La secte d'Asembourg dans le
collimateur de la justice belge ?
(source : Le Républicain Lorrain, 24 mars 1995)
La justice belge lance une enquête sur la secte nippone Sûkyô
Mahikari, implantée en Belgique et au Luxembourg.
Dénommée " organisation pour réaliser une civilisation
nouvelle par la lumière de la vérité ", la secte
de Sûkyô Mahikari est présente en Belgique depuis plus
de 20 ans. Elle y a installé, en 1982 à Bruxelles, son "
quartier général " pour l'Europe et l'Afrique sous la
forme d'une association intemationale à but religieux. Créée
au Japon par le gourou Kôtama Qkada, suite à une révélation
divine (!), cette secte discrète mais à combien puissante
prétend qu'un processus de feu purificateur s'est engagé
depuis 1962 et devrait conduire à l'extinction des représentants
de la race humaine qui ne se convertiraient pas au mouvement. Seuls ne
seront sauvés, bien entendu, que les adeptes de Mahikari.
Ceux-ci se distinguent par une amulette portée autour du cou
qui doit rester invisible des personnes tierces et même du conjoint,
et qui sert d'antenne entre l'adepte et le dieu " Su ". L'énergie
divine est alors transmise au tiers; pour le " guérir ",
via la paume de la main. Une véritable escroquerie.
Au milieu des années 80, l'implantation du mouvement en Europe
s'est modifiée sous l'influence d'un noble luxembourgeois encombré
d'un château, le comte Gaston d'Ansembourg. Il essaye de vendre son
bien : une immense bâtisse du XVIIème siècle pourvue
de riches jardins. Les Mahikari, présents au Grand-Duché
depuis 1980, représentent donc pour lui une bonne affaire. Après
la création, au château, d'une société dénommée
" Yoko Shuppan-Europe ", dont le comte d'Ansembourg devient... administrateur
délégué, la vente proprement dite a lieu à
Luxembourg, devant notaire, le 19 janvier 1987. Le château est vendu,
à l'association Sûkyô Mahikari Gifu-Ken, représentée
par un certain Mokushiro Obushi, pour 160 millions de yens (39,9 millions
francs luxembougeois). L'acte est quelque peu inhabituel pour le Luxembourg
puisqu'il contient la procuration, en japonais, faite à Obushi par
Koko Okada, la fille du gourou devenue, à la mort de son père
en 1971, chef suprême de la secte.
Pertes et profits
L'opération finalisée, Obushi quitte le Grand-Duché
en mai 1987. C'est Tadashi Shirasaka qui reprendra le flambeau, et surtout
les affaires, tant de Sûkyô Mahikari-Luxembourg que de la "Yoko
Shuppan-Europe" dont le but est la diffusion de publications, l'organisation
de séminaires, la vente d'objet de culte ou toute autre activité
pouvant servir à l'expansion des Mahikari dans.le monde. Selon Alain
Lallemand ; joumaliste au quotidien Le Soir et spécialiste
du problème des sectes, Shirasaki serait toujours en poste au Luxembourg
actuellement. " En août 1992, il a notamment procédé
à une augmentation de capital de la Yoko Shuppan-Europe à
hauteur de 3,5 millions de francs luxembourgeois, pour le compte d'un autre
administrateur de société de Gifu (Japon). Et pour cause,
les pertes de la société en 1991 avoisinaient les deux millions
francs qu'il était prudent de réinjecter sous forme de capital
frais ".
Depuis cette installation à Ansembourg, Sûkyô Mahikari-Luxembourg
supervise les activités continentales de la secte dont les publications
sont éditées par la Yoko Shuppan-Europe. D'autre part,
la secte a déployé de grands moyens pour restaurer le château
et ses dépendances. A titre d'exemple, en 1991, 150 millions de
francs luxembourgeois ont été engagés dans
la restauration du domaine. " Si les activités d'édition
de la secte ne se portent pas très bien " poursuit A. Lallemand,
" ses activités immobilières, soutenues par les Japonais,
sont par contre très florissantes ". Lancés sur la piste
des Mahikari, les enquêteurs belges, qui disposent de nombreuses
plaintes d'ex-adeptes s'étant fait dépouiller de leurs biens,
devront tôt ou tard s'y intéresser.