Comment j'ai rencontré les Humanistes

(source : témoignage de Romy - Paris, septembre 2001

 


En février dernier, j'ai fait connaissance avec une personne très chouette. C'est par hasard qu'il a été question de ses activités humanistes. Elle militait activement à l'occasion de la présentation d'une candidate du Parti Humaniste aux élections municipales dans mon quartier, le 11° arrondissement de Paris. A part le collage d'affiches et la distribution de tracts dans la rue, elle restait très discrète et n'en parlait pas d'elle-même.

J'ai été curieuse de cet "humanisme" dont je n'avais jamais entendu parler. J'ai découvert que le PH n'était que l'organe politique d'un mouvement plus général.
J'ai immédiatement été séduite, étant déjà très "humaniste" moi-même : je ne vais pas rentrer dans le détail de mes convictions personnelles, mais il y avait une réelle adéquation entre ce que me disait cette personne et la façon dont je formule mes valeurs.

C'est moi-même qui ai insisté pour en savoir plus, pour faire connaissance avec ce "mouvement" qui m'apparaissait comme providentiel, et dont j'étais sidérée de n'avoir jamais entendu parler auparavant.

Une secte ?
Enthousiasmée par cette rencontre, j'ai parlé de ma découverte autour de moi. Deux amis m'ont alors dit avoir connu des Humanistes, et les avoir trouvé "louches" et "pot de colle". Ils se plaignaient d'avoir été harcelés au téléphone : "ils trouvent toujours une bonne raison pour te rappeler, t'inviter à leurs réunions, et à défaut te faire parler..."
Je n'ai écouté que d'une oreille, car les deux amis en question parlent beaucoup et agissent peu, et ne prennent pas beaucoup position, ne s'engagent pas, ne se mouillent pas trop dans la vie. Moi, j'aime bien me positionner, mettre des actes à la suite de mes idées et j'aime assez le principe associatif.

La personne du MH que je connais fait partie du Parti Humaniste. Elle ne m'a pas caché que celui-ci était régulièrement accusé d'être une secte. Cela la mettait d'ailleurs hors d'elle. Elle parlait d'accusations mensongères, de coup bas dans la stratégie électorale des municipales. J'écoutais tout cela d'une oreille distraite : les querelles politiques m'intéressent peu, surtout celles de cet ordre. Ca me semblait mesquin et futile. Les âmes de bonne volonté finissent toujours par se faire connaître comme telles : inutile donc de s'énerver, il suffit de laisser la rumeur mourir d'elle-même !

Humanisme kezako ?

J'ai posé beaucoup de questions, notamment sur le sens précis du mot "humaniste". Mais il me restait toujours des zones d'ombre.
J'ai eu un mal de chien à obtenir le moindre document présentant le mouvement. Les sites web où je croyais trouver de l'information et des précisions sont extrêmement frustrants : de belles choses sont dites, bien présentées, mais en fait, il n'y a pas de contenu. Je reste sur ma faim. Quelles sont les actions entreprises ? Comment tout cela fonctionne-t-il ?
J'aurais aimé lire Silo, le penseur de ce "Nouvel Humanisme", mais on m'a assuré qu'il n'était pas traduit et qu'on ne le trouvait dans aucune librairie ni bibliothèque en France. J'ai eu en main un exemplaire un peu écorné, mais vu le manque d'ouvrage en circulation et le nombre de personnes souhaitant le lire, il me fallait attendre mon tour.
A défaut, je suis donc allée voir sur le terrain : dans une réunion de travail, une soirée barbecue au profit du Burkina... en continuant de poser mille et une questions. J'aime bien comprendre où je mets les pieds ;-)

Organigramme et hiérarchie

J'ai bloqué le jour où on m'a expliqué le fonctionnement hiérarchique du mouvement.
Deux choses m'ont chagrinées...

Organigramme... x10 !
J'avais sous les yeux une feuille de papier avec un organigramme on ne peut plus clair et normal. C'est le commentaire qui m'embêtait : la référence, c'était le nombre de personnes.
Chaque responsable mentionné dans l'organigramme a sous sa responsabilité 10 personnes, qui ont elles-mêmes sous leur responsabilité 10 personnes, et ainsi de suite. Le fait de compter les personnes, qui plus est par paquet de 10, m'a semblé contradictoire avec l'énoncé même du mouvement : "l'être humain en valeur centrale".
Inversement, on monte en grade dans l'organigramme en réunissant 10 personnes. Ainsi, moi-même, si je le souhaite, il me suffit de réunir 10 de mes amis, sensibles à la cause humaniste, de le faire savoir, et je me retrouverais ainsi mentionnée dans l'organigramme.

Or il se trouve que je n'ai pas de talents relationnels fédérateurs, mais que ça ne m'empêche pas d'en avoir beaucoup d'autres. J'étais contrariée parce que j'avais un réel désir de faire quelque chose, et je me sentais capable d'endosser des responsabilités, et je le souhaitais.
Mais il était hors de question pour moi de réunir 10 personnes autour de moi uniquement pour pouvoir commencer à être active dans le mouvement humaniste. Ce n'est pas ainsi que cela a été dit, bien sûr, mais c'est ce que je pouvais déduire de l'exposé qui venait de m'être fait.

En les quittant ce soir-là je me suis fait cette réflexion : compter en quantité, c'est nier la qualité individuelle, les potentiels de chacun. Cette façon de compter par paquet de 10, comme s'il s'agissait d'une unité de mesure, trop précise pour être complètement honnête, me fait un peu bizarre. Je pensais en parler la fois suivante, mais je n'en ai pas eu l'occasion.

Qui dirige ?
La deuxième chose qui m'agace, c'est la grande difficulté à discerner le haut de l'organigramme. Ce n'est pas tenu caché, mais c'est flou, c'est incompréhensible.
La réponse, c'est que chacun est libre d'agir, de fonder un groupe, une association humaniste, comme bon lui semble. Il y a ainsi pléthore d'associations humanistes, avec localement, un président. Comme s'il n'y avait pas de "tête". Pas de responsable général.

Il y a Silo, bien sûr, mais c'est seulement le penseur, et il s'est retiré. Or il me semble que toute association, tout mouvement qui se respecte, veille au contraire à garder une ligne de conduite : je pense à l'ACAT ou à Amnesty International, qui ont leurs responsables, leurs porte-parole, et qui énoncent clairement leurs principes, leurs valeurs. S'il n'y a effectivement pas de tête, pas de ligne directrice, à quoi cela sert-il de s'affilier au Mouvement Humaniste ? Quel sens cela a-t-il ?

Ce flou quant au sommet de l'organigramme va de paire avec la difficulté à obtenir des renseignements précis. Les valeurs générales, je les ai comprises, et il me semble les partager, ce qui n'est finalement pas difficile tant elles sont globales. Mais cela ne suffit absolument pas pour s'associer : je n'arrive pas à comprendre concrètement quelle pourrait être ma place là-dedans, quel pourrait être mon apport. Quelles sont les actions ? Les moyens d'action ? Les objectifs locaux ? Les réussites ? Les échecs ? Je n'en sais toujours rien.

Tout cela manque finalement de transparence. Et je n'arrive pas à souhaiter prendre place dans une chose qui demeure floue. Les idées énoncées me conviennent, mais cela ne fait pas tout. Je prends un peu de distance depuis, et n'ayant pas eu l'occasion de poser toutes les questions que j'avais, ni donc d'avoir de réponses, j'observe un peu plus.

Un vocabulaire bien particulier

Certains mots et expressions reviennent souvent, employés avec un sens particulier : avoir une image, travailler un thème.
J'entends aussi parler d'orientateurs : ceux-ci dirigent/orientent/conseillent par une correspondance mail régulière les groupes au Burkina Fasso, en pleine expansion paraît-il. "Paix, force et joie" est le leitmotiv rituel qui signe chacun de leur mails. Même si cela ne m'a jamais été ouvertement proposé, il est aussi question de réunions hebdomadaires et de séances de travail personnel. Leurs sites web parlent d'auto-libération, d'expérience guidée...

Je peux admettre effectuer sur moi-même un certain "travail". J'espère être en évolution, et avoir une présence constructive en ce monde, mais quelque part je n'arrive pas à admettre qu'un groupe (dont en plus je ne parviens pas à discerner les tenants et les aboutissants) s'en mêle. Après tout, cela ne regarde que moi & moi, et éventuellement, quelques amis avec lesquels je me sens en confiance.

Comment un mouvement pourrait-il être tout à la foi ? parti politique, initiateur d'actions humanitaires et aussi... psychothérapie ??? nourriture spirituelle ???

Rien ne va plus !

Un dernier point : j'ai noté une certaine réticence à l'évocation des autres associations, institutions, ONG qui agissent sur le même terrain, comme s'il ne fallait pas s'entraider entre groupes agissant pour une même cause. Comme si ces autres associations, institutions, ONG ne devaient pas être pris en compte, parce que n'agissant pas avec les mêmes valeurs centrales, avec la même foi, n'apportant pas, finalement la même chose, le même essentiel... Encore une fois, il y a là contradiction avec la volonté de "reconnaissance de la diversité" et le "rejet de la discrimination" professé par le MH.

Si les Humanistes abondent en belles paroles pleines d'espoir, le discours de base est tout d'abord critique et dénonciateur. A les écouter, le monde actuel est violent, immoral, injuste, etc... Sur le site du PH, on apprend que "la majorité des partis politiques nous manipulent". Bref, nous sommes entourés d'ennemis, le moment actuel est porteur de crises graves qui mettent en cause l'existence de l'humanité, et merde, c'est la cata !

J'ai toujours eu une réaction d'écœurement mêlée de méfiance farouche quant aux discours négatifs qui prétendent que rien ne va plus, que le monde court à sa perte, et qui rejettent en bloc ce qui nous entoure. Ce sont pour moi des paroles de vieilles gens aigries, un peu paumées, dépassées par les évènements...
Ce n'est pas ainsi que je vois le monde dans lequel je vis : tout n'y est pas parfait, mais perfectible, et je suis heureuse d'en être et d'essayer de le rendre plus beau. Pourquoi tout jeter ? A partir de quoi et comment agit-on quand on rejette tout ?

Mais après tout, il ne s'agit là ni plus ni moins que d'une divergence de point de vue...

Pour conclure...

Mon propos n'est pas accusateur, dans le sens où je n'ai personnellement à me plaindre de rien. Je préfère penser que les amis humanistes que j'ai connu, au demeurant fort sympathiques, sont sincères.

Simplement, je reconnais que la chose "humaniste" n'est pas clairement identifiable et manque de transparence. Ce qui n'incite pas à la confiance.
Je comprends mal le développement de ce groupe, ses buts, ses moyens d'action… Cela n'est sans doute qu'un simple courant de pensée, peut-être une nouvelle forme de religion qui ne s'annonce pas comme telle car le mot n'est pas à la mode. En tout cas ça me laisse une étrange impression : mélange de bonne volonté brouillonne et de pauvreté idéologique.

Bref, j'en reviens avec une kyrielle de questions sans réponse. Dans le doute, je préfère m'abstenir et aller voir ailleurs si ça ne bouge pas plus efficacement. Je regrette surtout que le qualificatif "humaniste" soit employé avec un tel flou, avec une telle négligence.

Romy
Paris, septembre 2001

 


  
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