Aum Shinri Kyo

Récapitulation sommaire

 (source : BULLES du 4ème trimestre 1995)

Les événements concernant la secte japonaise "AUM" (en japonais OMU) Shinri Kyo (Vérité Suprême) sont ici récapitulés sommairement :


Historique

  • 1955 - Naissance de Chiuzo Matsumoto (qui s'appellera plus tard Shoko Asahara) dans l'île de Kyoushou (au sud du Japon), 6ème des 7 enfants d'un fabricant de tatamis. Ayant un oeil aveugle, l'autre malvoyant, il est envoyé dans une école (gratuite) pour jeunes aveugles. Il y domine et exploite ses condisciples, entièrement aveugles. Orgueilleux et ambitieux, il ne réussit cependant pas l'examen d'entrée à l'Université. Il s'établit acupuncteur.

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  • 1978 - Il épouse une étudiante, Tomoko Ishii, dont il aura 6 enfants. Il ouvre une boutique de remèdes chinois traditionnels.

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  • 1982 - Il est arrêté pour vente de traitements bidon, et condamné à 200.000 yen d'amende. Faillite.

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  • 1984 - Il ouvre une école de yoga sous le nom d'Asahara. Il passe quelque temps dans un ashram de l'Himalaya (Népal) et en revient en se vantant d'être parvenu au satori (illumination suprême, en japonais) et de savoir léviter. Il montre sa photo avec des moines tibétains, et même le Dalai Lama, qu'il cite : "Asahara a l'esprit d'un Bouddha, et a la mission de rendre la vérité".

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  • 1987 - Fondation de Omu Shinri Kyo, déclaré officiellement comme religion.

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  • 1990 - Omu Shinri Kyo présente des candidats à la Diète japonaise (Parlement); aucun élu. Il commence à se donner les titres de "Christ d'aujourd'hui" et "Sauveur de ce siècle". La secte a une extension rapide au Japon avec des succursales dans tout le pays, établit quelques têtes de pont aux États-Unis, en Allemagne et réussit bien en Russie (voir ci-dessous).

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  • 1993 - Il serait venu en France du 31/7 au 07/8 pour étudier Nostradamus.

  • Doctrine

    Bouddhiste de nom, la doctrine est plutôt un pot-pourri d'éléments hétéroclites : culte de Shiva (dieu hindouiste de la destruction), éléments du Nouvel Age, occultisme (un de ses héros : Hitler, "maître de l'occulte"). Le satori ne lui a pas donné la sérénité : il est obsédé par l'idée de conspirations visant à détruire le Japon. Bête noire : les États-Unis et leurs alliés occidentaux, créatures des Francs-maçons et des Juifs. Instruments de destruction : le fast food, le sexe et des armes plus violentes (chimiques et nucléaires).

     La secte annonce la fin du monde entre 1997 et 2.000. De plus en plus autoritaire, Shuko Asahara se fait adorer, baiser l'orteil. Ses disciples achètent très cher un mélange de ses sécrétions, qu'ils boivent.

    Adeptes

    Il y a environ 10.000 adeptes au Japon. La secte y possède son centre principal à Kamikuishiki, à 100 km de Tokyo, non loin du Mont Fuji. Ses adeptes sont des personnes âgées et riches qui disparaissent après avoir donné tous leurs biens, mais aussi des jeunes scientifiques de haut niveau, des avocats et même des membres de la police et des forces armées. Les adeptes à temps plein quittent leurs familles (parents, épouses), donnent tous leurs biens au gourou et travaillent pour lui (laboratoires, usines, hôpital).

     Particularités :

    Les événements

  • 1989 - 4 novembre : un avocat, Tsutsumi Sakamuto, sa femme et son fils de 14 mois disparaissent. Il représentait un groupe de familles qui avaient porté plainte contre la secte. La police a abandonné les recherches. (Dénouement : voir 1995).

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  • 1994 - D'autres "incidents" graves :
  • 1995
  • D'autres attentats ou tentatives suivent : Dès avant le procès de Soko Asahara, l'affaire a déjà eu des conséquences au Japon et dans le monde. Au Japon, ce fut le choc, qui continue à se faire sentir. On avait l'impression, dans ce pays où la société est toujours remarquablement homogène (dans l'ensemble), la tradition familiale solide, l'autorité respectée, que le terrorisme était une spécialité occidentale et particulièrement américaine. Et voilà qu'une religion tout à fait autochtone, se réclamant du bouddhisme, avait prémédité de longue main, organisé et exécuté des attentats meurtriers visant toute la population. C'était une secousse pire que le tremblement de terre de Kobé.

     Les conséquences politiques sont elles aussi importantes. 0n s'est aperçu qu'Aum avait des adeptes-informateurs jusque dans la police japonaise, avait recruté dans les milieux scientifiques, chez les avocats, et dans la classe dirigeante.

     Le 9 octobre, un jugement du tribunal de Tokyo prive Aum de son statut d'association religieuse, en raison de ses activités criminelles telles que la fabrication du gaz toxique sarin. Un liquidateur sera nommé pour vendre les actifs du groupe, dont l'estimation varie entre 300 millions et 1 milliard de dollars. (biens immobiliers, boutiques d'informatique, maison d'édition, agence de voyages, restaurants populaires, et même une agence de rencontres ; sans parler des comptes bancaires). Le produit de la liquidation servira en priorité à indemniser les familles des victimes. L'avocat de la secte a annoncé son intention de faire appel.

     Un projet de loi présenté par le gouvernement japonais prévoit que les organisations religieuses établies dans plus d'une préfecture devront désormais être déclarées auprès du ministère de l'Éducation, déposer la liste de leurs biens et de leurs responsables. Le ministère aurait également la possibilité de vérifier leur comptabilité. Ces dispositions ne paraissent pas gênantes pour les religions au sens ordinaire du mot ; la population japonaise, dans sa grande majorité, y voit un minimum. Mais le principal parti d'opposition, le Shin shinto (Nouvelle Frontière), créé par la secte Soka Gakkai (en remplacement et élargissement du Komeito) manifeste son opposition, de même que le cardinal archevêque de Tokyo, Mgr Shiranayagi, qui y voit une menace pour la liberté religieuse.

    AOUM en Russie

    Présent en Russie dès 1986, Aum s'est lancé en 1992, avec une campagne en fanfare ; plusieurs millions de dollars ont été dépensés pendant les premiers mois : émission quotidienne sur Radio-Majak, programme hebdomadaire d'une demi-heure sur une chaîne de télévision privée, publicité dans les journaux, milliers de tracts et affiches, et même annonces sur le système de sonorisation du métro de Moscou.

     Et surtout, Aum s'est introduit dans l'appareil d'État, grâce à Oleg Lobov, secrétaire du Conseil de sécurité de la Fédération de Russie, un des plus proches collaborateurs du Président de cette Fédération, ainsi qu'à Alexandre Rutskoï, alors vice-Président, et Ruslan Khasbulatov, président du Soviet suprême. Lobov est devenu président de l'" Université russo-japonaise ", installée en plein centre de Moscou. Si son programme était plus que vague, elle servait surtout à abriter la branche russe d'Aum. Asahara et ses lieutenants avaient des visas permanents pour la Russie, roulaient dans des limousines avec plaques d'immatriculation officielles.

     Dès cette année 1992, Aum était déclaré comme religion au ministère de la Justice (à la mi-1994, il y a eu une deuxième déclaration sous le nom de "Doctrine de la vérité Aum"). Des initiations de masse avaient lieu au stade olympique de Moscou. L'organisation en zones et régions était rigoureuse, hiérarchisée, les postes de direction étant occupés par des Japonais. En janvier 1995, Aum disait avoir 35.000 adeptes à Moscou et sept succursales en Russie (entre autres St Petersbourg, Mourmansk, Archangelsk, et jusqu'en Sibérie).

     Pour les Russes, Asahara insiste particulièrement sur le fait qu'il est le véritable Christ ; il dit avoir découvert le vrai sens de l'Évangile ; bouddhisme et christianisme, selon lui, sont totalement identiques. Mais Asahara a dépassé le christianisme : "Jésus-Christ a été crucifié, mais moi, le prochain Christ, je ne serai pas crucifié, mais j'irai plus loin et je répandrai la vérité sur le monde entier". Jésus est venu pour conduire les âmes dans les cieux saints - Asahara les emmènera encore plut haut : au Nirvana, "le monde de la grande et complète destruction des convoitises terrestres". ("Declaring myself the Christ", traduit et édité par Aum, Shisuoka, Japon, 1992). Malgré cette assertion ("moi, je ne serai pas crucifié"), il se fait représenter sur la couverture du livre, en crucifié, une couronne d'épines sur la tête, nu, sauf un morceau d'étoffe autour des reins. Cette image devait sans doute servir à appâter le public russe en donnant l'impression qu'il s'agissait d'un livre sur le christianisme. Pour les Russes également, il insiste sur les complots criminels des Francs-maçons et des Juifs.

     Malgré de nombreux cris d'alarme, les protecteurs russes d'AUM n'avaient rien voulu voir - il a fallu les attentais du métro de Tokyo pour que le tribunal de Moscou prononce l'interdiction d'Aum, et qu'une nouvelle loi sur les "sectes" soit votée à la Douma. Lobov et Rutskoï n'ont pas l'air particulièrement embarrassés. On frémit pourtant en pensant aux facilités que son association avec la sécurité militaire russe ouvrait à Aum. Non seulement elle a pu se procurer toute sorte de produits chimiques toxiques en grande quantité, mais le gourou et ses proches (avant leur arrestation) brandissaient la menace nucléaire - et on sait tout ce qu'il est possible de se procurer en Russie. (Aum avait d'ailleurs acquis des terrains uranifères en Australie).

     Au printemps 1995, Aum a disparu de la scène publique en Russie. Mais d'autres organisations, encore plus puissantes, sont toujours là et étendent leur pouvoir, avec l'appui de responsables politiques.

      


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