Intervention polonaise au Colloque Européen sur le sectarisme des 23-24 avril 1999 à Paris. M. Grzegorz Mikrut s'y exprimait au nom de l'Institut de Criminologie de l'Université Jiagellon (Cracovie) dirigé par le Pr. Tadeusz Hanausek. Il a donné les idées directrices d'un travail en cours demandé par le Gouvernement Polonais à cet Institut, travail intitulé « Mafias, sectes, crime organisé ».
Ce travail cherche à mieux classifier les entités « mafias, sectes et crime organisé ». Il commence par cet élément de définition : « Une secte génératrice de crimes est un groupe de gens qui partagent le même système de valeurs habituellement élaborées par le groupe lui-même. Ce qui maintient l'unité du groupe, ce sont de pseudo-rituels. Le but et la réalisation des activités du groupe sont contraires à la loi et aux valeurs socialement admises, et ne sont pas admises par l'État »
Il est essentiel de définir ce que signifie « crime organisé », et de le distinguer du terme « mafia ». Malgré les nombreux points communs, le terme mafia devrait être réservé à un groupe qui, en plus de ses caractères typiquement criminels, a en propre le plus souvent des relations familiales ou pseudo-familiales. Une mafia est solidement hiérarchisée, elle est parfois appuyée par des milieux politiques ou sociaux. Le secret absolu va de pair avec une cruauté exceptionnelle employant les méthodes les plus bestiales.
Dans le crime organisé, il y a au moins deux membres mutuellement au courant de leurs actions, sans que cela signifie une mise au courant constante et pour toutes les activités. Groupe organisé signifie :
- qu'il y a des règles non-formalisées pour le choix de ses membres,
- qu'il est fondé sur la coopération positive et sur des règles hiérarchiques de subordination et de discipline,
- qu'il opère une certaine sélection et une répartition des rôles suivant la compétence de ses membres pris individuellement ou en groupes,
- qu'il fixe des buts et des axes pour leurs activités et qu'il élabore leurs conceptions d'ensemble,
- qu'il fixe un certain système de défense.
Le crime organisé est dirigé de telle sorte que le crime commis ne soit pas toujours exécuté par les membres. Il est centré aussi sur le fait de produire et d'acquérir du profit.
La question qui se pose alors est de savoir si l'activité de sectes génératrices de crimes est (ou non) admise par l'État et si cette activité est contraire à la loi et aux normes socialement admises, et si elle doit être considérée comme relevant du crime organisé ?
Les sectes sont constituées sur la base d'une relation étroite entre leurs membres. Elles ont toutes les caractéristiques d'un groupe social. Leurs membres doivent obéir à des règles internes au groupe, avec système de sévères punitions. Elles ont une stricte structure hiérarchique. Si la secte est orientée vers l'accomplissement de crimes, cela est souvent en rapport avec la doctrine cultuelle : crimes rituels, viols, atrocités commises sur le corps, tortures d'animaux employés pour des sacrifices. Cependant une telle secte n'est pas forcément assimilée à quelque religion que ce soit, elle peut avoir d'autres « valeurs » soit séculières, soit spirituelles.
Le mode relationnel à l'intérieur du groupe peut-il avoir un caractère de mafia ? Les membres de secte génératrice de crimes habituellement ne sont pas liés entre eux par des liens familiaux, cependant des « fraternités de sang » s'opèrent consistant en mélange physique de sang entre membres du groupe. L'idéologie inculquée est bien souvent renforcée par l'application de techniques de psycho-manipulations contraires à l'éthique. Elle mène à des changements de personnalité, si bien que pour cette raison les membres de sectes sont souvent plus unis que ceux d'une famille ordinaire. Une stricte discipline avec un système punitif sans ménagements diffère peu des tortures médiévales.
Comment combattre le crime organisé, les mafias et les sectes génératrices de crimes ? Toutes sortes d'actions menées par ces groupes sont secrètes. Certaines méthodes sont appliquées pour intimider les membres de sectes, ce sont les raisons pour lesquelles il est extrêmement difficile de combattre ces phénomènes. La méthode de l'infiltration fonctionne indubitablement vis-à-vis du crime organisé de mafias, mais elle échoue face aux sectes qui usent des techniques de contrôle mental, d'endoctrinement intense et de toutes autres méthodes de psycho-manipulation. Pénétrer de tels groupes sans y appartenir est-il possible ? À cette question seuls peuvent répondre des experts en technique de mise sous influence mutuelle, comme cela s'opère dans une secte.
Les résultats des recherches évoquées plus haut nous permettent de considérer les sectes génératrices de crimes comme des groupes criminels organisés. Elles ont de plus des traits spécifiques plus dangereux que ceux d'une mafia en ce qui concerne le mode relationnel dans le groupe. Les recherches en cours tendent à décrire et à fournir des méthodes d'iden-tification, de détection, de recherches de preuves et de prévention concernant l'activité criminalistique des sectes génératrices de crimes. À cause de la nature des technique employées par elle, la recherche doit être menée conjointement par des spécialistes tels que juristes, criminologues, psychologues, psy-chiatres, etc ...
La police sollicite l'Institut. Elle requiert son opinion sur des crimes ayant impliqué des membres des sectes. Il est bien connu que la menace des sectes ne concerne pas des pays qu'isolément, il y a beaucoup de groupes de caractère international, comme des groupes satanistes qui, en dépit de différences de doctrines, de rites et d'organisation, mènent une action d'ensemble. Des exemples abondent de coopération entre sectes génératrices de crimes et groupes variés sans caractères cultuels et dénués des mêmes préoccupations.
« C'est pourquoi toute action entreprise contre les sectes devrait être précédée par une recherche étendue, approfondie et menée au plan international par des institutions sociales ou de recherche, spécialement par celles responsables de la sécurité des différents pays. »
Commentaire de BULLES
Le colloque européen des 23-24 avril a inclu dans sa motion
finale la demande d'une institution européenne de vigilance1. La
même demande est formulée dans le rapport parlementaire français
« les sectes et l'argent ». Il faut avancer dans cette voie.
Plusieurs Commissaires européens et l'ancien Président du
Parlement européen lui-même ont dit clairement que l'Euro
serait une cible privilégiée pour les sectes. Il est heureux
que les associations de défense des victimes aient soulevé
le problème depuis plus de vingt ans et paré à l'urgence
malgré leurs pauvres moyens.
Un exemple de coopération interdisciplinaire semble particulièrement indiqué : des législations de différents pays européens tels que la France et l'Italie ont codifié la notion d'association de malfaiteurs. La question serait clarifiée si des juristes comparaient ce qui existe avec l'intention de rendre cette législation plus homogène et plus opérante.
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