Introduction
Caractères du consentement
Patient hors d'état d'exprimer sa volonté
Refus de consentement
Consentement du malade dans les hôpitaux
Domaines régis par la loi
Lorsque le malade, en état d'exprimer sa volonté, refuse les
investigations ou le traitement proposés, le médecin doit respecter
ce refus après avoir informé le malade de ses conséquences.
Si le malade est hors d'état d'exprimer sa volonté, le médecin
ne peut intervenir sans que ses proches aient été prévenus
et informés, sauf urgence ou impossibilité.
Les obligations du médecin à l'égard du patient lorsque
celui-ci est un mineur ou un majeur protégé sont définies
à l'article 42.
Le malade a le droit d'accepter ou de refuser ce que le médecin lui
propose et non lui impose. Cette liberté du malade est une exigence éthique
fondamentale, corollaire du devoir d'information énoncé à
l'article précédent. L'information du malade est en effet la condition
préalable de son consentement, conséquence qu'il tire de cette
information.
Les actes médicaux justifiant ce consentement doivent être entendus,
au sens large : en commençant par l'examen clinique habituel dont certains
gestes peuvent être désagréables comprenant des investigations
complémentaires non-invasives ou non-sensibles (par exemple sérologie
virale), différents traitements, la surveillance du traitement et de
ses suites ; il porte également sur la participation éventuelle
du patient à la formation d'étudiants (décret n° 97-495
du 16 mai 1997), ou continue de médecins, à des publications qui
permettraient une identification.
Le fait d'intervenir sur un patient contre son consentement est pour un médecin
une faute déontologique qui l'expose à une sanction disciplinaire
et engage sa responsabilité civile.
Si le malade est inconscient et dans l'impossibilité de donner un consentement éclairé, rester inactif irait à l'encontre des prescriptions de l'article 9 du code qui fait obligation à tout médecin en présence d'un blessé ou d'un malade en péril de lui porter assistance ou de s'assurer qu'il reçoit les soins nécessaires. Un tel comportement serait en outre de nature à entraîner des poursuites pour non-assistance à personne en danger. Dans ce cas le médecin doit s'efforcer d'avertir des proches susceptibles de transmettre une position exprimée antérieurement par le malade. En cas d'urgence ou d'impossibilité persistante de joindre ces proches, le médecin devra intervenir comme il le juge souhaitable.
Le consentement, selon les juristes, doit être "libre et éclairé".
S'il ne l'est pas, surgit aussitôt l'accusation de "paternalisme
médical" ou d'"impérialisme médical".
Or, dans beaucoup de cas, il est difficile que le consentement soit tout à
fait bien éclairé, sans parler du climat d'angoisse qui l'empêche
d'être tout à fait libre.
Pour un consentement parfait, il faudrait que le malade auquel le médecin
propose un traitement puisse avoir une connaissance exacte non seulement du
but poursuivi, mais de tous les risques que comportent la maladie, les explorations
médicales et la thérapeutique, y compris les risques les plus
exceptionnels. Outre son impossibilité, une pareille énumération
de toutes les éventualités, de leur pourcentage constituerait
le plus souvent une faute de psychologie, préjudiciable au patient affolé.
Sauf dans des cas simples il n'est pas question de "tout dire" pour
plusieurs raisons : la première est que le médecin ne sait pas
tout, que la médecine n'est pas une science exacte, qu'il existe toujours
une marge d'incertitude, que les complications d'une maladie sont en partie
imprévisibles. Le médecin est d'autant plus prudent dans ses paroles
qu'il n'a parfois, pendant un certain temps, que des présomptions. L'important
est qu'il n'y ait pas de méprise, pas de malentendu.
Souvent en fait, le consentement que donne le patient à son médecin
est plus affectif qu'éclairé. Ce n'est pas un "abandon inconditionnel",
ni un "blanc-seing" mais une confiance utile au patient et dont le
médecin ne peut guère se passer.
On conseille parfois au médecin de recueillir auprès de ses malades
un consentement écrit dès qu'il s'agit d'une décision d'importance.
Dans certains services hospitaliers, on demande d'avance et systématiquement
ce consentement écrit ("permis d'opérer"). Cette méthode
n'est pas satisfaisante, elle risque de dénaturer la confiance et de
perturber d'emblée la relation normale entre les malades et le médecin.
Le consentement écrit n'a d'ailleurs pas une valeur juridique absolue
sauf lorsqu'il est exigé par la loi (cas des recherches biomédicales
; loi du 20 décembre 1988 modifiée, infra). Cette dernière
situation a montré qu'une formulation écrite pouvait intervenir,
moyennant certaines précautions, sans empoisonner la relation médecin-malade,
voire en la renforçant.
Le médecin, qui seul possède bien les données de la décision,
ne peut être ainsi déchargé de sa responsabilité
par un "chèque en blanc" donné par le malade ou son
entourage.
Il peut être indiqué parfois, en cas de refus du malade, de lui faire consigner ce refus par écrit, ne serait-ce que pour lui signifier d'une autre manière la gravité de sa décision. Un tel document n'a pas de valeur légale mais peut témoigner que le malade a bien été informé.
Si le patient est comateux ou obnubilé, le médecin a souvent
l'obligation d'agir immédiatement. Dès qu'il en aura la possibilité
il donnera des explications à la famille.
On a beaucoup épilogué sur ce que doit faire un chirurgien si,
au cours d'une intervention sous anesthésie générale qui
promettait d'être simple, il s'aperçoit que les lésions
sont autres que celles qu'on avait pu supposer, et découvre par exemple
que le sacrifice d'un organe ou d'un membre, auquel le patient n'est pas préparé,
s'impose. En pareille occurrence, il arrive que l'intervention mutilante puisse
être remise à plus tard, ce qui permet de recueillir l'accord (ou
le refus) du malade après son réveil.
à l'intervention est précieuse en pareil cas. On peut parfois,
au cours de l'intervention, faire prévenir la famille. Mais, en définitive,
le chirurgien décide en sachant qu'il pourra avoir à justifier
sa décision.
a ) Le praticien qui donne ses soins à un enfant doit s'assurer du consentement des parents ou tuteurs. Il rencontrera parfois des difficultés avec des adolescents.
Lorsque les parents sont absents et ne peuvent être prévenus et si la situation est grave et urgente, le médecin prend les mesures nécessaires et donne les soins sous sa seule responsabilité (art.42 ).
Lorsque les parents sont divorcés ou séparés, c'est en principe le consentement de celui qui a la garde de l'enfant qui compte. Mais pour une décision grave, il est souhaitable que les deux parents, si c'est possible, soient prévenus et consultés.
Lorsqu'il s'agit d'un grand enfant, le médecin doit s'efforcer d'obtenir son adhésion personnelle.
b ) Le consentement du malade mental aux soins qu'on lui propose est tout à fait souhaitable et on insistera si besoin pour l'obtenir ; mais lorsqu'il s'y refuse le médecin et l'entourage familial doivent dans certains cas passer outre. En cas d'aliénation mentale caractérisée, ou d'état dangereux pour la sécurité des personnes, l'hospitalisation s'impose avec ou sans internement administratif.
La loi du 27 juin 1990(voir note 1) sur l'hospitalisation des malades mentaux permet dans certaines conditions de passer outre au consentement du patient, tant pour réaliser l'admission en milieu hospitalier public que pour appliquer le traitement.
Lorsqu'il s'agit de troubles névrotiques ou de déséquilibre affectif même spectaculaires, mais n'altérant pas la personnalité et laissant au sujet la possibilité d'un jugement raisonnable, aucun soin ne peut lui être donné sans son assentiment.
c ) Mis en présence d'une tentative de suicide, le médecin doit tout faire pour ramener la personne à la vie. L'expérience apprend qu'en attentant à ses jours le sujet commet un acte pathologique et qu'il se trouve vis-à-vis du médecin dans la même position que l'aliéné : dans l'immense majorité des cas le suicidaire ne se plaindra pas d'avoir été soigné.
d ) Le fait que le patient détenu soit privé de sa liberté n'entraîne en aucune manière une exception. Comme tout être humain, un prisonnier a le droit d'accepter ou de refuser les soins.
Si le malade, en état d'exprimer sa volonté, refuse ce qui lui
est proposé, le médecin ne doit pas se satisfaire d'un avis donné
de manière éventuellement expéditive. Il doit éclairer
plus complètement le patient sur les conséquences d'un tel refus
et tenter de le persuader que cette position est contraire à ses intérêts.
Si la situation lui paraît dangereuse, et la conduite proposée
seule bonne, il ne doit pas démissionner ; il doit tout faire pour convaincre,
proposer qu'on prenne un autre avis, appeler un consultant, insister encore.
Cependant, si malgré ces efforts nécessaires de persuasion, le
malade persiste dans son refus, celui-ci doit être respecté. Exceptionnellement
le médecin sera alors amené à se retirer, mais nécessairement
après en avoir averti le patient et en assurant une continuité
des soins, comme le souhaite le malade, pour que ce dernier ne soit d'aucune
manière abandonné.
Pour les grévistes de la faim, le médecin ne peut intervenir
autrement que par la persuasion pour donner des soins à un sujet qui
les refuse et refuse de s'alimenter, du moins tant que le sujet n'est pas encore
en danger de mort.
A partir du moment où l'état de faiblesse est tel que la vie
est menacée à brève échéance (et sans nécessairement
attendre la perte de connaissance), le devoir du médecin est de prescrire
l'hospitalisation afin que puissent être donnés les soins qui s'imposent.
Cette question a été très discutée. Pour la grande
majorité des médecins et des juristes, on ne peut laisser mourir
le gréviste qui, à ce stade, est devenu un malade en péril
ou un suicidaire.
Ce n'est pas en raison d'une injonction de l'administration pénitentiaire
que le médecin intervient, il s'y décide dans sa conscience de
médecin pour porter secours à une personne en danger.
Certaines sectes sont farouchement opposées aux vaccinations, aux opérations,
ou aux transfusions de sang humain (témoins de Jéhovah). Le médecin
doit s'incliner si l'intervention n'est pas urgente, si la transfusion n'est
pas indispensable ou lorsque, en cas de maladie chronique, le malade et son
entourage, pleinement conscients de l'enjeu, opposent un refus persistant.
Lorsque la vie du malade est réellement et immédiatement menacée, on comprend le médecin qui, n'acceptant pas d'être complice de ce qui lui semble être une aberration criminelle, passe outre et fait ce que sa conscience de médecin lui commande, à ses risques et périls. S'il s'agit d'un enfant, en avisant le procureur de la République, il donne à sa conduite professionnelle un support légal.
Comme l'hospitalisation est généralement décidée
en raison d'une situation complexe, confuse ou sérieuse, les médecins
hospitaliers doivent veiller tout spécialement à fournir aux malades
les explications nécessaires, afin d'être assurés de leur
adhésion aux soins prévus. Parfois le consentement du malade est
un peu trop vite considéré comme acquis, au point que son opposition,
si elle se manifeste, scandalise plus ou moins et prend l'allure d'une incongruité.
Certes, avant de lui faire subir une intervention chirurgicale, on le préviendra,
ainsi que sa famille, mais on l'aura quelquefois soumis au préalable
à nombre d'examens dont certains comportent des risques, et à
des traitements sur lesquels peu d'explications lui sont données. S'il
exprime des réticences vis-à-vis du traitement, ou du transfert
décidé vers un autre service, le médecin n'a pas toujours
le temps, la patience de lui expliquer et de le convaincre, ce qui est regrettable
et doit être évité.
Ces explications sont d'autant plus recommandables que le malade se trouve
assez souvent pris par une obligation de fait de donner son consentement, dans
un établissement hospitalier ou certains organismes de soins, parce qu'il
ne voit pas pour lui d'alternative. L'alternative doit toujours exister et être
signalée au patient. Quand le malade est réticent, il ne faut
pas hésiter à lui faciliter l'accès à un consultant
pour un "deuxième avis" et faire appel à son médecin
traitant, avec lequel il décidera.
Dans des domaines particuliers dont le nombre ne cesse de croître, le
législateur est intervenu pour rappeler la nécessité d'un
consentement du patient avant l'exécution d'un acte médical et
pour en fixer les modalités.
- La loi du 17 janvier 1975 sur l'interruption volontaire de grossesse précise
les caractéristiques du consentement qui doit être donné
par la femme concernée et, le cas échéant, ses parents
ou représentants légaux (art.18 ).
- La loi du 20 décembre 1988 (loi Huriet) définit avec précision
les caractéristiques du consentement "libre, éclairé
et exprès" qui doit être recueilli auprès des personnes
qui se prêtent à des expérimentations sur l'être humain
vivant (art.15 ).
- La loi n° 94-654 du 29 juillet 1994 relative au don et à l'utilisation
des éléments et produits du corps humain, à l'assistance
médicale à la procréation et au diagnostic prénatal
(remplaçant la loi du 22 décembre 1976, dite loi Caillavet) qui
régit les prélèvements d'organes exige une autorisation
libre et expressément consentie du donneur vivant ou, s'il est mineur,
de son représentant légal ; on ne peut toutefois passer outre
à l'opposition d'un mineur (art.16 ).
- La loi du 4 janvier 1993 réorganisant la transfusion sanguine introduit
l'obligation de recueillir le consentement écrit du ou des représentants
légaux du donneur lorsqu'il est mineur, ainsi que l'assentiment de ce
dernier avant tout prélèvement sur sa personne.
- La loi du 1er juillet 1994 relative au traitement des données nominatives
ayant pour fin la recherche dans le domaine de la santé exige que soit
obtenu le consentement éclairé et exprès des personnes
concernées dans le cas où cette recherche nécessite le
recueil de prélèvements biologiques identifiants. Elle prévoit
toutefois que des "informations peuvent ne pas être délivrées
si, pour des raisons légitimes que le médecin traitant apprécie
en conscience, le malade est laissé dans l'ignorance d'un diagnostic
ou d'un pronostic grave".