dissimulée, la face politique, de la secte. L’argent des adeptes, obtenu par des prétextes « spirituels », sert non seulement à assouvir la soif de pouvoir des dirigeants, mais à des visées politique plus précises, dont la plupart des disciples n’ont aucune idée : reprendre la lutte pour l’hégémonie japonaise6, restaurer la divinité de l’empereur. Ces ambitions ont peu de chance de se réaliser, même dans le Sud-Est asiatique, mais il y a là une escroquerie monumentale, que rien ne permet aux nouveaux adeptes ni même aux observateurs, qui ne voient que les deux premiers cercles, de soupçonner. Mahikari Home Page Sectes = danger !