On connaît les aptitudes des sectes à la manipulation sémantique c'est-à-dire au détournement du sens de certains mots ou concepts à leur profit. L'usurpation de termes comme Église, Religion, Humanisme, Philosophie, nous le savons, fait partie de leur arsenal de promotion et de défense. Elle leur permet de se draper dans la dignité et de crier à l'intolérance dès qu'on se permet de les démasquer.
Qu'est-ce que la Laïcité ?
La laïcité est historiquement attachée à la séparation des Églises et de l'État avec son corollaire : une société laïque se définit par le fait que le " religieux ", qu'il soit individuel ou collectif, n'a pas d'emprise sur la vie civile mais qu'il est exclusivement du domaine de la vie privée. Elle affirme en même temps la reconnaissance de la liberté de conscience pour chaque citoyen. Ainsi, de cette première approche, les sectes tirent un argument apparemment incontestable : " chacun est libre d'adhérer aux croyances de son choix, donc toute attaque contre un groupe qui se réclame d'une doctrine est une atteinte à la laïcité ".
On peut rappeler, à ce stade, que les associations telles que les ADFI ne s'attaquent pas au contenu des croyances - aussi aberrantes soient-elles - mais mettent en cause les comportements et les pratiques qu'elles camouflent et qui, justement, mettent à mal l'une des bases de la laïcité : La liberté de l'individu.
Par ailleurs, la plupart des sectes annoncent plus ou moins explicitement leur rejet de la société ou leur projet d'hégémonie et de conquête, à terme, du pouvoir absolu.
L'élitisme qu'elles pratiquent est antinomique de l'égalité entre les citoyens que soustend la société laïque française. Lorsque des croyants, quels qu'ils soient, prétendent imposer leurs convictions aux autres, on sort du cadre de la laïcité.
Autre aspect que dissimulent les sectes ainsi que leurs apologistes et que pose clairement la Constitution de 1958 dans son article premier : " ... La France est une République ... qui assure l'égalité devant la Loi de tous les citoyens sans distinction d'origine, de race ou de religion .... ". Or, on le sait, de nombreuses sectes bafouent la loi dans des domaines divers (éducation, droit du travail, exercice illégal de la médecine, désobéissance civique, déviances commerciales, fraudes fiscales etc.) alors que la laïcité s'exprime aussi dans un statut civique et social se traduisant, en particulier, par cette formule : " Le droit à la différence ne doit pas mener à la différence des droits ".
La réaction vigoureuse des Pouvoirs publics pour réprimer la délinquance sectaire montre bien que leur marginalisation civique ne relève pas d'une vue de l'esprit ou de faits divers isolés. Par leurs comportements asociaux, ils s'excluent du champ de la citoyenneté, dont la laïcité en France est un élément.
En fait, les sectes, derrière leur revendication de la liberté qu'octroie la laïcité, ne cherchent qu'à obtenir leur liberté de nuisance en marge de la Société. Criant à la discrimination, contraire à la morale laïque, plusieurs sectes, avec le cynisme qui les caractérise, vont, non seulement, réclamer plus de facilités, mais aussi certains avantages : ceux que conférerait l'application de la loi de 1905 à leurs organisations présentées en tant qu'" association cultuelle " (Voir BULLES n° 36 page 21). Par là, les groupes sectaires entendent se mettre sur le plan des religions à qui les pouvoirs publics attribuent une certaine " labélisation " en contrepartie du respect de règles très strictes, en application de cette loi de 1905.
L'argumentation des sectes est primaire : puisque nous nous intitulons " Église ou Communauté religieuse ", pourquoi n'aurions-nous pas droit au même traitement que les cultes traditionnels ? Elles oublient de reconnaître qu'elles sortent du cadre défini par la loi de 1905. Rappelons ce que disait Ron Hubbard, fondateur de la Scientologie : " Si vous voulez gagner beaucoup d'argent, fondez une Église ". Au moins, la motivation est claire !
La laïcité brimerait-elle les sectes ?
Avant de répondre à la question, il importe de réfléchir sur les principes suivants :
- ne pas confondre la liberté, qui inclut la laïcité, avec la permissivité inconditionnelle ;
- comprendre que cette laïcité est porteuse d'exigences pour chaque citoyen, dont la première est le respect des autres ;
- respecter l'ordre public, qui concourt à l'harmonie sociale.
Une réponse sur le plan concret peut être faite en rappelant l'insertion dans la Constitution et dans la Loi française de la séparation du " laïque " et du religieux, mais aussi la prééminence de la Loi française, ensemble qui constitue vraisemblablement pour un pays démocratique le meilleur fondement pour contenir les déviances des sectes, contraires aux droits fondamentaux et à la dignité de l'homme.
Aux États-Unis la notion de Laïcité n'existe pas ... Il en résulte une différence de conception du droit et de son application .
Bref, on pourrait conclure en disant que la véritable
question concerne les tentatives de subversion des sectes, celles-ci
exploitant tous les moyens possibles donnés par la législation
dont la laïcité.
Notes complémentaires
La laïcité en France est historiquement attachée
à la séparation des Églises et de l'État.
En fait, l'histoire de la laïcité remonte aux humanistes
de la Renaissance (XVIème siècle), puis aux philosophes
des Lumières (XVIIIème siècle) et, en 1789,
à la Déclaration des Droits de l'Homme (article
9) :
" Nul ne doit être inquiété pour ses opinions mêmes religieuses pourvu que leur manifestation ne trouble pas l'ordre public ".
Cet article visait la liberté de penser et de manifester librement ses opinions et pas uniquement la liberté religieuse.
C'est en 1905, dans un contexte historique déterminé, que fut votée la loi de séparation des Églises et de l'État. L'article 31 de cette loi stipule notamment :
" Sont punis ... ceux qui, par voiesde fait, violences contre un individu, soit en lui faisant craindre de perdre son emploi ou d'exposer à des dommages sa personne, sa famille ou sa fortune, l'auront déterminé à exercer ou à s'abstenir d'exercer un culte, à faire partie ou à cesser de faire partie d'une association cultuelle, à contribuer ou à s'abstenir de contribuer aux frais d'un culte ".
L'attendu du Procès de Lyon (TGI), 22 novembre 1996 :
"Des individus qui utilisent une doctrine philosophique ou religieuse, dont l'objet est licite, à des fins financières ou commerciales, pour tromper volontairement les tiers sont susceptibles d'être poursuivis pour le délit d'escroquerie.
L'exercice ou la pratique d'un culte peut d'ailleurs donner lieu à des manuvres frauduleuses de la part de certains membres de cette religion en vue de tromper des tiers de bonne foi.
L'appréciation de ces manuvres frauduleuses à travers une pratique religieuse revendiquée n'implique pas un jugement de valeur sur la doctrine professée par cette religion, mais concerne la licéité des moyens employés.
Les juridictions pénales ont toute latitude pour apprécier l'utilisation de ces moyens externes et de vérifier s'ils n'ont pas pour but de tromper volontairement les contractants. "
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